dimanche 16 juillet 2023

À Aix-en-Provence la mauvaise saison bat son plein

  

L’horrible HLM flottant arrivant à Marseille 

Le tourisme est la face hideuse de la marchandisation du monde. Pour bien combattre cette plaie de l’humanité, il faut bien le comprendre dans toutes ses dimensions, économique, esthétique, environnementale et sociale. Commençons par un extrait du plus beau poème de Baudelaire, ennemi féroce du moderne, Le voyage :

Pour l’enfant, amoureux de cartes et d’estampes,

L’univers est égal à son vaste appétit.

Ah ! que le monde est grand à la clarté des lampes !

Aux yeux du souvenir que le monde est petit !

[…]

Singulière fortune où le but se déplace,

Et, n’étant nulle part, peut être n’importe où !

Où l’Homme, dont jamais l’espérance n’est lasse,

Pour trouver le repos court toujours comme un fou !

Étant provençal de par mes racines depuis le début du XIVème siècle, vous comprendrez bien que j’en souffre donc depuis très longtemps de ce fléau, avant même que d’être né. Mais je dois bien reconnaitre que le mal s’est aggravé au fil des années, et d’ailleurs la révolte contre le tourisme commence à prendre forme. Les touristes dans leur stupidité maladive ont détruit Venise, Rome, Athènes et l’Acropole est menacée d’effondrement et aussi Paris où il n’y a plus de parisiens. Les habitants de Barcelone ou d’Amsterdam commencent à se mobiliser, les Corses conscients de la beauté de leur île protestent contre les bateaux de croisière gigantesques[1]. Le Monde a même fait des articles sur le « surtourisme »[2], il le fait à sa manière sournoise, c’est-à-dire en n'attaquant pas le problème sur le fond. À Douarnenez, samedi 6 mai 2023, plusieurs dizaines de manifestants ont empêché des touristes de débarquer de leur bateau de croisière. Ces militants dénoncent notamment le tourisme de masse et ses conséquences néfastes sur l’environnement[3]. A Marseille aussi on a protesté contre ces navires qui polluent et qui accroissent significativement la laideur de la ville[4]. Des actions similaires ont eu lieu un peu partout dans le monde au nom du droit de se déplacer et de visiter ce qu’on veut. Les critiques portent sur trois points :

d’abord la pollution, les statistiques disent que 10% de la pollution mondiale est due au tourisme de masse, il faut savoir que les navires de croisières circulant en Méditerranée polluent tout autant que la totalité des voitures thermiques dans toute l’Europe. Ces navires qui débarquent leur cargaison à Marseille polluent autant que toute la circulation de la métropole marseillaise[5], mais si on passe son temps à taper dessus les automobilistes comme pollueurs quasi-criminels, on évite de contraindre ces navires à quoi que ce soit parce que on considère que cette fantaisie crée des emplois, même si elle ne crée pas de richesse ;

ensuite, il y a que c’est laid et pollue la vision du paysage, les navires géants, comme on le voit ci-dessous dégradent la ville qu’on prétend visiter. C’est un cauchemar ; 

L’horreur à Venise 

­enfin par leur présence les touristes obligent les villes visitées à se transformer en des zones sans caractère particulier, aseptisées, desquelles toute la dimension humaine et historique a disparu. Partout ce sont les mêmes éléments de mobilier urbain, de zones piétonnes et de souvenirs made in China. Quand on va à Venise, il est clair qu’on ne rencontra pas de Vénitiens, mais d’abord essentiellement des touristes qui ne savent pas par quel bout prendre la ville, et puis des domestiques souvent issus d’une immigration récente.

Le touriste en général n’a rien à faire dans les lieux qu’il visite, il ne consomme que des choses mortes, pire, des images de choses mortes. Tel monument, telle fontaine, images qu’il pourrait trouver en mieux d’ailleurs sur Internet en restant chez lui, au frais. Ce qui leur permettrait d’économiser de l’argent – mais ils en ont de trop – et surtout de ne pas emmerder les habitants des lieux qu’il traverse. Mais justement le plaisir du touriste, derrière la fable stupide d’un enrichissement culturel, c’est de porter préjudice aux habitants des lieux qu’il visite. Avec arrogance les touristes prétendent qu’on a besoin de leur argent pour vivre. Même les touristes pauvres quand ils voyagent se comportent de la même manière, l’argent fait d’eux les maîtres. Ce qui expliquent que les Français qui ont malgré tout une tradition révolutionnaire et qui n’aiment pas être considérés comme des domestiques, manifestent de l’impolitesse avec eux[6]. Cette impolitesse que déplore régulièrement le ministre du tourisme est en réalité une réaction saine contre la marchandisation du monde. 

