mercredi 31 août 2022

La mort de Gorbatchev

   

Mikhail Gorbatchev est décédé à l’âge de 91 ans. Les réactions ont été totalement asymétriques en Occident et en Russie. Pour les premiers ce « grand homme d’Etat » a permis de faire rentrer la Russie dans le rang de la mondialisation en démantelant l’URSS et d’avancer vers une paix mondiale. Pour les seconds, c’est celui qui a livré la patrie à ses ennemis. Mais quand on regarde avec un peu de recul, on s’aperçoit que ce fut un marché de dupes et que la principale erreur de Gorbatchev a été de faire confiance aux Américains. Il faut le redire ici Gorbatchev a confié avant de mourir que les Américains lui avaient promis de ne pas étendre l’OTAN au-delà de ce qu’ils contrôlaient déjà dans leur Empire, c’est-à-dire jusqu’à l’Allemagne réunifiée. Il est important de faire ce rappel parce que dans l’histoire des relations diplomatiques, les Américains apparaissent comme le peuple le moins fiable qui soit, un peuple sans honneur et sans parole. Y avait-il à cette époque une autre voie possible que celle de la Pérestroïka ? Il est bien difficile de le dire. Ce qui est certain c’est que cette politique à ouvert la voie à des réformes radicales qui ont été mises en œuvre directement par les équipes de l’Américain Jeffrey Sachs, réformes qui provoquèrent l’effondrement du PIB russe de 45%, avec toutes les conséquences sur la population russe qui a diminué radicalement. Les équipes américaines n’en étaient pas revenues de rencontrer si peu de résistance à leur plan lugubre d’expérimenter une économie de marché pure et dure comme jamais il n’en avait existé auparavant. Cette politique criminelle qui a vu s’allier la canaille de l’Occident à la crapule de la Russie a été ensuite mise en œuvre et approfondie par l’ivrogne corrompu Boris Eltsine, une fois que Gorbatchev a été évincé parce que manifestement il trainait les pieds pour continuer à piller le peuple de Russie, voire même à démanteler l’URSS dont l’éclatement allait alimenter des guerres nombreuses et meurtrières.  

Le PIB russe a baissé de 45% consécutivement aux réformes américaines 

L’idée qu’on vendait à l’époque était la suivante, quel qu’en soit le coût humain il fallait passer directement à l’économie de marché, tout privatiser, arrêter de financer les retraites, etc. Au cœur même du parti socialiste en France, il y avait plusieurs tendances, ceux qui voulaient suivre la voie gorbatchevienne d’une transition plus lente – Mitterrand était pour, notamment parce qu’il voyait d’un mauvais œil la montée en puissance de l’hégémonie américaine – et ceux qui voulaient assumer la méthode américaine de la terre brûlée. La première conséquence visible de ce démantèlement a été une catastrophe démographique, les vieux sont morts par millions. Mais tout cela a permis la création d’oligarques qui ont pu mettre la main sur les ressources du pays et devenir milliardaires. Jeffrey Sachs lui-même a été banni de l’université où il enseignait parce qu’il avait profité de sa position de réformateur en chef pour s’enrichir et enrichir ses proches et sa famille. Eltsine avait déménagé des sommes immenses aux Etats-Unis où il comptait ensuite passer le reste de ses jours. C’est seulement avec l’arrivée de Poutine au pouvoir que la Russie a commencé à sortir la tête de l’eau. Certes le pays avait été profondément transformé, il n’était plus question de socialisme, mais le pays a repris sa marche en avant pour retrouver sa fierté. Du reste la nostalgie de la puissance russe d’avant la Pérestroïka est tenace, elle est encore visible dans le soutien massif que les Russes apportent à la guerre en Ukraine, ou même encore dans le Parti communiste russe qui est aujourd’hui la principale force d’opposition à Poutine à la Douma, les libéraux façon Zelensky ou Navalny n’ont pas de réelle existence en dehors de celle que leur permet le soutien de la CIA. 

Catastrophe démographique en Russie suite à la Perestroïka 

Personne en Russie ne pleurera Gorbatchev, mais il nous semble erroné de tout mettre sur le compte de cet homme d’Etat. Son échec est d’abord celui d’un peuple très divisé, ou plutôt d’une classe politique qui tirait dans tous les sens du fait de sa corruption, et bien entendu les Américains ont joué sur cette division. On a vu, juste avant qu’Eltsine se lance dans la destruction de l’Etat pour le profit de quelques-uns, Gorbatchev signer des accords bidons avec le mauvais acteur de série B, Ronald Reagan, qui se flattait par ailleurs d’avoir mis la Russie à genoux en lançant son programme ruineux de Guerre des étoiles, programme que les Soviétiques ne pouvaient pas suivre. Mais cette humiliation n’avait pourtant rien à voir avec la réalité. Le système soviétique était à bout de course depuis des années, et beaucoup avaient anticipé son effondrement, même si on n’y avait pas mis de date. Le problème de la classe politique soviétique et donc de Gorbatchev a été de ne pas avoir su proposer une solution alternative à celle proposée par les Américains. Il n’a par ailleurs rien dit de la guerre en Ukraine, se contentant de dire que l’OTAN et les Américains lui avaient promis verbalement de ne pas « aboyer aux portes de la Russie » comme le dit si joliment la Pape François. Naïveté ou lassitude face à une situation catastrophique dont il avait hérité, il va de soi que Gorbatchev a fait une erreur majeure, sous-estimant la rancœur des Etats-Unis qui visaient de mettre au pas la Russie comme ils l’ont fait avec l’Ukraine en propulsant les nazis sur le devant de la scène – souvenez-vous de ce chiffre, un tiers des terres agricoles ukrainiennes sont la propriété de multinationales américaines, ce qui veut dire que si l’Ukraine rejoignait l’Union européenne, ces multinationales américaines se trouveraient arrosées par les subventions de la PAC, payées par les impôts des européens ! 

