vendredi 1 avril 2022

Qui finance Zemmour ?

 

Sans doute ai-je eu le tort de regarder la campagne de Zemmour du point de vue de ses imbécilités, de ses mensonges et de son programme. Je crois que la vraie question c’est : d’où vient l’argent ? Parce qu’en remontant autant qu’on peut les origines de ses financements, on peut sans doute mieux comprendre ses buts véritables. Les paroles sont changeantes et aléatoires, engagent peu, on vient de le voir avec Zemmour retournant totalement te honteusement sa veste sur la question russo-ukrainienne

Les meetings organisés par Zemmour sont très coûteux, demandent un savoir-faire qui se paie très cher. De même pour acheter les traitres du RN ou de LR qui le rejoignent, il faut aussi beaucoup d’argent. Son équipe de campagne a monté de nombreuses associations et sites Internet dédié à sa gloire et cela coûte cher. Zemmour ne fera pas campagne sur son compte personnel mais on sait qu’il a beaucoup d’argent à sa disposition. On sait qu’il ramasse de l’argent depuis plus de deux ans. Également on commence à mettre à jour l’importance des relais qu’il a dans le système médiatique qui l’a pendant des mois surexposé. Ici on sait le rôle majeur de Bolloré. Mais ce qu’on sait moins c’est qu’il est aidé par des banquiers importants pour collecter des fonds. Ce qui explique que sa campagne ressemble trait pour trait à celle de Macron première manière[1]. Il a du reste cette même capacité que lui à injurier telle ou telle catégorie de la population. On a repéré plusieurs individus plutôt louches à la manœuvre. Il est difficile de savoir de combien d’argent disposent Zemmour et son équipe. Les banquiers sont très forts pour dissimuler les liquidités en créant des structures qui s’emboîtent les unes dans les autres afin qu’on en perde les traces. Officiellement les dons pour la campagne sont limités à 7500 € par donateur, mais on peut donner par l’intermédiaire de sa femme, de ses enfants, ou de ses employés sans problèmes. Médiapart a mis à jour quelques noms importants parmi les gros donateurs de la campagne de Zemmour[2]. 

 

L’autre banquier qui soutient Zemmour et qui s’occupe des financements de sa campagne, c’est Jonathan Nadler, c’est aussi un ancien de chez Rothschild puis qui s’est recyclé chez J.P. Morgan, la sulfureuse banque qui depuis plus de deux siècles est dans tous les mauvais coups financiers qui mènent à des crises économiques ravageuses[3]. Nadler a lever des fonds aux Etats-Unis pour le compte de Zemmour, Sans qu’on sache combien. Lui et Madar sont habitués de longue date à dissimuler les fonds, à les faire tourner d’une place à une autre afin qu’on en perde la trace. C’est le b-a ba du métier 

Laurent Meeschaert, propriétaire de l’Incorrect et proche de Marion Maréchal, s’était engagé à avancer des fonds. Ironie de l’histoire, il s’agit de l’ancien DRH de l’Oréal, entreprise dont le fondateur Eugène Schueller s’était compromis durant la collaboration. Mais ici Meeschaert apparait comme le Cheval de Troie de Marion Maréchal-Le Pen qui vise à tuer politiquement sa tante pour prendre sa place. Ce qui selon moi est impossible, car étant beaucoup trop proche des milieux financiers, elle ne ralliera jamais à elle suffisamment de prolétaires pour donner l’illusion qu’elle ne travaille pas pour l’oligarchie. Comme Zemmour, elle n’a pas bien compris qu’une élection devait rallier au moins une petite partie du peuple, car pour le reste Macron fait très bien le travail. Ces gens-là s’illusionnent quant aux possibilités de manipulation de l’opinion, ils n’ont pas compris que le coup qu’avait réussi Macron en 2017 est extrêmement rare, tous les autres présidents ont été élus en avançant qu’ils allaient faire quelque chose pour les petits salariés, que ce soit Chirac avec le coup de la fracture sociale, Sarkozy et son travailler plus pour gagner plus ou Hollande avec mon ennemi c’est la finance. J’emprunte la suite à l’excellent article du Courier des stratèges, voici ce qui est écrit[4] :

 

Donc, on récapitule :

3 millions viennent des adhésions populaires au parti Reconquête, apportées par 75.000 adhérents (on parle un mois plus tard de 90.000 adhérents), soit une moyenne de 40 de cotisations

6 millions (au 1er janvier) viennent de dons, apportés par 20.000 sympathisants. Mais les chiffres précis que donne Nadar sont qu1/3 des donateurs ont versé 1.000 et plus.