Avant de mourir les vieux touristes américains veulent manger des calissons du Roy René 

Mais revenons à notre sujet et à la ville où je vis. À Aix-en-Provence le mal est plus discret, mais la laideur est là, dans les rues de la vieille ville que les maires successifs ont transformé en une sorte de centre commercial hideux sous la houlette d’aménageurs urbains – catégorie de la population qui devrait être pendue dans son entier pour les crimes qu’elle a commis contre la mémoire et contre la culture. Voilà donc nos touristes qui arrivent en troupeaux, mal habillés, sentant mauvais, transpirant, bien encadré par leurs bergers. Ils ont navigué à l’intérieur d’HLM flottants immondes et répugnants. On les appelle des croisiéristes. C’est chic, ça fait moderne, ça donne du lustre à une transhumance qui se passe toujours dans de mauvaises conditions, avec une promiscuité désagréable, une cuisine de mauvaise qualité et des vomissements à cause du mal de mer. Au fond que les touristes acceptent cette place des moutons qui filent vers l’abattoir, c’est comme un long couloir qui les mènera au cimetière. Ils sont très âgés marchent avec difficulté. On les débarque à Marseille. Le temps leur est compté. On les pousse dans des bus qui roulent avec du diesel, climatisés, histoire qu’ils attrapent au plus vite la mort qui tue, puis ils se tapent une heure d’autoroute au milieu des encombrements de la circulation. Les voilà arrivés au boulevard Aristide Briand, soit sur le boulevard de ceinture de la vieille ville où la circulation est intense. On les débarque en les pressant, une gardienne du troupeau – ils sont badgés pour pas qu’on les perde – arrive avec son bâton de pèlerin, et le troupeau se met en route. Le circuit sera assez court, ils sont âgés n’est-ce pas et marchent difficilement, pliés en deux, ou le ventre en avant. Ils descendent donc la rue Jacques-de-La-Roque, s’arrête une minute pour prendre la photo de la cathédrale avec deux blablablas du guide, puis une autre minute devant l’Archevêché. Encore une photo, voire un selfie pour les plus bouffons. Vers le bas de la rue Saporta, ils s’arrêtent pour s’acheter des gourmandises, des calissons ou du nougat, les vieux aiment bien les sucreries, quoi que cela ne les rende pas plus aimables pour autant, ils marchandent pour tout et pour rien, comme ça pour emmerder. Les plus hardis achèteront de la lavande et des cartes postales pour bien montrer qu’ils y étaient. Et on repart dans la sens de la descente, on arrive sur la place de la mairie, encore une photo du beffroi, et c’est presque terminé. Les petits vieux vont attaquer la remontée. C’est plus compliqué, parce qu’ils soufflent, parce qu’en plus ils gênent et se font bouger, mais la plupart y arrivent. Les voilà devant leur bus, le chauffeur a hâte de les redébarquer à Marseille, parce qu’il n’a pas que ça à faire, et que peut-être il fera une autre fournée. La visite d’Aix-en-Provence, si je ne compte pas le voyage en bus qui pue, aura duré à peu près une demi-heure. Et maintenant on va renfermer ces touristes dans leur cage flottante, une nouvelle destination « de rêve » les attend, Gênes ou Barcelone ou Palerme. Durant la croisière ils auront vu principalement deux choses, des touristes comme eux, et la mer. C’est misérable, c’est vrai, mais ils méritent ce mauvais traitement. 