Gorbatchev et Reagan signent le traité sur les armes nucléaires à portée intermédiaire 

Poutine a présenté ses condoléances à la famille de Gorbatchev d’une manière sobre comme on dit. Cela résume sans doute le sentiment profond de la majeure partie de la population russe. Présenté en Occident comme un homme de paix parce qu’il a signé le traité de désarmement de l’URSS, il a obtenu le prix Nobel de la paix, un prix éminemment politique qui a systématiquement soutenu dans ses attributions une politique antisoviétique, notamment en le donnant à des dissidents comme Sakharov. Gorbatchev avait un autre défaut, il aimait les honneurs et se faire photographier avec les dirigeants occidentaux, comme s’il avait quelque influence sur eux. Ça le flattait, mais ça n’empêchait pas les Russes de souffrir profondément de la Pérestroïka et de ses suites. Les Russes l’amalgament souvent à tort au très corrompu Eltsine. Ayant été le dernier dirigeant de l’URSS avant sa dissolution, il n’aura rien maitrisé du tout, pour des raisons très compliquées, il aura subi les événements d’humiliation en humiliation et ne laissera que très peu de traces dans l’histoire de son pays. Aucune honte ne lui aura été épargnée, en 1997, on le vit vendre son image pour quatre sous à Pizza Hunt qui se servit de lui pour son petit commerce. Peut-être est-ce cette image qui en dit le plus long sur l’incompétence de Gorbatchev. C’était déjà une fin misérable avant son propre décès qui allait intervenir un quart de siècle après. On pourra toujours opposer cette image à celle de McDonald champion de la bouffe pourrie à l’américaine, abandonnant le territoire russe, comme chassé par Poutine. Un sondage récent avançait que seuls 7% des Russes avaient du respect pour Gorbatchev, ça correspond en somme à ceux qui sont tentés par le libéralisme à la manière américaine ou européiste.

Publicité pour Pizza Hunt

L'unanimisme suspect de la presse internationale pour l'homme qui a ouvert la porte au capitalisme sauvage en Russie doit interpeler toutes les cervelles bien faites. La gauche l'appelait Gorby ou Gorbi dans un élan de familiarité qui au fond indique bien de quel piédestal le dirigeant d'un pays jadis puissant était tombé. la plupart des journaux occidentaux s'étonnent que les Russes lui gardent une rancune tenace. Mais la décomposition de l'Empire soviétique s'est faite dans le sang et les larmes, c'est un devoir de mémoire que de le rappeler. 



dimanche 28 août 2022

La sale guerre menée par l’OTAN et son féal Zelensky

  

L’armée ukraino-atlantiste a bombardé le centre commercial « Galaktica » à Donetsk 

De nombreux éléments montrent que l’OTAN avec ses supplétifs ukrainiens mène une sale guerre en Ukraine, avec pour but de la faire durer le plus longtemps possible. Les Etats-Unis de plus en plus impliqués dans la guerre en tant que cobelligérants viennent de voter une nouvelle tranche de livraison d’armes de près de près de 3 milliards de dollars[1]. Ils en sont à plus de 10 milliards de dollars depuis le début de la guerre. A cela il faut ajouter ce que les européens donnent à Kiev. Malgré les rodomontades de Josep Borrell le furieux va-t-en-guerre, plusieurs pays trainent les pieds et préfèrent annoncer une aide pour plus tard que de livrer directement des armes. Les Espagnols qui n’ont pas admis que l’oncle Sam leur force la main a hésité longtemps avant de se soumettre au diktat. Les Français aussi trainent les pieds et malgré les propos flamboyants de Macron, ils n’ont pas livré beaucoup de canons Caesar – une des raisons étant que cette livraison consiste à déshabiller Pierre pour habiller Paul et risque de rendre l’armée français plus vulnérable. Les derniers 3 milliards de dollars d’aide militaire américaine ont été pris sur les fonds spéciaux du Pentagone – c’est là que se fabrique la guerre en Ukraine, et non pas à la Maison Blanche ou à Kiev – et bien sûr ces fonds risquent de manquer plus tard si les Etats-Unis veulent en découdre avec la Chine. Malgré les dizaines de milliards de dollars qui ont abondé en Ukraine pour les armes et pour le soutien à l’économie, l’armée ukrainienne ne tient pas le choc. Non seulement les canons américains ne sont pas manipulés par des soldats ukrainiens, mais par des américains, officiellement démobilisés de l’armée américaine, mais la stratégie et la tactique ruineuse de l’armée ukrainienne est définie par les conseillers américains en poste dans le gouvernement de Kiev. Ce qui accroit les tensions car une partie de l’Etat major conteste cette stratégie ruineuse qui augmente le nombre de victimes inutiles. Ces tensions ont entraîné des purges, on y reviendra. 

Livraison d’armes américaine à l’Ukraine 

Le monde, anciennement journal de la droite mondialiste, mais un peu sérieux dans la couverture de l’événement, met très souvent en avant les victimes civiles que font les frappes russes sur l’Ukraine. Mais ils ne parlent guère, ou seulement sous la forme d’un entrefilet relégué à l’arrière des publications sur le sujet des bombardements volontairement terroristes de la coalition ukraino-otaniste sur des cibles civiles. De la même manière ils ne parlent pas des frappes ukrainiennes au-delà de la frontière russo-ukrainienne sur des villes et des villages russes qui ne sauraient être confondus avec des cibles militaires. C’est que l’ensemble des médias occidentaux est convaincu qu’ils œuvrent pour le bien en soutenant cette guerre ruineuse, et donc ils ne veulent pas détruire le narratif qui va avec. Ils relaient avec plaisir les mensonges éhontés de Zelensky. Par exemple Le monde, parangon furieux du journal mondialiste militant, a fait pendant plusieurs jours semblant de croire que les Ukrainiens et les Russes se renvoyaient la balle en ce qui concerne les bombardements sur la centrale nucléaire de Zaporijia[2]. BFMTV a repris sans recul les mensonges zelenskiens, endossant l’idée stupide des tirs russes sur la centrale nucléaire. Sans doute les journalistes pensaient que le mensonge passerait aux yeux de l’opinion, la plupart des Occidentaux n’ayant pas le temps de s’attarder à décrypter l’information. C’est ainsi que l’opinion publique se travaille en Occident. Or il était évident pour n’importe quel esprit normalement constitué que les Russes qui se trouvent dans la centrale nucléaire qu’ils occupent depuis des mois, n’allaient pas se bombarder eux-mêmes, même si on considère comme le font la plupart des commentateurs occidentaux que les Russes sont une race un peu à part et donc qu’ils sont un peu plus timbrés que la moyenne des humains qui peuplent cette malheureuse planète. Les choses se sont calmées du point de vue de la médiatisation des risques d’une explosion nucléaire, quand Poutine a invité l’International Atomic Energy Agency à se rendre sur place. Zelensky a fait alors machine-arrière et a reconnu, dans un communiqué embrouillé, que c’était bien son armée qui bombardait la centrale nucléaire, le secrétaire général de l’ONU dénonçant à demi-mot les mensonges ukrainiens[3]. Ces mensonges n’ont pas été relevés par les médias occidentaux, ni le vertueux Monde, ni BFMTV bien entendu. 