Cette dernière information pose un vrai problème de compréhension car, en admettant que tous ces gros donateurs naient donné chacun que 1.000 , puisquils représentent un tiers de 20.000 personnes, cela signifie quils sont, à grosses mailles, au moins 6.000 à avoir donné 1.000. Soit 6 millions . Or 14.000 personnes supplémentaires ont donné de largent.

Les comptes sont un peu opaques, mais on retiendra que largentier de Zemmour revendique (imprudemment) plus de 5.000 gros donateurs. Dans lhypothèse où ceux-ci satureraient le plafond de 4.600 de dons, Zemmour pourrait se trouver à la tête d’un trésor de guerre de 20 millions , sans compter le produit des cotisations du parti et les autres petits donc

 

Zemmour est dans les choux selon les derniers sondages, confirmant mon intuition première qu’il finirait quatrième ou peut-être même cinquième de ce concours. Il est plus que probable que Zemmour n’ira pas au-delà du 1er tour, et il est probable que le 1er tour ne lui coûtera pas plus que 10 millions d’euros. Macron qui a été un gros dépensier en 2017 n’a pas dépensé plus que 20 millions sur les deux tours. Mais supposons que Zemmour dépense 10 millions d’euros pour le premier tour, il est à peu près certain que ces 10 millions lui seront remboursés par l’Etat puisqu’il passera à peu près sûrement les 5%. Il restera donc 20 millions ! C’est énorme et on comprend facilement que sur ces 20 millions ses amis banquiers s’appliqueront à en faire disparaître la plus grosse partie, après avoir donné quelques miettes au parti Reconquête. Ces 20 millions de fonds supposés sont à mon avis en dessous de la réalité, on devrait être plus près des 25 millions. Mais cela montre que Zemmour est le plus riche de tous les candidats, peut-être même plus que Macron. Zemmour grenouille dans le monde feutré de l’oligarchie financière. Il s’est adjoint comme directeur de campagne Bertrand de la Chesnais. Beaucoup pense qu’il s’est agi de recruter un militaire, ce qui apporterait une caution patriote à cette entreprise. Mais ce général à la retraite, il y a longtemps qu’il grenouille dans des cabinets privés, notamment celui de Roland Berger. C’est un concurrent de McKinsey et d’Accenture, des cabinets de conseil qui travaille à conseiller des gouvernements à qui il pompe de l’argent, beaucoup d’argent. l’ensemble de ce système de financement montre que les banquiers qui ont aidé Zemmour à collecter des fonds sont à peu de chose près les mêmes qui avaient aidé Macron en son temps, lors de sa première campagne. Il ressort de tout cela que Macron comme Zemmour sont de cupides agents de l’oligarchie de la finance, qu’ils n’ont aucune autonomie par rapport à elle, et donc par suite se pose la question de savoir pourquoi Zemmour a été stipendié. Il semble que sa seule mission ait été de mettre le bordel à droite, aussi bien chez Les Républicains qu’au Rassemblement National. C’est assez réussi. Sans cela Macron aurait été deuxième derrière Marine Le Pen avec une dynamique négative contre lui. Peu de journalistes qui sont assez fainéants par nature, se sont intéressés à l’argent de Zemmour et préfèrent croire qu’il a un programme fasciste. Cela leur permet de se donner le beau rôle de l’antifasciste de profession, mais cela permet d’éviter de discuter de ce qui est le plus important : le programme n’est qu’un attrape-nigaud ! Comme je l’ai répété plusieurs fois, les programmes de tous les candidats ne se distinguent que par de toutes petites différences, pour les mesurer il faut prendre un pied-à-coulisse, car les points importants, comme la question de la monnaie ou de l’appartenance à l’Europe et la soumission à ses traités ne sont jamais abordés. L’important c’est l’or qu’on peut accumuler, mais discuter de ce point précisément c’est énoncer que nous ne sommes pas en démocratie et donc qu’il nous faut trouver autre chose que cette parodie pour que l’opinion se manifeste sur le plan politique. 

Au début du mois de février Médiapart publiait une enquête dans laquelle il était révélé la qualité et les noms des gros donateurs de Zemmour. C’est la classe des très hauts revenus, pour dire les choses plus directement, ce sont les représentants du grand capital qui sont derrière lui du point de vue financier, bien au-delà du simple Bolloré qu’on met un peu trop en avant et qui masque la collusion d’une classe prédatrice et revancharde dont le but est d’en finir avec la protection sociale, d’obtenir des taux d’imposition encore plus bas pour elle-même et également un pouvoir fort et tyrannique qui étoufferait toute velléité de révolte du corps social. Les questions de financement ne sont évidemment pas dénuées de fondement idéologique. 

