Mikhail Gorbatchev est décédé à l’âge de 91 ans. Les
réactions ont été totalement asymétriques en Occident et en Russie. Pour les
premiers ce « grand homme d’Etat » a permis de faire rentrer la
Russie dans le rang de la mondialisation en démantelant l’URSS et d’avancer
vers une paix mondiale. Pour les seconds, c’est celui qui a livré la patrie à
ses ennemis. Mais quand on regarde avec un peu de recul, on s’aperçoit que ce
fut un marché de dupes et que la principale erreur de Gorbatchev a été de faire
confiance aux Américains. Il faut le redire ici Gorbatchev a confié avant de
mourir que les Américains lui avaient promis de ne pas étendre l’OTAN au-delà
de ce qu’ils contrôlaient déjà dans leur Empire, c’est-à-dire jusqu’à
l’Allemagne réunifiée. Il est important de faire ce rappel parce que dans
l’histoire des relations diplomatiques, les Américains apparaissent comme le
peuple le moins fiable qui soit, un peuple sans honneur et sans parole. Y
avait-il à cette époque une autre voie possible que celle de la
Pérestroïka ? Il est bien difficile de le dire. Ce qui est certain c’est
que cette politique à ouvert la voie à des réformes radicales qui ont été mises
en œuvre directement par les équipes de l’Américain Jeffrey Sachs, réformes qui
provoquèrent l’effondrement du PIB russe de 45%, avec toutes les conséquences
sur la population russe qui a diminué radicalement. Les équipes américaines n’en
étaient pas revenues de rencontrer si peu de résistance à leur plan lugubre d’expérimenter
une économie de marché pure et dure comme jamais il n’en avait existé
auparavant. Cette politique criminelle qui a vu s’allier la canaille de
l’Occident à la crapule de la Russie a été ensuite mise en œuvre et approfondie
par l’ivrogne corrompu Boris Eltsine, une fois que Gorbatchev a été évincé
parce que manifestement il trainait les pieds pour continuer à piller le peuple
de Russie, voire même à démanteler l’URSS dont l’éclatement allait alimenter
des guerres nombreuses et meurtrières.
Le PIB russe a baissé de 45%
consécutivement aux réformes américaines
L’idée qu’on vendait à l’époque était la suivante, quel
qu’en soit le coût humain il fallait passer directement à l’économie de marché,
tout privatiser, arrêter de financer les retraites, etc. Au cœur même du parti
socialiste en France, il y avait plusieurs tendances, ceux qui voulaient suivre
la voie gorbatchevienne d’une transition plus lente – Mitterrand était pour,
notamment parce qu’il voyait d’un mauvais œil la montée en puissance de
l’hégémonie américaine – et ceux qui voulaient assumer la méthode américaine de
la terre brûlée. La première conséquence visible de ce démantèlement a été une
catastrophe démographique, les vieux sont morts par millions. Mais tout cela a
permis la création d’oligarques qui ont pu mettre la main sur les ressources du
pays et devenir milliardaires. Jeffrey Sachs lui-même a été banni de
l’université où il enseignait parce qu’il avait profité de sa position de
réformateur en chef pour s’enrichir et enrichir ses proches et sa famille.
Eltsine avait déménagé des sommes immenses aux Etats-Unis où il comptait
ensuite passer le reste de ses jours. C’est seulement avec l’arrivée de Poutine
au pouvoir que la Russie a commencé à sortir la tête de l’eau. Certes le pays
avait été profondément transformé, il n’était plus question de socialisme, mais
le pays a repris sa marche en avant pour retrouver sa fierté. Du reste la
nostalgie de la puissance russe d’avant la Pérestroïka est tenace, elle est
encore visible dans le soutien massif que les Russes apportent à la guerre en
Ukraine, ou même encore dans le Parti communiste russe qui est aujourd’hui la
principale force d’opposition à Poutine à la Douma, les libéraux façon Zelensky
ou Navalny n’ont pas de réelle existence en dehors de celle que leur permet le
soutien de la CIA.
Catastrophe démographique en
Russie suite à la Perestroïka
Personne en Russie ne pleurera Gorbatchev, mais il nous
semble erroné de tout mettre sur le compte de cet homme d’Etat. Son échec est
d’abord celui d’un peuple très divisé, ou plutôt d’une classe politique qui
tirait dans tous les sens du fait de sa corruption, et bien entendu les
Américains ont joué sur cette division. On a vu, juste avant qu’Eltsine se
lance dans la destruction de l’Etat pour le profit de quelques-uns, Gorbatchev
signer des accords bidons avec le mauvais acteur de série B, Ronald Reagan, qui
se flattait par ailleurs d’avoir mis la Russie à genoux en lançant son
programme ruineux de Guerre des étoiles, programme que les Soviétiques ne
pouvaient pas suivre. Mais cette humiliation n’avait pourtant rien à voir avec
la réalité. Le système soviétique était à bout de course depuis des années, et
beaucoup avaient anticipé son effondrement, même si on n’y avait pas mis de
date. Le problème de la classe politique soviétique et donc de Gorbatchev a été
de ne pas avoir su proposer une solution alternative à celle proposée par les
Américains. Il n’a par ailleurs rien dit de la guerre en Ukraine, se contentant
de dire que l’OTAN et les Américains lui avaient promis verbalement de ne pas
« aboyer aux portes de la Russie » comme le dit si joliment la Pape
François. Naïveté ou lassitude face à une situation catastrophique dont il
avait hérité, il va de soi que Gorbatchev a fait une erreur majeure,
sous-estimant la rancœur des Etats-Unis qui visaient de mettre au pas la Russie
comme ils l’ont fait avec l’Ukraine en propulsant les nazis sur le devant de la
scène – souvenez-vous de ce chiffre, un tiers des terres agricoles ukrainiennes
sont la propriété de multinationales américaines, ce qui veut dire que si
l’Ukraine rejoignait l’Union européenne, ces multinationales américaines se
trouveraient arrosées par les subventions de la PAC, payées par les impôts des
européens !