BFMTV reprenant sans filtre les mensonges zelenskiens

 Les mensonges font partie intégrante de la guerre américaine contre la Russie, guerre qui se mène par Ukrainiens interposés. Et à tout prendre il y a moins de mensonges dans les médias russes actuellement que dans les médias occidentaux. On aime bien aux Etats-Unis ou en France raconter qu’on se bat pour la démocratie et la liberté. Mais ce bobard est contredit par la censure inadmissible, en France RT et Sputnik ont été interdits, alors que ces médias qui certes rompaient avec l’unanimisme de commande, maintenaient pourtant un véritable pluralisme. Les bases légales d’une telle censure ne sont pas très claires et violent le fameux Etat de droit dont on nous rabat les oreilles. Mais le pire est la dictature maintenant à l’œuvre à Kiev. Zelensky suivant les conseils de ses patrons a interdit 11 partis, soit toute opposition, et également 5 chaînes de télévision. En même temps il procède, sur les conseils amicaux des experts américains, à des purges périodiques aussi bien dans l’armée où la stratégie otanienne est contestée que dans le SBU, service de sécurité intérieure qui est comptable depuis 2014 de dizaines d’arrestations arbitraires et de meurtres au cœur de l’opposition, et où les purges paraissent quotidiennes, soit sous la forme de destitution, de démission, voire d’élimination physique. Malgré la main de fer qui s’est abattue en Ukraine pour conserver un unanimisme de façade, même Le monde s’est rendu compte que la démarche de l’OTAN, relayée par Zelensky, était de plus en plus contestée[4]. Une des raisons à cela est que la majorité des Ukrainiens s’ils sont anti-russes, veulent se débarrasser de la Crimée et du Donbass. Or Zelensky avance bêtement qu’il n’y aura pas de négociation avec la Russie tant que les armées russes ne se seront pas retirées de la Crimée et du Donbass[5] ! 

Bombardements ukraino-atlantistes sur Zaporijia 

On fera remarquer que la position zelenskienne n’est pas très fiable et qu’à la fin du mois de février 2022, il se disait prêt à négocier avec les Russes, sur le Donbass et la Crimée, sans préalable[6]. Mais si ce garçon n’est guère crédible dans ses positions, changeant constamment de posture, évoluant d’une position ouverte sur une paix raisonnable avec la Russie, vers une rhétorique de plus en plus guerrière, c’est uniquement parce qu’il ne décide de rien et qu’il ne fait qu’appliquer les consignes de Washington. L’OTAN croit que les capacités d’acteur de Zelensky et leur diffusion dans les médias qui la soutiennent, seront suffisantes pour couvrir les mensonges et les exactions de l’armée ukraino-atlantiste. Le monde a fait semblant de découvrir les frappes criminelles de l’armée ukrainienne sur un supermarché de Donetsk[7]. Cela fait pourtant plusieurs semaines que les frappes ukraino-atlantistes atteignent des zones résidentielles où il n’y a aucun objectif militaire, le but est de terroriser les populations du Donbass qui sont rétives à revenir dans le giron de Kiev qui ne rêve que de leur faire payer leur rébellion. A Donetsk, ce sont les bâtiments administratifs qui étaient d’abord visés, mais ne comptez pas sur le journal Le monde pour vous renseignez sur les morts que ces frappes ont faites, les morts russes ou russophones n’intéressent pas le journal du soir. Les frappes sur Donetsk le 23 août 2022 ont fait 3 morts et 14 blessés, tous des civils[8]. Ces frappes sont le résultat de l’utilisation des canons à longue portée fournis par les Etats-Unis et probablement manipulés par des experts étatsuniens. Elles se répètent depuis plusieurs semaines, et s’étendent maintenant à la Crimée, visant soi-disant des entrepôts d’armes russes. L’excuse d’une erreur de trajectoire est le plus souvent invoqué quand le crime n’est pas nié.