Dans la rue Gaston de Saporta le flot de vieux touristes est incessant 

Ce défilé ininterrompu est indécent. Il plombe totalement l’esthétique de la vieille ville. Le troupeau n’a aucune tenue, ils s’habillent comme ils n’oseraient pas le faire chez eux. Montrant leurs chaussettes sales à travers leurs sandales en plastiques, ils montrent leurs bedaines qui débordent au-dessus de leurs pantalons courts, donnant à la cité une idée de ce que pouvait être la Cour des Miracles à l’époque de Louis XI. On les reconnait à la hideur des couleurs de leurs accoutrements. Leurs shorts, leurs robes, leurs tricots semblent avoir servi de serpillère dans des temps lointains. Ayant perdu depuis longtemps le goût du beau, ils nous en font profiter jusqu’à l’écœurement. 

Les affreux touristes sur le boulevard Aristide Briand 

Mais ces encombrants visiteurs ne sont pas seulement vêtus laidement, ils sont aussi laids. Et cette laideur n’est pas seulement le fait de l’âge ils sont laids aussi à l’intérieur d’eux-mêmes et cette laideur est contagieuse pour les populations qu’ils visitent. Manifestant un laisser-aller des plus honteux, les voilà avec leur bidoche qui déborde, leurs vieilles varices, comme des condamnés errant au bout de leur ennui, des chaussettes dans les sandales, des petits sacs crasseux pour mettre leurs emplettes misérables, des souvenirs fabriqués en Chine. Leur face parle pour eux, ils ne sourient jamais montrant combien finalement tout cela les ennuie. Comme on les comprend, mais ils ont payé pour en chier et ils doivent aller jusqu’au bout ! Leur manque de dignité apparaît comme une évidence, il le porte en sautoir. C’est un autre exemple de l’Occident décadent dans la mesure où c’est bien l’Occident qui a inventé le tourisme de masse. Cette décadence ne se mesure pas ici avec des turpitudes sexuelles, des excès d’alcool ou de produits stupéfiants, c’est plus sournois, mais plutôt dans le relâchement du corps et de l’esprit. Ils sont ailleurs, ni chez eux, ni ici, un peu à la manière des morts-vivants qui peuplent la planète d’aujourd’hui. Ils transpirent ils baignent dans une odeur aigre encore plus insupportable qu’ils utilisent des déodorants de qualité inférieure. 

Ils s’extasient devant quatre courgettes et une tresse d’aulx 

Les voilà maintenant qui visite le marché de la place Richelm, juste derrière la place de la mairie. Croyant y voir des produits locaux, ils ne se rendent pas compte que la majeure partie de ces fruits et légumes viennent du MIN, le marché de gros de Marseille aux Arnavaux. Ces produits sont rarement « d’ici », ils viennent plutôt de nulle part, d’Espagne ou de Pologne. Mais peu importe, ils ont bien cru y voir un marché provençal ! Qui les détrompera ? Ils regardent les fruits et les légumes, gênent ceux qui cherchent à acheter de quoi manger, du pain, du fromage, le miel est souvent mauvais, réputé local, il est juste un piège à touristes avec le rosé qui va avec. Devant la mairie ils feront semblant d’écouter la traduction d’un discours qui n’a ni queue, ni tête, mais qui se voudrait érudit. Bien sûr ils n’écoutent pas, ça ne les intéresse pas. Ils ne sont pas là pour apprendre quelque chose, mais juste pour dire : « j’y étais ! ». 

Train à touristes encombrant la rue étroite devant la cathédrale 

Mais la pollution touristique est encore aggravée par le petit train qui fait le tour de la ville, celui-là part de la Rotonde, remonte par la rue des Cordeliers jusqu’à la mairie, puis se tape le circuit avec l’Archevêché et la Cathédrale. Le train est long et encombrant, il pue aussi le vieux diesel, bien que cette année on l’ait doublé avec un train électrique. Parfois il y a jusqu’à six wagons enchaînés les uns après les autres qui gênent beaucoup les vrais aixois. Dans ces wagons brinquebalants, les touristes ensommeillés sont ballotés comme de vieux sacs de patates, le casque sur les oreilles pour écouter les commentaires oiseux, ils n’ont à peu près le temps de ne rien voir et paraissent morts dans leur wagonnet ! Ceux qui gardent les yeux ouverts apparaissent ahuris, comme s’ils se demandaient ce qu’ils font à cet endroit particulier du globe terrestre. Ce circuit c’est encore pire que la balade à pied ! L’avantage pour eux est qu’ils ne marchent pas et donc qu’ils transpirent moins. Les simples passants, voire ceux qui s’en vont travailler, sont considérablement gênés par ce train et souvent ils râlent après ce véhicule ignoble. 