Gorbatchev et Reagan signent le
traité sur les armes nucléaires à portée intermédiaire
Poutine a présenté ses condoléances à la famille de
Gorbatchev d’une manière sobre comme on dit. Cela résume sans doute le
sentiment profond de la majeure partie de la population russe. Présenté en
Occident comme un homme de paix parce qu’il a signé le traité de désarmement de
l’URSS, il a obtenu le prix Nobel de la paix, un prix éminemment politique qui
a systématiquement soutenu dans ses attributions une politique antisoviétique,
notamment en le donnant à des dissidents comme Sakharov. Gorbatchev avait un
autre défaut, il aimait les honneurs et se faire photographier avec les
dirigeants occidentaux, comme s’il avait quelque influence sur eux. Ça le
flattait, mais ça n’empêchait pas les Russes de souffrir profondément de la
Pérestroïka et de ses suites. Les Russes l’amalgament souvent à tort au très
corrompu Eltsine. Ayant été le dernier dirigeant de l’URSS avant sa
dissolution, il n’aura rien maitrisé du tout, pour des raisons très
compliquées, il aura subi les événements d’humiliation en humiliation et ne
laissera que très peu de traces dans l’histoire de son pays. Aucune honte ne
lui aura été épargnée, en 1997, on le vit vendre son image pour quatre sous à
Pizza Hunt qui se servit de lui pour son petit commerce. Peut-être est-ce cette
image qui en dit le plus long sur l’incompétence de Gorbatchev. C’était déjà
une fin misérable avant son propre décès qui allait intervenir un quart de
siècle après. On pourra toujours opposer cette image à celle de McDonald
champion de la bouffe pourrie à l’américaine, abandonnant le territoire russe,
comme chassé par Poutine. Un sondage récent avançait que seuls 7% des Russes avaient du respect pour Gorbatchev, ça correspond en somme à ceux qui sont tentés par le libéralisme à la manière américaine ou européiste.
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L'unanimisme suspect de la presse internationale pour l'homme qui a ouvert la porte au capitalisme sauvage en Russie doit interpeler toutes les cervelles bien faites. La gauche l'appelait Gorby ou Gorbi dans un élan de familiarité qui au fond indique bien de quel piédestal le dirigeant d'un pays jadis puissant était tombé. la plupart des journaux occidentaux s'étonnent que les Russes lui gardent une rancune tenace. Mais la décomposition de l'Empire soviétique s'est faite dans le sang et les larmes, c'est un devoir de mémoire que de le rappeler.
L’armée
ukraino-atlantiste a bombardé le centre commercial « Galaktica » à
Donetsk
De nombreux éléments montrent que l’OTAN avec ses supplétifs
ukrainiens mène une sale guerre en Ukraine, avec pour but de la faire durer le
plus longtemps possible. Les Etats-Unis de plus en plus impliqués dans la
guerre en tant que cobelligérants viennent de voter une nouvelle tranche de
livraison d’armes de près de près de 3 milliards de dollars[1].
Ils en sont à plus de 10 milliards de dollars depuis le début de la guerre. A
cela il faut ajouter ce que les européens donnent à Kiev. Malgré les
rodomontades de Josep Borrell le furieux va-t-en-guerre, plusieurs pays
trainent les pieds et préfèrent annoncer une aide pour plus tard que de livrer
directement des armes. Les Espagnols qui n’ont pas admis que l’oncle Sam leur
force la main a hésité longtemps avant de se soumettre au diktat. Les Français
aussi trainent les pieds et malgré les propos flamboyants de Macron, ils n’ont
pas livré beaucoup de canons Caesar – une des raisons étant que cette livraison
consiste à déshabiller Pierre pour habiller Paul et risque de rendre l’armée
français plus vulnérable. Les derniers 3 milliards de dollars d’aide militaire
américaine ont été pris sur les fonds spéciaux du Pentagone – c’est là que se
fabrique la guerre en Ukraine, et non pas à la Maison Blanche ou à Kiev – et bien
sûr ces fonds risquent de manquer plus tard si les Etats-Unis veulent en
découdre avec la Chine. Malgré les dizaines de milliards de dollars qui ont
abondé en Ukraine pour les armes et pour le soutien à l’économie, l’armée
ukrainienne ne tient pas le choc. Non seulement les canons américains ne sont
pas manipulés par des soldats ukrainiens, mais par des américains,
officiellement démobilisés de l’armée américaine, mais la stratégie et la
tactique ruineuse de l’armée ukrainienne est définie par les conseillers
américains en poste dans le gouvernement de Kiev. Ce qui accroit les tensions
car une partie de l’Etat major conteste cette stratégie ruineuse qui augmente
le nombre de victimes inutiles. Ces tensions ont entraîné des purges, on y
reviendra.
Livraison d’armes américaine
à l’Ukraine
Le monde, anciennement journal de la droite
mondialiste, mais un peu sérieux dans la couverture de l’événement, met très
souvent en avant les victimes civiles que font les frappes russes sur
l’Ukraine. Mais ils ne parlent guère, ou seulement sous la forme d’un
entrefilet relégué à l’arrière des publications sur le sujet des bombardements
volontairement terroristes de la coalition ukraino-otaniste sur des cibles
civiles. De la même manière ils ne parlent pas des frappes ukrainiennes au-delà
de la frontière russo-ukrainienne sur des villes et des villages russes qui ne
sauraient être confondus avec des cibles militaires. C’est que l’ensemble des
médias occidentaux est convaincu qu’ils œuvrent pour le bien en soutenant cette
guerre ruineuse, et donc ils ne veulent pas détruire le narratif qui va avec.
Ils relaient avec plaisir les mensonges éhontés de Zelensky. Par exemple Le
monde, parangon furieux du journal mondialiste militant, a fait pendant
plusieurs jours semblant de croire que les Ukrainiens et les Russes se
renvoyaient la balle en ce qui concerne les bombardements sur la centrale
nucléaire de Zaporijia[2].