Bombardements ukraino-atlantistes sur Donetsk 

Il est commun en Occident de dénoncer les crimes de guerre de l’armée russe, comme si les Ukrainiens étaient à l’abri de cette dérive. Il faut défendre par tous les moyens l’idée selon laquelle l’OTAN mène un juste combat. Mais les preuves de crimes de guerre de la part des nazis de l’armée ukrainienne sont devenues très nombreuses. C’est d’ailleurs pour cette raison que Zelensky a tenté une manœuvre pour éviter un procès public et qui serait diffusé dans le monde entier sur les crimes de guerre des soldats qui s’étaient enfermés dans l’usine de Marioupol[9]. Toujours dans l’outrance il a menacé de ne plus jamais négocier si ce procès avait lieu, mais il n’aura échappé à personne que non seulement de négociations il n’y en a pas, mais qu’en outre Zelensky avait affirmé qu’il ne négocierait pas tant qu’un soldat russe serait encore sur le terrain. Plusieurs attentats terroristes ont été répertoriés qui semblent émaner de Kiev ou de l’OTAN, voire de la CIA, le plus spectaculaire et qui a fait couler le plus d’encre est bien sûr celui qui a conduit à la mort de Daria Douguine. Les médias français qui ont versé peu de larmes sur la mort de cette jeune femme, ont largement repris l’idée que son père était fautif puisqu’il était ultra-nationaliste, alors même que cet homme, quoiqu’on en pense n'a strictement aucune responsabilité militaire dans le conflit qui se déroule. Qu’on soit d’accord ou non avec les idées de Douguine et de sa fille, rien ne peut justifier un attentat terroriste. Les journaux français, Le monde en tête, croient minimiser cet acte de terrorisme en tartinant sur les liens supposés de la familles Douguine avec l’extrême droite française. Ceux-là feraient mieux de regarder de près les compromissions de Kiev avec les néo-nazis ukrainiens. Je ne vais pas revenir sur cette ignominie. J’ajouterais seulement qu’Ilya Ponomarev, russe en exil au parcours politique des plus sinueux, cochant à peu près toute les cases du mondialisme échevelé après avoir été membre du parti communiste russe, a créé une diversion. Aujourd’hui il vit à Kiev et a avancé que l’attentat avait été revendiqué par une mystérieuse Armée Républicaine Nationale[10] dont il serait le seul à être en contact, prétendant que cette armée montait en puissance, devenait très populaire en Russie et allait porter la guerre sur le sol russe. Les médias occidentaux ont repris le leurre pour appuyer le fait que ni l’OTAN, ni les services secrets ukrainiens ne seraient impliqués dans ce crime. Dédouanant à partir de discours alambiqués l’implication de Natalia Vovk, ukrainienne membre du régiment Azov. Certes il est encore trop tôt pour affirmer que Vovk est bien impliquée dans ce meurtre, mais l’implication d’une armée fantôme semble encore bien plus cousue de fil blanc. L’idée est de faire croire qu’il y a une opposition tellement forte à la guerre en Russie que cela a entraîné quasiment une guerre civile. La plus forte probabilité est que cette diversion tente de justifier par anticipation d’autres attentats terroristes à Moscou ou ailleurs, loin des lignes de front. On n'y a pas fait attention, mais quand le Pape François a déploré la mort de  Daria Douguine, les autorités de Kiev ont protesté, avouant ainsi indirectement qu'elles étaient bien à l'origine de cette attentat crasseux.

Natalia Vovk 

Mais toutes les informations convergent, il y a encore ce fameux rapport d’Amnesty International dénonçant à mots couverts les crimes de guerre ukrainiens[11]. Ce rapport a fait hurler les soutiens de Zelensky qui ont demandé et obtenu des excuses, bien qu’Amnesty International ait maintenu l’intégralité de ses conclusions. Le rapport avançait, ce qu’on sait depuis un bon moment, que l’armée ukrainienne se servait de boucliers humains, comme peuvent le faire par exemple le Hamas dans les Territoires Palestiniens. La raison est assez simple, c’est que les Russes ont l’ordre de faire le moins de dégâts humains possibles, aussi bien parmi les populations civiles que dans leurs propres rangs. Sachant cela la tactique otanienne a consisté à ralentir la progression russe en dissimulant des armements de guerre parmi les populations civiles. Quand on additionne tous ces faits criminels, notamment le terrorisme qui se développe depuis au moins le printemps, on se rend compte que cela dévoile une stratégie qui est en droite ligne avec les actions du nazi Bandera pendant la Seconde Guerre mondiale. Elle intervient parce que l’armée ukrainienne n’a plus d’autre choix, étant battue sur le terrain, même si elle résiste et résistera sans doute encore longtemps, elle en vient à reprendre les vieilles techniques nazies de la terre brûlée en multipliant les crimes de guerre et en évitant l’affrontement direct dans le moment où leur armée était en déroute. 

Zaporojie le 24 aout 2022 

A Zaporojie les habitants ont déployé un drapeau russe de plusieurs centaines de mètres le jour de la fête d’indépendance. Les foules ont fait la fête dans la joie et la bonne humeur, saluant plutôt une libération qu’une occupation. Cela n’empêche toujours pas les médias français de parler d’occupation, alors que tous les films qui nous parviennent, montrent des scènes de liesse à l’arrivée des troupes russes. Certes on peut raconter que ces scènes sont le fait d’une minorité pro-russe, mais à Zaporojie il est difficile de croire que les milliers de personnes qui se sont massées ce jour-là n’était qu’une minorité ou incités à le faire sous la pression des militaires russes. Cela nous est confirmé par le fait que Zelensky et sa clique refusent par avance toute idée de référendum d’autonomie dans le Donbass et récusent même les résultats du référendum de 2014 en Crimée, alors que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est considéré par l’ONU comme la pierre angulaire de la démocratie : Ce principe est consacré d'une manière expresse dans la Charte des Nations Unies. L'article premier stipule que l'un des buts de l'O.N.U. est de « développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l'égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d'eux-mêmes, et de prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix dans le monde ».

Ce principe est universel, il doit s’appliquer aux populations du Donbass et de la Crimée, comme aux populations de Taïwan, comme aux Arméniens du Haut Karabakh, ou même encore aux Catalans. Il ne se divise pas. Ceux qui le bafouent ne peuvent pas parler au nom de la démocratie ou de la liberté. Les Américains et l’OTAN prétendent le défendre vis-à-vis de la Chine ne défendant Taïwan, mais ce ne sont que des hypocrisies, s’ils croyaient à ce principe ils le défendraient en Ukraine. La vérité est que l’Empire américain étant en difficulté, en crise de légitimité et de leadership, il pratique ce principe à géométrie variable avec le but avoué d’affaiblir ses concurrents, la Chine et la Russie bien sûr, mais aussi l’Europe dans son ensemble.  

Les Occidentaux, du moins leurs dirigeants, ont décidé, selon Macron, de soutenir la guerre en Ukraine dans la durée[12]. Mais cette cobelligérance va rapidement poser un problème, au-delà de ce que ça coutera, parce qu’il n’est pas certain que dans la situation catastrophique de l’Europe le peuple voire même ses représentants suivent dans cette aventure belliqueuse. C’est vrai pour la France, mais c’est vrai aussi pour l’Allemagne, l’Italie et quelques autres pays comme la Hongrie et l’Autriche. Les Allemands sont en train de devoir faire face à la plus grande crise économique depuis longtemps, l’inflation explose, et leur économie dépendante du gaz russe ne tourne plus très bien. Vont-ils mourir pour l’OTAN ? On a beaucoup discuté des effets de la guerre en Ukraine sur l’effondrement de l’euro par rapport au dollar et par rapport au rouble. Mais ce n’était pas une obligation pour l’Union européenne de se lancer dans cette aventure à coups de sanctions et d’intégration de l’Ukraine dans l’Union européenne et de la Finlande et de la Suède dans l’OTAN. La soumission au diktat américain coûte cher, alors que l’ineffable Bruno Le Maire parlait il n’y a guère de mettre l’économie russe à genoux !