 

Mais il y a encore un point important, c’est la question des sondages et de leur manipulation à la marge. Dans une vidéo publiée par Le canard réfractaire, il est avancé qu’une partie des sondages est financée directement par les candidats[5]. Comme les échantillons sont assez étroits, les marges d’erreur sont toujours aux alentours de 2%, en plus ou en moins, et que les sondeurs opèrent des redressements opaques par rapport aux chiffres bruts des enquêtes, il est assez facile de faire croire qu’un candidat comme Zemmour est en train de remonter, qu’il possède une dynamique et qu’il va passer devant Pécresse et Marine Le Pen. On n’a pas besoin de tricher de beaucoup, on peut passer par exemple de 12,5% à 14,5% et décider que marine Le Pen à l’inverse passe de 16,5% à 14,5% et on décide ainsi qu’ils sont au coude à coude. Ce genre de traficotage n’est permis que pour les candidats qui sont très riches, ce qui est le cas de Zemmour et de Macron, ça coûte assez cher. Le reste ressort de la prophétie autoréalisatrice comme les électeurs d’extrême-droite sont soumis à un pilonnage incessant des zemmouristes qui s’en vont jusqu’à trafiquer les pages de Wikipédia, amène les plus faibles à douter. On a remarqué que ce sont les électeurs de Zemmour qui sont le plus hésitants, c’est-à-dire qui avouent que leur engagement pourrait être remis en question. Et donc évidemment tout ce qui fait le buzz, les défections perlées, les provocations ou encore la déferlante sur les réseaux sociaux[6] peut évidemment modifier le score. Certainement tous les électeurs ne sont pas sensibles à ces fantaisies, mais une partie oui, surtout à l’extrême droite où Zemmour leur a vendu la fable selon laquelle MLP face à Macron ne peut pas gagner, qu’elle a eu sa chance en 2017, ce qui est peut-être vrai, mais que lui oui, ce qui est complétement faux. Tous les sondages indiquent qu’il recueillerait à peine le tiers des suffrages exprimés dans une confrontation directe avec Macron. L’écart est bien trop important pour qu’on puisse dire que les chiffres sont bidonnés. Comme je l’ai dit plus haut, les redressements ne peuvent se faire qu’à la marge, sans quoi ces entreprises perdraient toute crédibilité. 

 

Tout cela montre combien l’argent joue encore un rôle décisif dans une campagne électorale, même s’il ne fait pas tout[7]. Cela relativise que nous soyons encore en démocratie. Dans cette conjuration des imbéciles, on voit bien l’intérêt de Macron et de son gang, Zemmour est son assurance survie. On voit assez bien aussi l’intérêt de Zemmour qui grâce à cette campagne restera avec des millions d’euros plus ou moins bien cachés. D’autres buts sont plus obscurs, ceux des mégrétistes qui rêvent de tuer MLP depuis des années pour lui piquer sa place, ou des identitaires ou des néo-nazis qui trouvent que cela fait chic de soutenir un juif pour faire avancer leurs idées. Certains éléments commencent à émerger sur ces questions d’argent, très tardivement, les journalistes n’ont pas fait très bien leur boulot. Ils ont préféré s’extasier sur l’intelligence et les capacités oratoires de Zemmour. Cette louche complaisance est d’autant plus curieuse que ces mêmes journalistes se lèvent comme un seul homme pour traquer le « racisme » de partout, et même où il ne se trouve pas. Les écarts de langage de Zemmour auraient traîné jadis n’importe quel Le Pen devant les tribunaux, mais celui-ci malgré quelques petites condamnations échappe largement à l’opprobre. 

 

Les faux journaux du groupe Robert Lafont 

L’argent sert Zemmour à financer des faux journaux à grands frais, ceux du groupe de Robert Lafont. Ce dernier est un spécialiste du copier-coller. Il produit des « journaux » sans journalistes, mais aussi sans quelques individus qui sauraient écrire correctement. Cet escroc utilise des faux titres, comme L’événement ou Globe qui dans le temps ont appartenu à une autre sphère qu’à celle de l’extrême-droite. Mais cette diversité apparente des titres ne sert qu’à masquer l’étroitesse du soutien médiatique à Zemmour. La ligne qui est développée dans ces publications douteuses est qu’au fond Zemmour et MLP étant la même chose, Zemmour pourra agréger à cet ensemble une fraction des Républicains en déshérence et ainsi passer le premier tour puis ne faire qu’un bouchée de Macron dans le débat qui aura lieu entre les deux tours. Mais cette grossière ficelle ne fonctionne pas. Prendre ses électeurs pour des idiots de village, n’est pas une bonne ligne de conduite. Et du reste  plus Zemmour combine, plus il s’enfonce, preuve qu’il est un très mauvais tacticien. Ces faux journaux que Zemmour est le seul a utilisé comme des tracts de campagne, montre les limites d’une parodie de domination sur les médias. Il a beau avoir beaucoup d’argent à sa disposition, ça ne suffit pas à convaincre ni ses soutiens potentiels, ni les électeurs. 