BFMTV a repris sans recul les mensonges zelenskiens, endossant l’idée stupide
des tirs russes sur la centrale nucléaire. Sans doute les journalistes
pensaient que le mensonge passerait aux yeux de l’opinion, la plupart des Occidentaux
n’ayant pas le temps de s’attarder à décrypter l’information. C’est ainsi que
l’opinion publique se travaille en Occident. Or il était évident pour n’importe
quel esprit normalement constitué que les Russes qui se trouvent dans la
centrale nucléaire qu’ils occupent depuis des mois, n’allaient pas se bombarder
eux-mêmes, même si on considère comme le font la plupart des commentateurs
occidentaux que les Russes sont une race un peu à part et donc qu’ils sont un
peu plus timbrés que la moyenne des humains qui peuplent cette malheureuse
planète. Les choses se sont calmées du point de vue de la médiatisation des
risques d’une explosion nucléaire, quand Poutine a invité l’International
Atomic Energy Agency à se rendre sur place. Zelensky a fait alors machine-arrière
et a reconnu, dans un communiqué embrouillé, que c’était bien son armée qui
bombardait la centrale nucléaire, le secrétaire général de l’ONU dénonçant à
demi-mot les mensonges ukrainiens[3].
Ces mensonges n’ont pas été relevés par les médias occidentaux, ni le vertueux Monde,
ni BFMTV bien entendu.
BFMTV reprenant sans filtre
les mensonges zelenskiens
Les mensonges font partie intégrante de la guerre américaine
contre la Russie, guerre qui se mène par Ukrainiens interposés. Et à tout prendre
il y a moins de mensonges dans les médias russes actuellement que dans les
médias occidentaux. On aime bien aux Etats-Unis ou en France raconter qu’on se
bat pour la démocratie et la liberté. Mais ce bobard est contredit par la
censure inadmissible, en France RT et Sputnik ont été interdits, alors que ces
médias qui certes rompaient avec l’unanimisme de commande, maintenaient
pourtant un véritable pluralisme. Les bases légales d’une telle censure ne sont
pas très claires et violent le fameux Etat de droit dont on nous rabat les
oreilles. Mais le pire est la dictature maintenant à l’œuvre à Kiev. Zelensky
suivant les conseils de ses patrons a interdit 11 partis, soit toute
opposition, et également 5 chaînes de télévision. En même temps il procède, sur
les conseils amicaux des experts américains, à des purges périodiques aussi
bien dans l’armée où la stratégie otanienne est contestée que dans le SBU,
service de sécurité intérieure qui est comptable depuis 2014 de dizaines
d’arrestations arbitraires et de meurtres au cœur de l’opposition, et où les
purges paraissent quotidiennes, soit sous la forme de destitution, de
démission, voire d’élimination physique. Malgré la main de fer qui s’est
abattue en Ukraine pour conserver un unanimisme de façade, même Le monde s’est
rendu compte que la démarche de l’OTAN, relayée par Zelensky, était de plus en
plus contestée[4]. Une des
raisons à cela est que la majorité des Ukrainiens s’ils sont anti-russes,
veulent se débarrasser de la Crimée et du Donbass. Or Zelensky avance bêtement
qu’il n’y aura pas de négociation avec la Russie tant que les armées russes ne
se seront pas retirées de la Crimée et du Donbass[5] !
Bombardements
ukraino-atlantistes sur Zaporijia
On fera remarquer que la position zelenskienne n’est pas très
fiable et qu’à la fin du mois de février 2022, il se disait prêt à négocier
avec les Russes, sur le Donbass et la Crimée, sans préalable[6].
Mais si ce garçon n’est guère crédible dans ses positions, changeant
constamment de posture, évoluant d’une position ouverte sur une paix
raisonnable avec la Russie, vers une rhétorique de plus en plus guerrière,
c’est uniquement parce qu’il ne décide de rien et qu’il ne fait qu’appliquer
les consignes de Washington. L’OTAN croit que les capacités d’acteur de Zelensky
et leur diffusion dans les médias qui la soutiennent, seront suffisantes pour
couvrir les mensonges et les exactions de l’armée ukraino-atlantiste. Le
monde a fait semblant de découvrir les frappes criminelles de l’armée
ukrainienne sur un supermarché de Donetsk[7].
Cela fait pourtant plusieurs semaines que les frappes ukraino-atlantistes
atteignent des zones résidentielles où il n’y a aucun objectif militaire, le
but est de terroriser les populations du Donbass qui sont rétives à revenir dans
le giron de Kiev qui ne rêve que de leur faire payer leur rébellion. A Donetsk,
ce sont les bâtiments administratifs qui étaient d’abord visés, mais ne comptez
pas sur le journal Le monde pour vous renseignez sur les morts que ces
frappes ont faites, les morts russes ou russophones n’intéressent pas le
journal du soir. Les frappes sur Donetsk le 23 août 2022 ont fait 3 morts et 14
blessés, tous des civils[8].
Ces frappes sont le résultat de l’utilisation des canons à longue portée
fournis par les Etats-Unis et probablement manipulés par des experts
étatsuniens. Elles se répètent depuis plusieurs semaines, et s’étendent
maintenant à la Crimée, visant soi-disant des entrepôts d’armes russes. L’excuse
d’une erreur de trajectoire est le plus souvent invoqué quand le crime n’est
pas nié.
Bombardements
ukraino-atlantistes sur Donetsk
Il est commun en Occident de dénoncer les crimes de guerre
de l’armée russe, comme si les Ukrainiens étaient à l’abri de cette dérive. Il
faut défendre par tous les moyens l’idée selon laquelle l’OTAN mène un juste
combat. Mais les preuves de crimes de guerre de la part des nazis de l’armée
ukrainienne sont devenues très nombreuses. C’est d’ailleurs pour cette raison
que Zelensky a tenté une manœuvre pour éviter un procès public et qui serait
diffusé dans le monde entier sur les crimes de guerre des soldats qui s’étaient
enfermés dans l’usine de Marioupol[9].