[1] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/08/24/ukraine-joe-biden-annonce-une-nouvelle-tranche-d-aide-militaire-de-presque-trois-milliards-de-dollars_6138901_3210.html

[2] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/08/11/guerre-en-ukraine-kiev-et-moscou-s-accusent-de-nouvelles-frappes-sur-le-site-de-la-centrale-nucleaire-de-zaporijia_6137804_3210.html

[3] https://www.francetvinfo.fr/monde/europe/manifestations-en-ukraine/direct-guerre-en-ukraine-la-russie-assure-n-avoir-pas-deploye-d-armes-lourdes-dans-la-centrale-nucleaire-de-zaporijjia_5313985.html

[4] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/08/23/a-kiev-des-premieres-critiques-derriere-l-unite-politique-autour-de-zelensky_6138726_3210.html

[5] https://www.tf1info.fr/international/en-direct-guerre-ukraine-russie-entre-zelenky-et-poutine-rencontre-avec-erdogan-et-guterres-pour-parler-des-cereales-tensions-a-zaporijia-morts-a-kharkiv-les-informtions-de-jeudi-18-aout-2022-2229630.html

[6] https://www.leparisien.fr/international/guerre-en-ukraine-zelensky-pret-a-negocier-mais-pas-en-bielorussie-comme-lentendait-poutine-27-02-2022-L4XZGM777BDRLLJZFPDILEUBKQ.php

[7] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/08/24/guerre-en-ukraine-kiev-a-les-hommes-mais-pas-le-materiel-la-russie-dispose-du-materiel-mais-pas-des-hommes_6138880_3210.html

[8] https://alawata-rebellion.blogspot.com/2022/08/pour-daria.html

[9] https://information.tv5monde.com/info/direct-ukraine-zelensky-ne-negociera-plus-si-des-combattants-ukrainiens-sont-juges-marioupol#:~:text=Russie%20%3A%20la%20guerre-,DIRECT%20%2D%20Ukraine%20%3A%20Zelensky%20ne%20n%C3%A9gociera%20plus%20si%20des%20combattants%20ukrainiens,Ukraine%2C%20dimanche%2021%20ao%C3%BBt%202022.

[10] https://www.lalibre.be/international/europe/guerre-ukraine-russie/2022/08/24/un-groupe-dactivistes-russes-revendique-lassassinat-de-daria-douguina-V5WEQ3OYZZAZXGWPQ63YVZRJ3Q/

[11] https://www.amnesty.fr/actualites/ukraine-les-tactiques-de-combats-ukrainiennes-mettent-en-danger-la-population-civile

[12] https://www.lefigaro.fr/international/a-un-jour-de-la-fete-de-son-independance-l-ukraine-se-prepare-a-des-attaques-20220823

mercredi 24 août 2022

Daria Douguine : la guerre en Ukraine, « un choc des civilisations mondialiste et eurasienne » [Interview]

  

Daria Douguine est morte, lâchement assassinée à l’âge de trente ans dans un attentat terroriste qui a eu lieu à Moscou, son père était semble-t-il visé. Parmi les personnes qui soutiennent la démocratie façon OTAN et Zelensky en Ukraine, personne ne s’est levé pour condamner cet acte barbare qui donne une vision particulièrement dégradée de la guerre de voyous que mènent les forces ukraino-atlantistes. Plus encore les soutiens français de Zelensky semblaient même trouver normal que cette jeune femme soit assassinée, puisque son père est présenté comme un « idéologue ». Elle a été tuée donc par la faute de l’existence de son père ! « Idéologue »’est le mot qu’emploie Le monde pour parler du père. Ils auraient pu dire qu’Alexandre Douguine était un politologue, ou un homme politique, ou un philosophe, mais les plumitifs du Monde emploient le terme d’idéologue pour tenter de dévaloriser l’engagement du père. Le père et la fille n’étaient pas comme le disent les médias occidentaux des ultra-nationalistes – formule qui ne veut rien dire, puisqu’on est ou non nationaliste, comme une porte doit être ouverte ou fermée, il ne peut y avoir de porte ultra-fermée – ils développaient l’idée que la mondialisation avait échoué, et donc qu’un monde multipolaire devait émerger de cet échec, ils appelaient à la formation d’un bloc « eurasiste ». Dans cet interview, publiée d’abord sur le site Breizh-info.com, on n’est pas obligé de se trouver en accord sur l’ensemble des idées qu’elle développe, notamment vis à vis de la religion, mais c’est une pensée qui existe et qui se trouve en rupture avec le globalisme, ce que nous approuvons. Ce n’est pas seulement une opinion que de constater la fin du globalisme, c’est d’abord un fait.[1]

Le conflit en Ukraine n’est toujours pas terminé. En Occident, nous sommes bombardés d’informations en faveur de l’Ukraine et des Ukrainiens. Nous oublions que les Russes aussi ont leur point de vue. C’est à cet effet que nous avons interrogé Daria Douguine, fille d’Alexandre Douguine, au sujet de la situation. Un entretien passionnant. 

Breizh-info.com : Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ? N’est-il pas difficile pour vous parfois de porter le nom de Douguine, et donc d’être forcément assimilée à votre papa ?

Daria Douguine : Je suis diplômée de la faculté de philosophie de l’université d’État de Moscou, avec un diplôme en histoire de la philosophie. Mes recherches portaient principalement sur la philosophie politique du néoplatonisme tardif, un sujet d’un intérêt sans fin. La principale ligne de pensée de la philosophie politique des néoplatoniciens tardifs est le développement de l’idée d’une homologie de l’âme et de l’État et de l’existence d’un ordre triple similaire dans les deux. De même qu’il y a trois bases dans l’âme, de même dans l’État (et les platoniciens décrivent le modèle indo-européen, plus tard parfaitement théorisé dans les travaux de Dumezil) il y a aussi trois domaines – ce modèle se manifeste dans l’Antiquité et au Moyen Âge. La compréhension existentielle et psychique de la politique est en fait perdue à bien des égards aujourd’hui, nous sommes habitués à voir la politique uniquement comme une technique, mais le platonisme révèle un lien profond entre les processus politiques et psychiques. Il est urgent aujourd’hui de rétablir une telle vision complète des processus politiques, c’est-à-dire d’examiner la « politique existentielle ».