Zemmour au milieu d’un champ, abandonné de tous 

Samedi 19 février 2022, Zemmour avait annoncé un meeting en grande pompe au Mont Saint-Michel parce que ce lieu touristique est aussi le symbole d’une certaine chrétienté. Mais ce fut un vrai fiasco. On attendait 4 000 à 5 000 personnes, ils furent 200 ou 300 au grand maximum. C’est un cas intéressant. Comment est-ce possible ? En effet quand on organise ce genre d’événement on engage normalement une société spécialisée dans l’événementiel et qui va se charger de la logistique, louer le lieu du meeting, embaucher la claque, louer les bus qui l’amèneront sur place. Ce n’est jamais spontané. Et donc si échec il y a eu c’est d’abord parce que la société qui livrait les prestations n’a pas assuré. La société prestataire, payée par le louche Olivier Ubéda qui par ailleurs est l’objet d’une plainte pour viol, a peut-être pensé que sans les payer les gens viendraient tout de même. Et donc elle a décidé de garder une partie au moins de l’argent encaissé, ou alors elle a payé une centaine de désœuvrés et en a facturé un ou deux milliers. Ce ratage évident montre comment les meetings politiques aujourd’hui fonctionnent. Rarement, surtout à droite, avec des arrivées spontanées. On loue des bus, on paye des spectateurs qui ensuite seront encouragés à frapper dans leurs mains au moment adéquat. On avait vu ça en 2017 avec Macron parlant devant des salles à moitié vides, l’autre moitié étant essentiellement peuplée d’une claque rémunérée et mollassonne. Cela explique pourquoi les campagnes coûtent si cher. Il faut soigner l’image d’une foule enthousiaste, d’une dynamique spontanée, ça sera d’un très bel effet à la télévision. Mais c’est juste du cinéma. Au Mont Saint-Michel cela s’est vu comme une évidence, seuls les zemmouristes qui sont habités d’une foi de mahométan, invoqueront le mauvais temps, l’importance de la retransmission par Internet, mais certainement pas la défaillance d’Ubéda et de ses complices. 

Le canard enchainé s’est fait un plaisir de rapporter les propos de Sarkozy, l’ancien président osant dire tout haut ce que bien des Français pensent tout bas !

Depuis que j'ai écrit ce petit texte, la cote de Zemmour a continué de s'effondrer, au point de passer sous les 10% au premier jour d'avril, confirmant la justesse de mes intuitions selon lesquelles il finirait quatrième ou même pire, cinquième de cette course à l'échalote. Il ne suffit pas d'avoir beaucoup d'argent à sa disposition pour réussir. Macron avait bien plus que cela derrière lui, de grands médias "respectables", comme Le monde ou Libération, ou encore L'Obs qui lui donnait un caution de gauche - certes un peu vermoulue - mais suffisamment pour que certains à gauche envisagent comme aujourd'hui de voter pour lui pour faire barrage au fascisme. Zemmour n'a pas cette roue de secours. Mais la saga zemmourienne qui se terminera au soir du premier tour, démontre que contrairement aux idées reçues, s'il faut de l'argent pour se faire élire, cela n'est pas suffisant, loin de là. 


[1] https://ingirumimusnocte2.blogspot.com/2021/11/le-marketing-macronien-de-zemmour.html

[2] https://www.mediapart.fr/journal/france/200122/revelations-sur-les-grands-donateurs-de-la-campagne-d-eric-zemmour

[3] Mendez Julien, Tutin Christian, « De la crise bancaire à la régulation : l'expérience américaine de 1907 », L'Économie politique, 2010/4 (n° 48), p. 42-63.

[4] https://lecourrierdesstrateges.fr/2022/02/02/payant-ces-liens-dargententre-zemmour-et-la-caste-mondialisee-qui-nous-embarrassent/?fbclid=IwAR03VC4Q6CQNBSrX5FZeqO_zsnO79LsgGk4JqWfSmO6ubSSlqoIaE1FVSss

[5] https://www.youtube.com/watch?v=O9UvoB6ho24&fbclid=IwAR2AhY1Y_L_CxKBV-vcko8KBaOMp2_g3WFz9tuXmjgGvP89MYyoVHyldUzE

[6] https://www.nouvelobs.com/election-presidentielle-2022/20220217.OBS54640/samuel-lafont-l-omnipresent-professeur-numerique-d-eric-zemmour.html

[7] Julia Cagé, Le prix de la démocratie, Fayard, 2018.

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