Toujours dans l’outrance il a menacé de ne plus jamais négocier si ce procès
avait lieu, mais il n’aura échappé à personne que non seulement de négociations
il n’y en a pas, mais qu’en outre Zelensky avait affirmé qu’il ne négocierait
pas tant qu’un soldat russe serait encore sur le terrain. Plusieurs attentats
terroristes ont été répertoriés qui semblent émaner de Kiev ou de l’OTAN, voire
de la CIA, le plus spectaculaire et qui a fait couler le plus d’encre est bien
sûr celui qui a conduit à la mort de Daria Douguine. Les médias français qui
ont versé peu de larmes sur la mort de cette jeune femme, ont largement repris
l’idée que son père était fautif puisqu’il était ultra-nationaliste, alors même
que cet homme, quoiqu’on en pense n'a strictement aucune responsabilité
militaire dans le conflit qui se déroule. Qu’on soit d’accord ou non avec les
idées de Douguine et de sa fille, rien ne peut justifier un attentat
terroriste. Les journaux français, Le monde en tête, croient minimiser
cet acte de terrorisme en tartinant sur les liens supposés de la familles
Douguine avec l’extrême droite française. Ceux-là feraient mieux de regarder de
près les compromissions de Kiev avec les néo-nazis ukrainiens. Je ne vais pas
revenir sur cette ignominie. J’ajouterais seulement qu’Ilya Ponomarev, russe en
exil au parcours politique des plus sinueux, cochant à peu près toute les cases
du mondialisme échevelé après avoir été membre du parti communiste russe, a
créé une diversion. Aujourd’hui il vit à Kiev et a avancé que l’attentat avait
été revendiqué par une mystérieuse Armée Républicaine Nationale[10]
dont il serait le seul à être en contact, prétendant que cette armée montait en
puissance, devenait très populaire en Russie et allait porter la guerre sur le
sol russe. Les médias occidentaux ont repris le leurre pour appuyer le fait que
ni l’OTAN, ni les services secrets ukrainiens ne seraient impliqués dans ce
crime. Dédouanant à partir de discours alambiqués l’implication de Natalia
Vovk, ukrainienne membre du régiment Azov. Certes il est encore trop tôt pour
affirmer que Vovk est bien impliquée dans ce meurtre, mais l’implication d’une
armée fantôme semble encore bien plus cousue de fil blanc. L’idée est de faire
croire qu’il y a une opposition tellement forte à la guerre en Russie que cela
a entraîné quasiment une guerre civile. La plus forte probabilité est que cette
diversion tente de justifier par anticipation d’autres attentats terroristes à
Moscou ou ailleurs, loin des lignes de front. On n'y a pas fait attention, mais quand le Pape François a déploré la mort de Daria Douguine, les autorités de Kiev ont protesté, avouant ainsi indirectement qu'elles étaient bien à l'origine de cette attentat crasseux.
Natalia Vovk
Mais toutes les informations convergent, il y a encore ce
fameux rapport d’Amnesty International dénonçant à mots couverts les crimes de
guerre ukrainiens[11].
Ce rapport a fait hurler les soutiens de Zelensky qui ont demandé et obtenu des
excuses, bien qu’Amnesty International ait maintenu l’intégralité de ses
conclusions. Le rapport avançait, ce qu’on sait depuis un bon moment, que
l’armée ukrainienne se servait de boucliers humains, comme peuvent le faire par
exemple le Hamas dans les Territoires Palestiniens. La raison est assez simple,
c’est que les Russes ont l’ordre de faire le moins de dégâts humains possibles,
aussi bien parmi les populations civiles que dans leurs propres rangs. Sachant
cela la tactique otanienne a consisté à ralentir la progression russe en
dissimulant des armements de guerre parmi les populations civiles. Quand on
additionne tous ces faits criminels, notamment le terrorisme qui se développe
depuis au moins le printemps, on se rend compte que cela dévoile une stratégie
qui est en droite ligne avec les actions du nazi Bandera pendant la Seconde
Guerre mondiale. Elle intervient parce que l’armée ukrainienne n’a plus d’autre
choix, étant battue sur le terrain, même si elle résiste et résistera sans
doute encore longtemps, elle en vient à reprendre les vieilles techniques
nazies de la terre brûlée en multipliant les crimes de guerre et en évitant
l’affrontement direct dans le moment où leur armée était en déroute.
Zaporojie le 24 aout 2022
A Zaporojie les habitants ont déployé un drapeau russe de
plusieurs centaines de mètres le jour de la fête d’indépendance. Les foules ont
fait la fête dans la joie et la bonne humeur, saluant plutôt une libération
qu’une occupation. Cela n’empêche toujours pas les médias français de parler
d’occupation, alors que tous les films qui nous parviennent, montrent des
scènes de liesse à l’arrivée des troupes russes. Certes on peut raconter que
ces scènes sont le fait d’une minorité pro-russe, mais à Zaporojie il est
difficile de croire que les milliers de personnes qui se sont massées ce jour-là
n’était qu’une minorité ou incités à le faire sous la pression des militaires
russes. Cela nous est confirmé par le fait que Zelensky et sa clique refusent
par avance toute idée de référendum d’autonomie dans le Donbass et récusent
même les résultats du référendum de 2014 en Crimée, alors que le droit des
peuples à disposer d’eux-mêmes est considéré par l’ONU comme la pierre
angulaire de la démocratie : Ce principe est consacré d'une manière
expresse dans la Charte des Nations Unies. L'article premier stipule que
l'un des buts de l'O.N.U. est de « développer entre les nations des
relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits
des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, et de prendre toutes
autres mesures propres à consolider la paix dans le monde ».