Je suis honorée d’être dans le même bateau que mon père (sur le même navire existentiel), étant la fille d’un grand chercheur de la Tradition, auteur de l’ouvrage en 24 volumes Noomachia (« guerres de l’esprit » – analyse à travers les trois logos de toutes les cultures du monde). Le fait d’être sous le coup de sanctions de la part des États-Unis, du Canada, de l’Australie et du Royaume-Uni est aussi un symbole que nous, les Douguine, sommes sur le chemin de la vérité dans le combat contre le globalisme. Par conséquent, je dirais que c’est un honneur d’être né dans une telle famille. 

 

Breizh-info.com : Parlez-nous de votre travail actuellement ?

Daria Douguine : Je suis une observatrice politique du Mouvement international eurasiste et un expert en relations internationales. Mon domaine d’activité est l’analyse de la politique européenne ainsi que la géopolitique. À ce titre, j’apparais sur des chaînes de télévision russes, pakistanaises, turques, chinoises et indiennes, présentant une vision mondiale multipolaire des processus politiques. Mes centres d’intérêt sont à la fois l’espace de civilisation européen et le Moyen-Orient, où une sorte de révolution conservatrice est en train de s’amorcer – de la confrontation constante de l’Iran avec l’hégémonie américaine ou de la lutte de la Syrie contre l’impérialisme occidental à la Turquie, qui montre aujourd’hui des tendances intéressantes d’éloignement de l’OTAN et du bloc géopolitique anglo-saxon et tente de construire sa politique étrangère sur une base multipolaire, en engageant un dialogue avec la civilisation eurasienne. Je pense qu’il est important de suivre les processus de la région du Moyen-Orient, c’est l’une des scènes de la lutte contre l’impérialisme. D’un autre côté, je m’intéresse aussi beaucoup aux pays africains ; ils représentent « L’Autre » pour l’Europe et la Russie, à partir de l’analyse duquel on peut mieux comprendre sa propre civilisation. L’Afrique a toujours été un élément de rêve pour les Européens comme pour les Russes – souvenez-vous du Voyage en Abyssinie et au Harrar d’Arthur Rimbaud, ou du poète russe Nikolaï Goumilev qui s’est inspiré de Rimbaud (« Journal Africain ») et une série de poèmes sur l’Afrique, dans lequel il révèle en fait l’Afrique comme une civilisation inexplorée, pleine de sens, que le colonialisme occidental a cruellement tenté de défaire et de détruire. Aujourd’hui, des bouleversements tectoniques se produisent sur le continent africain et la confrontation des civilisations : occidentale et authentiquement africaine (si différente et si unique) est extrêmement intéressante.

Pour moi, un sujet particulièrement important est le développement de la théorie d’un monde multipolaire. Il est clair que le moment mondialiste est terminé[2], la fin du libéralisme est arrivée, la fin de l’histoire libérale. En même temps, il est extrêmement important de comprendre qu’une nouvelle étape pleine de défis, de provocations et de complexités a commencé. Le processus de création de la multipolarité, de structuration des blocs civilisationnels et d’établissement d’un dialogue entre eux est la tâche principale de tous les intellectuels aujourd’hui. Samuel Huntington, dans une vision réaliste des relations internationales, a mis en garde à juste titre contre les risques d’un choc des civilisations. Fabio Petito, spécialiste des relations internationales, a souligné que la construction d’un « dialogue des civilisations » est la tâche centrale et « la seule façon d’avancer ». Ainsi, pour consolider le monde multipolaire, les zones frontalières (intermédiaires) entre les civilisations doivent être traitées avec soin. Tous les conflits se déroulent aux frontières (zones intermédiaires) des civilisations, là où les attitudes s’affrontent. Il est donc primordial de développer un état d’esprit « frontalier » (intermédiaires) si l’on veut que le monde multipolaire fonctionne pleinement et passe du « choc » au « dialogue » des civilisations. Sans cela, il y a un risque de « choc ». 

Massacre de la place Maïdan organisé par les équipes de Victoria Nuland et les nazis ukrainiens 

Breizh-info.com : Quel regard portez-vous sur la guerre en Ukraine ? Et sur les réactions en Occident et dans le monde ?

Daria Douguine : La situation en Ukraine est précisément un exemple de choc des civilisations ; elle peut être considérée comme un choc des civilisations mondialiste et eurasienne. Après la « grande catastrophe géopolitique » (comme le président russe a appelé l’effondrement de l’URSS), les territoires du pays autrefois uni sont devenus des « frontières » (zones intermédiaires) – ces espaces auxquels l’attention des voisins s’est accrue, l’OTAN et surtout les États-Unis étant intéressés à déstabiliser la situation aux frontières de la Russie. Dans les années 1990, un travail cohérent a été initié avec les cadres des nouveaux gouvernements des nouveaux États – l’Ukraine ne fait pas exception. Les événements de 2014 en Ukraine, le Maïdan, soutenus avec tant de ferveur à la fois par Nuland et le fameux Bernard-Henri Levy soldat de l’ultra-mondialisation[3], ont été un tournant, en fait ils ont ouvert la porte à l’établissement d’un dictat mondialiste direct sur l’Ukraine. De plus, les éléments libéraux et nationalistes, qui étaient plus ou moins neutres avant 2014, ont rejoint un front uni avec un agenda mondialiste et pro-américain. Pendant 8 ans en Ukraine, la russophobie a été cultivée par divers programmes et l’histoire a été réécrite, jusqu’au massacre physique des Russes : ces mêmes 8 années terribles pour le Donbass avec des bombardements quotidiens. Le public français peut l’entendre la documentaliste Anne Laure Bonnel, témoin de ces 8 années à Donetsk, qui n’a pas peur de dire la vérité dans ses films et ses interviews.