Ce principe est universel, il doit s’appliquer aux
populations du Donbass et de la Crimée, comme aux populations de Taïwan, comme
aux Arméniens du Haut Karabakh, ou même encore aux Catalans. Il ne se divise
pas. Ceux qui le bafouent ne peuvent pas parler au nom de la démocratie ou de
la liberté. Les Américains et l’OTAN prétendent le défendre vis-à-vis de la
Chine ne défendant Taïwan, mais ce ne sont que des hypocrisies, s’ils croyaient
à ce principe ils le défendraient en Ukraine. La vérité est que l’Empire
américain étant en difficulté, en crise de légitimité et de leadership, il
pratique ce principe à géométrie variable avec le but avoué d’affaiblir ses
concurrents, la Chine et la Russie bien sûr, mais aussi l’Europe dans son
ensemble.
Les Occidentaux, du moins leurs dirigeants, ont décidé,
selon Macron, de soutenir la guerre en Ukraine dans la durée[12].
Mais cette cobelligérance va rapidement poser un problème, au-delà de ce que ça
coutera, parce qu’il n’est pas certain que dans la situation catastrophique de
l’Europe le peuple voire même ses représentants suivent dans cette aventure
belliqueuse. C’est vrai pour la France, mais c’est vrai aussi pour l’Allemagne,
l’Italie et quelques autres pays comme la Hongrie et l’Autriche. Les Allemands
sont en train de devoir faire face à la plus grande crise économique depuis
longtemps, l’inflation explose, et leur économie dépendante du gaz russe ne
tourne plus très bien. Vont-ils mourir pour l’OTAN ? On a beaucoup discuté
des effets de la guerre en Ukraine sur l’effondrement de l’euro par rapport au
dollar et par rapport au rouble. Mais ce n’était pas une obligation pour
l’Union européenne de se lancer dans cette aventure à coups de sanctions et
d’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne et de la Finlande et de la
Suède dans l’OTAN. La soumission au diktat américain coûte cher, alors que
l’ineffable Bruno Le Maire parlait il n’y a guère de mettre l’économie russe à
genoux !
Daria
Douguine est morte, lâchement assassinée à l’âge de trente ans dans un attentat
terroriste qui a eu lieu à Moscou, son père était semble-t-il visé. Parmi les
personnes qui soutiennent la démocratie façon OTAN et Zelensky en Ukraine,
personne ne s’est levé pour condamner cet acte barbare qui donne une vision
particulièrement dégradée de la guerre de voyous que mènent les forces
ukraino-atlantistes. Plus encore les soutiens français de Zelensky semblaient
même trouver normal que cette jeune femme soit assassinée, puisque son père est
présenté comme un « idéologue ». Elle a été tuée donc par la faute de
l’existence de son père ! « Idéologue »’est le mot qu’emploie Le monde pour parler du père. Ils
auraient pu dire qu’Alexandre Douguine était un politologue, ou un homme
politique, ou un philosophe, mais les plumitifs du Monde emploient le
terme d’idéologue pour tenter de dévaloriser l’engagement du père. Le père et la
fille n’étaient pas comme le disent les médias occidentaux des ultra-nationalistes
– formule qui ne veut rien dire, puisqu’on est ou non nationaliste, comme une
porte doit être ouverte ou fermée, il ne peut y avoir de porte ultra-fermée – ils
développaient l’idée que la mondialisation avait échoué, et donc qu’un monde
multipolaire devait émerger de cet échec, ils appelaient à la formation d’un
bloc « eurasiste ». Dans cet interview, publiée d’abord sur le site
Breizh-info.com, on n’est pas obligé de se trouver en accord sur l’ensemble des
idées qu’elle développe, notamment vis à vis de la religion, mais c’est une pensée qui existe et qui se trouve en
rupture avec le globalisme, ce que nous approuvons. Ce n’est pas seulement une
opinion que de constater la fin du globalisme, c’est d’abord un fait.[1]
Le conflit en Ukraine n’est toujours pas terminé. En
Occident, nous sommes bombardés d’informations en faveur de l’Ukraine et des
Ukrainiens. Nous oublions que les Russes aussi ont leur point de vue. C’est à
cet effet que nous avons interrogé Daria Douguine, fille d’Alexandre Douguine,
au sujet de la situation. Un entretien passionnant.
Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs
? N’est-il pas difficile pour vous parfois de porter le nom de Douguine, et
donc d’être forcément assimilée à votre papa ?
Daria Douguine : Je suis diplômée de la faculté de
philosophie de l’université d’État de Moscou, avec un diplôme en histoire de la
philosophie. Mes recherches portaient principalement sur la philosophie
politique du néoplatonisme tardif, un sujet d’un intérêt sans fin. La
principale ligne de pensée de la philosophie politique des néoplatoniciens
tardifs est le développement de l’idée d’une homologie de l’âme et de l’État et
de l’existence d’un ordre triple similaire dans les deux. De même qu’il y a
trois bases dans l’âme, de même dans l’État (et les platoniciens décrivent le
modèle indo-européen, plus tard parfaitement théorisé dans les travaux de
Dumezil) il y a aussi trois domaines – ce modèle se manifeste dans l’Antiquité
et au Moyen Âge. La compréhension existentielle et psychique de la politique
est en fait perdue à bien des égards aujourd’hui, nous sommes habitués à voir
la politique uniquement comme une technique, mais le platonisme révèle un lien
profond entre les processus politiques et psychiques. Il est urgent aujourd’hui
de rétablir une telle vision complète des processus politiques, c’est-à-dire
d’examiner la « politique existentielle ».
Je suis honorée d’être dans le même bateau que mon père (sur
le même navire existentiel), étant la fille d’un grand chercheur de la
Tradition, auteur de l’ouvrage en 24 volumes Noomachia (« guerres de l’esprit »
– analyse à travers les trois logos de toutes les cultures du monde). Le fait
d’être sous le coup de sanctions de la part des États-Unis, du Canada, de
l’Australie et du Royaume-Uni est aussi un symbole que nous, les Douguine,
sommes sur le chemin de la vérité dans le combat contre le globalisme. Par
conséquent, je dirais que c’est un honneur d’être né dans une telle famille.
Breizh-info.com : Parlez-nous de votre travail
actuellement ?
Daria Douguine : Je suis une observatrice politique
du Mouvement international eurasiste et un expert en relations internationales.
Mon domaine d’activité est l’analyse de la politique européenne ainsi que la
géopolitique. À ce titre, j’apparais sur des chaînes de télévision russes,
pakistanaises, turques, chinoises et indiennes, présentant une vision mondiale
multipolaire des processus politiques. Mes centres d’intérêt sont à la fois
l’espace de civilisation européen et le Moyen-Orient, où une sorte de
révolution conservatrice est en train de s’amorcer – de la confrontation
constante de l’Iran avec l’hégémonie américaine ou de la lutte de la Syrie
contre l’impérialisme occidental à la Turquie, qui montre aujourd’hui des
tendances intéressantes d’éloignement de l’OTAN et du bloc géopolitique
anglo-saxon et tente de construire sa politique étrangère sur une base
multipolaire, en engageant un dialogue avec la civilisation eurasienne. Je
pense qu’il est important de suivre les processus de la région du Moyen-Orient,
c’est l’une des scènes de la lutte contre l’impérialisme. D’un autre côté, je
m’intéresse aussi beaucoup aux pays africains ; ils représentent « L’Autre »
pour l’Europe et la Russie, à partir de l’analyse duquel on peut mieux
comprendre sa propre civilisation. L’Afrique a toujours été un élément de rêve
pour les Européens comme pour les Russes – souvenez-vous du Voyage en Abyssinie
et au Harrar d’Arthur Rimbaud, ou du poète russe Nikolaï Goumilev qui s’est
inspiré de Rimbaud (« Journal Africain ») et une série de poèmes sur l’Afrique,
dans lequel il révèle en fait l’Afrique comme une civilisation inexplorée,
pleine de sens, que le colonialisme occidental a cruellement tenté de défaire
et de détruire. Aujourd’hui, des bouleversements tectoniques se produisent sur
le continent africain et la confrontation des civilisations : occidentale et
authentiquement africaine (si différente et si unique) est extrêmement
intéressante.
Pour moi, un sujet particulièrement important est le
développement de la théorie d’un monde multipolaire. Il est clair que le moment
mondialiste est terminé[2],
la fin du libéralisme est arrivée, la fin de l’histoire libérale. En même
temps, il est extrêmement important de comprendre qu’une nouvelle étape pleine
de défis, de provocations et de complexités a commencé. Le processus de
création de la multipolarité, de structuration des blocs civilisationnels et
d’établissement d’un dialogue entre eux est la tâche principale de tous les
intellectuels aujourd’hui. Samuel Huntington, dans une vision réaliste des
relations internationales, a mis en garde à juste titre contre les risques d’un
choc des civilisations. Fabio Petito, spécialiste des relations
internationales, a souligné que la construction d’un « dialogue des
civilisations » est la tâche centrale et « la seule façon d’avancer ». Ainsi,
pour consolider le monde multipolaire, les zones frontalières (intermédiaires)
entre les civilisations doivent être traitées avec soin. Tous les conflits se
déroulent aux frontières (zones intermédiaires) des civilisations, là où les
attitudes s’affrontent. Il est donc primordial de développer un état d’esprit «
frontalier » (intermédiaires) si l’on veut que le monde multipolaire fonctionne
pleinement et passe du « choc » au « dialogue » des civilisations. Sans cela,
il y a un risque de « choc ».
Massacre de la place Maïdan
organisé par les équipes de Victoria Nuland et les nazis ukrainiens
Breizh-info.com : Quel regard portez-vous sur la guerre en
Ukraine ? Et sur les réactions en Occident et dans le monde ?
Daria Douguine : La situation en Ukraine est
précisément un exemple de choc des civilisations ; elle peut être considérée
comme un choc des civilisations mondialiste et eurasienne. Après la « grande
catastrophe géopolitique » (comme le président russe a appelé l’effondrement de
l’URSS), les territoires du pays autrefois uni sont devenus des « frontières »
(zones intermédiaires) – ces espaces auxquels l’attention des voisins s’est
accrue, l’OTAN et surtout les États-Unis étant intéressés à déstabiliser la
situation aux frontières de la Russie. Dans les années 1990, un travail
cohérent a été initié avec les cadres des nouveaux gouvernements des nouveaux
États – l’Ukraine ne fait pas exception. Les événements de 2014 en Ukraine, le
Maïdan, soutenus avec tant de ferveur à la fois par Nuland et le fameux
Bernard-Henri Levy soldat de l’ultra-mondialisation[3],
ont été un tournant, en fait ils ont ouvert la porte à l’établissement d’un
dictat mondialiste direct sur l’Ukraine. De plus, les éléments libéraux et
nationalistes, qui étaient plus ou moins neutres avant 2014, ont rejoint un
front uni avec un agenda mondialiste et pro-américain. Pendant 8 ans en
Ukraine, la russophobie a été cultivée par divers programmes et l’histoire a
été réécrite, jusqu’au massacre physique des Russes : ces mêmes 8 années
terribles pour le Donbass avec des bombardements quotidiens. Le public français
peut l’entendre la documentaliste Anne Laure Bonnel, témoin de ces 8 années à
Donetsk, qui n’a pas peur de dire la vérité dans ses films et ses interviews.
Le soutien unanime de l’Occident à l’Ukraine en 2022, la
fourniture d’armes à une échelle impensable – tout cela ressemble à une agonie.
L’agonie d’un régime mondialiste qui commence à perdre du terrain face à la
multipolarité. Pour moi, la douleur la plus importante est que l’Europe a
succombé à l’influence de la propagande mondialiste et qu’au lieu de rester
neutre, elle a pris le parti de la guerre. À bien des égards, c’était
certainement le plan des États-Unis, qui avaient si systématiquement et
continuellement provoqué tout le conflit en injectant des armes en Ukraine.
Rien que des États-Unis (selon Transparency International), plus de 658
millions de dollars ont été investis dans l’aide à l’Ukraine entre 2014 et
2017.