Le soutien unanime de l’Occident à l’Ukraine en 2022, la fourniture d’armes à une échelle impensable – tout cela ressemble à une agonie. L’agonie d’un régime mondialiste qui commence à perdre du terrain face à la multipolarité. Pour moi, la douleur la plus importante est que l’Europe a succombé à l’influence de la propagande mondialiste et qu’au lieu de rester neutre, elle a pris le parti de la guerre. À bien des égards, c’était certainement le plan des États-Unis, qui avaient si systématiquement et continuellement provoqué tout le conflit en injectant des armes en Ukraine. Rien que des États-Unis (selon Transparency International), plus de 658 millions de dollars ont été investis dans l’aide à l’Ukraine entre 2014 et 2017. 

En vert les pays approuvant les sanctions occidentales contre la Russie 

Dans le même temps, on constate que les pays d’Amérique latine, du Moyen-Orient, la Chine et l’Inde n’ont pas adopté une position mondialiste. Le dirigeant vénézuélien Nicolas Maduro a déclaré que son pays adhérait « fermement » à la position de la Russie. À Cuba, des personnes ont été vues portant des drapeaux russes et des symboles Z lors d’une manifestation le 1er mai, rappelle la chaîne allemand ZDF. L’Argentine a accusé l’Occident d’avoir les doubles standards. La vice-présidente du pays, Cristina Kirchner, a déclaré que le pays était en conflit avec Londres au sujet des îles Malouines. Au Brésil, le candidat à la présidence Lula da Silva a déclaré à son tour que le dirigeant ukrainien Volodymyr Zelensky était responsable de ce qui se passait dans son pays. La Chine s’est prononcée contre l’expansion de l’OTAN et les provocations des États-Unis. L’Inde a tenté de maintenir sa neutralité stratégique (dans les années 1990, l’Inde elle-même a été la cible de sanctions américaines et occidentales très douloureuses pour avoir refusé d’adhérer au traité d’interdiction complète des essais nucléaires. Le pays, que l’Occident cherche à couper de son oxygène et à priver de haute technologie, a alors tenu bon (en grande partie grâce à la coopération avec la Russie, qui ne s’est pas associée aux sanctions et a prôné leur abolition). Un certain nombre de pays du Moyen-Orient ont soutenu l’opération militaire spéciale de la Russie (la Syrie, alliée de longue date de la Russie, connaît mieux que quiconque la bataille contre le mondialisme), des appels au retrait de l’OTAN se font de plus en plus entendre en Turquie, et le président a refusé d’approuver l’admission de la Suède et de la Finlande dans l’OTAN. De nombreux pays d’Afrique, notamment ceux où le sentiment antiglobaliste est fort, n’ont pas soutenu les critiques occidentales à l’égard de la Russie (Mali, Soudan, RCA, Zimbabwe, République du Congo, Érythrée). Ces réactions indiquent la fin du mythe d’un « espace mondial unique ». L’opération militaire spéciale de la Russie en Ukraine a accéléré la formation d’un monde multipolaire et catalysé de nombreux processus géopolitiques.

Breizh-info.com : Ne pensez-vous pas que la Russie soit en train de s’isoler ? Quelles seront les conséquences selon vous de tout cela ?

Daria Douguine : Je pense que c’est l’inverse. La Russie trouve de nouveaux partenaires et les processus de souveraineté (par exemple, la dédollarisation économique) commencent à s’accélérer. La Russie tente d’être « punie » par les pays occidentaux au moyen de sanctions, mais l’effet sur l’économie russe n’est pas très sensible (« Les sanctions internationales à l’encontre de la Russie ne semblent pas impacter la vie quotidienne des Moscovites », mentionne un journaliste dans un reportage de BFM TV). La politique de sanctions de l’Occident a été un catalyseur pour la recherche de nouveaux partenaires et la désoccidentalisation de notre pays. Dans le même temps, ces sanctions ont frappé douloureusement les pays européens, devenant une sorte de « hara-kiri » pour de nombreuses économies européennes. C’est une nouvelle très inquiétante, mais apparemment cela faisait aussi partie du complot américain visant à déstabiliser le continent européen. Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a déclaré que Budapest ne soutenait pas l’imposition de sanctions irréfléchies contre la Russie. « Les sanctions contre la Russie sont comme une bombe atomique, cela pourrait nous conduire non seulement à ne pas pouvoir nourrir notre population mais aussi à recevoir une masse de migrants à la frontière », a déclaré le Premier ministre hongrois.

Les nouveaux blocs émergent. « Les pays en développement, notamment la Chine, l’Inde, l’Indonésie, le Brésil et d’autres pays qui ont refusé de prendre parti à la suite des sanctions occidentales contre la Russie, devraient envisager des moyens de renforcer leur coordination économique pour résister aux chocs ultérieurs provoqués par l’Occident. Il est important de noter que les pays en développement doivent chercher une solution par le biais de la coopération financière et commerciale », a écrit un journaliste du Global Times de Chine. Ce sont des processus géopolitiques très intéressants. La Russie n’a donc pas été victime de l’isolement, elle a été le pionnier d’un ordre mondial multipolaire. 

Des voitures ornées de drapeaux russes se dirigeant vers la grande place de Torzhok pour un rassemblement de soutien aux opérations militaires de la Russie en Ukraine 

Breizh-info.com : Comment la population russe réagit-t-elle à cette guerre, qui visiblement, a déjà fait beaucoup de pertes côté russe ?

Daria Douguine : Toute opération militaire entraîne toujours des pertes. Il convient de noter que les chiffres fournis par les sources ukrainiennes (et ce sont eux qui sont diffusés dans les médias occidentaux) ne sont pas corrects et doivent être vérifiés. Nous sommes confrontés à une situation de guerre de l’information dans laquelle tout, des rapports militaires aux chiffres, est politisé. Dans le domaine des médias en Occident, il n’existe malheureusement pratiquement aucune vision alternative des événements. L’Ofpra a réalisé en 2016 un dossier sur « Pravy Sektor » (« Secteur droit »), groupe ultras ukranien : Pravy Sektor fait l’objet d’allégations d’antisémitisme et de xénophobie, de manifestations homophobes, de détentions illégales et autres abus de pouvoir. Il a créé une milice armée, le Corps des volontaires ukrainiens, engagée dans le conflit avec les séparatistes pro-russes du Donbass. Des tensions opposent le Corps des volontaires ukrainiens aux autorités jusqu’à son intégration difficile au sein des forces armées régulières ». En 2022, ceux qui étaient considérés avec suspicion en 2016, deviennent des héros, les épouses des combattants de d’Azov (un groupe responsable des assassinats cruels des russes au Donbass) rencontrent le pape a Vatican. Il est très étrange de constater que quelque chose qui semblait interdit il y a seulement deux ans est devenu courant en Europe. Ou la réunion de BHL avec l’ancien chef du bataillon rusophobe et xenophobe radical Aydar (une organisation terroriste interdite en Russie) Marchenko. Aujourd’hui, le libéralisme va de pair avec la xénophobie et le nazisme. C’est un paradoxe. Mais cela peut s’expliquer si l’on comprend la « nature totalitaire » du libéralisme moderne[4]. Il s’agit du sujet de la manipulation des informations et des chiffres.