En vert les pays approuvant
les sanctions occidentales contre la Russie
Dans le même temps, on constate que les pays d’Amérique
latine, du Moyen-Orient, la Chine et l’Inde n’ont pas adopté une position
mondialiste. Le dirigeant vénézuélien Nicolas Maduro a déclaré que son pays adhérait
« fermement » à la position de la Russie. À Cuba, des personnes ont été vues
portant des drapeaux russes et des symboles Z lors d’une manifestation le 1er
mai, rappelle la chaîne allemand ZDF. L’Argentine a accusé l’Occident d’avoir
les doubles standards. La vice-présidente du pays, Cristina Kirchner, a déclaré
que le pays était en conflit avec Londres au sujet des îles Malouines. Au
Brésil, le candidat à la présidence Lula da Silva a déclaré à son tour que le
dirigeant ukrainien Volodymyr Zelensky était responsable de ce qui se passait
dans son pays. La Chine s’est prononcée contre l’expansion de l’OTAN et les
provocations des États-Unis. L’Inde a tenté de maintenir sa neutralité
stratégique (dans les années 1990, l’Inde elle-même a été la cible de sanctions
américaines et occidentales très douloureuses pour avoir refusé d’adhérer au
traité d’interdiction complète des essais nucléaires. Le pays, que l’Occident
cherche à couper de son oxygène et à priver de haute technologie, a alors tenu
bon (en grande partie grâce à la coopération avec la Russie, qui ne s’est pas
associée aux sanctions et a prôné leur abolition). Un certain nombre de pays du
Moyen-Orient ont soutenu l’opération militaire spéciale de la Russie (la Syrie,
alliée de longue date de la Russie, connaît mieux que quiconque la bataille
contre le mondialisme), des appels au retrait de l’OTAN se font de plus en plus
entendre en Turquie, et le président a refusé d’approuver l’admission de la
Suède et de la Finlande dans l’OTAN. De nombreux pays d’Afrique, notamment ceux
où le sentiment antiglobaliste est fort, n’ont pas soutenu les critiques
occidentales à l’égard de la Russie (Mali, Soudan, RCA, Zimbabwe, République du
Congo, Érythrée). Ces réactions indiquent la fin du mythe d’un « espace
mondial unique ». L’opération militaire spéciale de la Russie en Ukraine a
accéléré la formation d’un monde multipolaire et catalysé de nombreux processus
géopolitiques.
Breizh-info.com : Ne pensez-vous pas que la Russie soit en
train de s’isoler ? Quelles seront les conséquences selon vous de tout cela ?
Daria Douguine : Je pense que c’est l’inverse. La
Russie trouve de nouveaux partenaires et les processus de souveraineté (par
exemple, la dédollarisation économique) commencent à s’accélérer. La Russie tente
d’être « punie » par les pays occidentaux au moyen de sanctions, mais l’effet
sur l’économie russe n’est pas très sensible (« Les sanctions internationales à
l’encontre de la Russie ne semblent pas impacter la vie quotidienne des
Moscovites », mentionne un journaliste dans un reportage de BFM TV). La
politique de sanctions de l’Occident a été un catalyseur pour la recherche de
nouveaux partenaires et la désoccidentalisation de notre pays. Dans le même
temps, ces sanctions ont frappé douloureusement les pays européens, devenant
une sorte de « hara-kiri » pour de nombreuses économies européennes. C’est une
nouvelle très inquiétante, mais apparemment cela faisait aussi partie du
complot américain visant à déstabiliser le continent européen. Le Premier ministre
hongrois Viktor Orban a déclaré que Budapest ne soutenait pas l’imposition de
sanctions irréfléchies contre la Russie. « Les sanctions contre la Russie sont
comme une bombe atomique, cela pourrait nous conduire non seulement à ne pas
pouvoir nourrir notre population mais aussi à recevoir une masse de migrants à
la frontière », a déclaré le Premier ministre hongrois.
Les nouveaux blocs émergent. « Les pays en développement,
notamment la Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Brésil et d’autres pays qui ont refusé
de prendre parti à la suite des sanctions occidentales contre la Russie,
devraient envisager des moyens de renforcer leur coordination économique pour
résister aux chocs ultérieurs provoqués par l’Occident. Il est important de
noter que les pays en développement doivent chercher une solution par le biais
de la coopération financière et commerciale », a écrit un journaliste du Global
Times de Chine. Ce sont des processus géopolitiques très intéressants. La
Russie n’a donc pas été victime de l’isolement, elle a été le pionnier d’un
ordre mondial multipolaire.
Des voitures ornées de
drapeaux russes se dirigeant vers la grande place de Torzhok pour un
rassemblement de soutien aux opérations militaires de la Russie en Ukraine
Breizh-info.com : Comment la population russe
réagit-t-elle à cette guerre, qui visiblement, a déjà fait beaucoup de pertes
côté russe ?
Daria Douguine : Toute opération militaire entraîne
toujours des pertes. Il convient de noter que les chiffres fournis par les
sources ukrainiennes (et ce sont eux qui sont diffusés dans les médias
occidentaux) ne sont pas corrects et doivent être vérifiés. Nous sommes
confrontés à une situation de guerre de l’information dans laquelle tout, des
rapports militaires aux chiffres, est politisé. Dans le domaine des médias en
Occident, il n’existe malheureusement pratiquement aucune vision alternative
des événements. L’Ofpra a réalisé en 2016 un dossier sur « Pravy Sektor »
(« Secteur droit »), groupe ultras ukranien : Pravy Sektor fait
l’objet d’allégations d’antisémitisme et de xénophobie, de manifestations
homophobes, de détentions illégales et autres abus de pouvoir. Il a créé une
milice armée, le Corps des volontaires ukrainiens, engagée dans le conflit avec
les séparatistes pro-russes du Donbass. Des tensions opposent le Corps des
volontaires ukrainiens aux autorités jusqu’à son intégration difficile au sein
des forces armées régulières ». En 2022, ceux qui étaient considérés avec
suspicion en 2016, deviennent des héros, les épouses des combattants de d’Azov
(un groupe responsable des assassinats cruels des russes au Donbass)
rencontrent le pape a Vatican. Il est très étrange de constater que quelque
chose qui semblait interdit il y a seulement deux ans est devenu courant en
Europe. Ou la réunion de BHL avec l’ancien chef du bataillon rusophobe et
xenophobe radical Aydar (une organisation terroriste interdite en Russie)
Marchenko. Aujourd’hui, le libéralisme va de pair avec la xénophobie et le
nazisme. C’est un paradoxe. Mais cela peut s’expliquer si l’on comprend la « nature
totalitaire » du libéralisme moderne[4].