Quant à la réaction des Russes, la majorité écrasante soutient l’opération militaire spéciale. À leurs yeux, il s’agit d’une défense compréhensible des intérêts géopolitiques de la Russie et d’une lutte contre la russophobie, car un régime s’est formé à Kiev qui dénie aux Russes le droit à l’autodétermination (langue, culture, identité) et à l’existence. Certains éléments de la société ont immédiatement quitté le pays après le déclenchement des hostilités – ils sont partis aux États-Unis, en Europe et en Israël. Fait révélateur, Anatoly Chubais, ancien chef de l’administration présidentielle russe et l’un des idéologues et dirigeants des réformes économiques en Russie dans les années 1990 a quitté le pays. Dans les années 1990, le Front patriotique l’a qualifié de « traître » et de responsable des difficultés économiques de la Russie. C’est symbolique. Il existe de tels cas, c’est certain.

Tous les membres de mon entourage soutiennent l’opération militaire spéciale non seulement en paroles, mais aussi, pour beaucoup, en actes, en apportant une aide humanitaire aux réfugiés et à la région[5]. De plus, ils ne le font pas depuis ces derniers mois, mais depuis de nombreuses années. Les mêmes huit années que l’Occident connaissait si peu. 

 

Breizh-info.com : En tant que journaliste, que pensez-vous de la censure de RT dans l’Union Européenne ou de Sputnik, et du silence (voir de l’approbation) d’une majorité de journalistes européens ?

Daria Douguine : Il s’agit d’un cas sans précédent de violation de « La liberté d’expression ». La liberté d’expression implique la possibilité de points de vue différents, parfois peu agréables pour les autorités. RT et Sputnik n’étaient pas des instruments de propagande russe, mais des plateformes de discussion. J’ai regardé de nombreux programmes de RT France et ils étaient intéressants car ils incluaient des experts ayant un point de vue alternatif à celui des médias du système. Le fait que les journalistes en Europe n’aient pas réagi de quelque manière que ce soit à ces blocages montre la nature « totalitaire » de l’ensemble du monde médiatique occidental. C’est très triste. Espérons que les médias de la réinformation resteront actives et vont prolonger détruire le bloc de désinformation.

Breizh-info.com : En France, les conséquences économiques se font déjà ressentir (hausse des prix de l’essence notamment). Comment un engrenage infernal serait encore évitable ?

Daria Douguine : Les sanctions anti-russes commencent à rendre exsangue l’économie européenne. Le Pen, lors du débat avec Macron, les a qualifiés à juste titre de « harakiri » pour l’économie française. Mais réfléchissons, qui a besoin d’une Europe affaiblie ? Affligée après le COVID, affaiblie par les sanctions anti-russes, l’Europe devra concentrer toutes ses forces sur la question du sauvetage de sa propre économie, dans une telle situation les bénéficiaires sont les USA, qui parviennent à établir leur contrôle sur le continent. Un Rimland indépendant est inacceptable pour la civilisation anglo-saxonne, le sentiment anti-américain et anti-OTAN croissant (en France, remarquez, Mélenchon, Le Pen, Zemmour et de nombreux autres candidats ont activement critiqué l’appartenance de la France à l’OTAN et ont appelé à un scénario presque gaulliste de 1966) est une menace pour la domination mondiale des États-Unis. Par conséquent, l’idée de sanctions anti-russes a été mise en œuvre dans le but intéressé d’affaiblir la région. Les élites de l’UE ont agi comme des intermédiaires, des mandataires des mondialistes dans cette entreprise, et ont porté un coup au bien-être des peuples et des populations européennes.

Breizh-info.com : Le mot de la fin ?

Daria Douguine : Je demande instamment à tous les lecteurs de faire preuve d’esprit critique et de remettre en question les rapports publiés par les médias. Si les élites libérales occidentales insistent tant pour soutenir Kiev et diaboliser Moscou, c’est qu’il y a une logique de bénéfice derrière tout cela. Il faut tout remettre en question. Il s’agit d’un principe important qui nous permet de garder un regard sobre. Dans une société du spectacle, de la propagande et de la nature totalitaire des systèmes occidentaux, le doute est une étape fondamentale pour sortir de la caverne… 

 

D’après le site Breizh-info.com

Dans l'interview ci-après, elle parle entre autre chose de la France où elle a fait une partie de ses études.



[1] Nous avons corrigé quelques fautes de traduction. Note In girum imus

[2] Il va de soi que si ce moment s’achève sans avoir été complet, c’est bien qu’il a échoué par rapport à ses promesses. Note In girum imus

[3] On peut reprocher gentiment à Daria de mettre sur le même plan Victoria Nuland qui a été en charge de la politique de déstabilisation de l’Ukraine et notamment du coup d’Etat de l’euroMaïdan, avec un personnage sans dimension comme Bernard Henry-Levy. Note In girum imus

[4] On pourrait ajouter que cet autoritarisme est la contrepartie de l’échec politique et économique du néo-libéralisme. Note In girum imus

[5] Dans la presse occidentale on parle des réfugiés ukrainiens en Occident qui fuient la guerre, mais on ne parle pas des réfugiés qui ont la nationalité ukrainienne et qui fuient vers la Russie, ils sont pourtant nombreux. Note In girum imus.

Henri Barbusse, Le feu, journal d’une escouade, Flammarion, 1916

  C’est non seulement l’ouvrage de Barbusse le plus célèbre, mais c’est aussi l’ouvrage le plus célèbre sur la guerre – ou le carnage – de...