Il s’agit du sujet de la manipulation des informations et des chiffres.
Quant à la réaction des Russes, la majorité écrasante
soutient l’opération militaire spéciale. À leurs yeux, il s’agit d’une défense
compréhensible des intérêts géopolitiques de la Russie et d’une lutte contre la
russophobie, car un régime s’est formé à Kiev qui dénie aux Russes le droit à
l’autodétermination (langue, culture, identité) et à l’existence. Certains
éléments de la société ont immédiatement quitté le pays après le déclenchement
des hostilités – ils sont partis aux États-Unis, en Europe et en Israël. Fait
révélateur, Anatoly Chubais, ancien chef de l’administration présidentielle
russe et l’un des idéologues et dirigeants des réformes économiques en Russie
dans les années 1990 a quitté le pays. Dans les années 1990, le Front
patriotique l’a qualifié de « traître » et de responsable des difficultés
économiques de la Russie. C’est symbolique. Il existe de tels cas, c’est
certain.
Tous les membres de mon entourage soutiennent l’opération
militaire spéciale non seulement en paroles, mais aussi, pour beaucoup, en
actes, en apportant une aide humanitaire aux réfugiés et à la région[5].
De plus, ils ne le font pas depuis ces derniers mois, mais depuis de nombreuses
années. Les mêmes huit années que l’Occident connaissait si peu.
Breizh-info.com : En tant que journaliste, que pensez-vous
de la censure de RT dans l’Union Européenne ou de Sputnik, et du silence (voir
de l’approbation) d’une majorité de journalistes européens ?
Daria Douguine : Il s’agit d’un cas sans précédent de
violation de « La liberté d’expression ». La liberté d’expression implique la
possibilité de points de vue différents, parfois peu agréables pour les
autorités. RT et Sputnik n’étaient pas des instruments de propagande russe,
mais des plateformes de discussion. J’ai regardé de nombreux programmes de RT France
et ils étaient intéressants car ils incluaient des experts ayant un point de
vue alternatif à celui des médias du système. Le fait que les journalistes en
Europe n’aient pas réagi de quelque manière que ce soit à ces blocages montre
la nature « totalitaire » de l’ensemble du monde médiatique occidental. C’est
très triste. Espérons que les médias de la réinformation resteront actives et
vont prolonger détruire le bloc de désinformation.
Breizh-info.com : En France, les conséquences économiques
se font déjà ressentir (hausse des prix de l’essence notamment). Comment un
engrenage infernal serait encore évitable ?
Daria Douguine : Les sanctions anti-russes commencent
à rendre exsangue l’économie européenne. Le Pen, lors du débat avec Macron, les
a qualifiés à juste titre de « harakiri » pour l’économie française. Mais
réfléchissons, qui a besoin d’une Europe affaiblie ? Affligée après le COVID,
affaiblie par les sanctions anti-russes, l’Europe devra concentrer toutes ses
forces sur la question du sauvetage de sa propre économie, dans une telle
situation les bénéficiaires sont les USA, qui parviennent à établir leur
contrôle sur le continent. Un Rimland indépendant est inacceptable pour la
civilisation anglo-saxonne, le sentiment anti-américain et anti-OTAN croissant
(en France, remarquez, Mélenchon, Le Pen, Zemmour et de nombreux autres
candidats ont activement critiqué l’appartenance de la France à l’OTAN et ont
appelé à un scénario presque gaulliste de 1966) est une menace pour la
domination mondiale des États-Unis. Par conséquent, l’idée de sanctions
anti-russes a été mise en œuvre dans le but intéressé d’affaiblir la région.
Les élites de l’UE ont agi comme des intermédiaires, des mandataires des
mondialistes dans cette entreprise, et ont porté un coup au bien-être des
peuples et des populations européennes.
Daria Douguine : Je demande instamment à tous les
lecteurs de faire preuve d’esprit critique et de remettre en question les
rapports publiés par les médias. Si les élites libérales occidentales insistent
tant pour soutenir Kiev et diaboliser Moscou, c’est qu’il y a une logique de
bénéfice derrière tout cela. Il faut tout remettre en question. Il s’agit d’un
principe important qui nous permet de garder un regard sobre. Dans une société
du spectacle, de la propagande et de la nature totalitaire des systèmes
occidentaux, le doute est une étape fondamentale pour sortir de la caverne…
D’après le site Breizh-info.com
Dans l'interview ci-après, elle parle entre autre chose de la France où elle a fait une partie de ses études.
[1] Nous
avons corrigé quelques fautes de traduction. Note In girum imus
[2] Il va de
soi que si ce moment s’achève sans avoir été complet, c’est bien qu’il a échoué
par rapport à ses promesses. Note In girum imus
[3] On peut
reprocher gentiment à Daria de mettre sur le même plan Victoria Nuland qui a
été en charge de la politique de déstabilisation de l’Ukraine et notamment du
coup d’Etat de l’euroMaïdan, avec un personnage sans dimension comme Bernard
Henry-Levy. Note In girum imus
[4] On pourrait
ajouter que cet autoritarisme est la contrepartie de l’échec politique et économique
du néo-libéralisme. Note In girum imus
[5] Dans la
presse occidentale on parle des réfugiés ukrainiens en Occident qui fuient la
guerre, mais on ne parle pas des réfugiés qui ont la nationalité ukrainienne et
qui fuient vers la Russie, ils sont pourtant nombreux. Note In girum imus.