Le troupeau devant la mairie 

On nous dit que, malgré les nuisances endurées, tout ça c’est bon pour le commerce et pour l’emploi. C’est complètement faux. Ces touristes ont des oursins dans les poches. Il faut les voir réclamer qu’on leur fasse goûter gratuitement les calissons afin de se flatter d’en avoir mangé, et sans rien débourser. Ce flux incessant et polluant surtout l’été, n'apporte pas de recettes importantes, mais il contribue à « valoriser » la ville, c’est-à-dire essentiellement à faire grimper le prix des loyers et de l’immobilier, repoussant les plus pauvres vers la périphérie. La plupart des commerces qui s’installent à la rue Gaston de Saporta, ou sur la place de la Mairie ne sont pas très florissants, et ferment le plus souvent après quelques mois d’exploitation. Une autre forme de tourisme et de pollution, c’est le Festival d’art lyrique d’Aix-en-Provence. Cette manifestation existe depuis 1948. Mais à l’époque il était organisé par le Casino de la ville qui lui-même existait grâce aux thermes. Aujourd’hui les thermes sont fermés pour cause de manque de rentabilité, ils n’existent encore que sous une forme résiduelle adossé à l’Aquabella et donc au Casino repris par le clan Partouche. Le Festival d’Aix-en-Provence a un budget d’environ 25 millions d’euros, sur cette somme, seulement 4 millions proviennent des recettes et des produits dérivés. Le Festival mange donc plus de vingt millions d’euros de subventions, payées à la fois par la ville, le département, la Région et le ministère de la culture. La clientèle de ce genre de manifestation se divise en deux, ceux qui ont des billets gratuits et qui s’en foutent de l’Opéra mais qui aiment bien les rassemblements huppés, et puis les Parisiens qui croient que c’est distingué que d’aller écouter Mozart revisité par Jacques Séguéla et la mode du WOKE. 

 

Pendant les représentations en plein air, la ville est bouclée par la police, comme pendant une manifestation de Gilets Jaunes ou contre la loi sur les retraites,  ou encore comme le défilé du 14 juillet de Macron sur les Champs Elysées ! C’est une nuisance importante pour les Aixois. Mais si ces représentations qui s’étalent sur une quinzaine de jours, ajoutent au prestige de la ville, sur le plan économique, hôtellerie et restauration ça ne risque pas de couvrir les 21 millions d’euros de subventions, il y a bien quelques mécènes, mais ce n’est pas grand-chose par rapport au budget colossal. Ces subventions sont en vérité un transfert de recettes publiques :

1. Vers les artistes d’Opéra surpayés par rapport à leur valeur de marché c’est-à-dire s’il n’y avait pas de subventions, ça ne va pas durer, on annonce une remise à plat des subvention pour cette ruineuse fantaisie ;

2. Vers les chasseurs de subventions qui vivent d’elles à travers des associations diverses et variées du genre Les Amis du Festival d’Aix-en-Provence ;

3. Mais aussi vers les riches amateurs d’Opéra qui ne payent qu’environ 15% du prix de leur billet… quand ils le payent bien entendu.

Des économistes ont calculé que le festival d’Aix-en-Provence c’était un coefficient multiplicateur de 10 ! Autrement dit que 1 € de subvention générait 10 € d’activité économique. Pour démontrer cela, ils ont avancé par exemple que les spectacles coûteux montés par le festival se revendaient dans un partenariat avec d’autres institutions comme avec le Bolchoï ! C’est oublié que le Bolchoï est exactement dans la même quête de liquidités que le Festival d’Aix-en-Provence et donc que ces échanges sont à somme nulle. Qu’on les défende ou non, les subventions publiques aux festivals en Provence sont à fonds perdus. 

 

Soyons juste tout n’est pas mauvais dans le tourisme. Ainsi les vignerons provençaux, grâce aux Parisiens et à leur absence de palais, se débarrassent tous les étés d’un stock de rosé complètement imbuvable que les Provençaux véritables n’oseraient même pas utiliser pour déboucher leur évier. Mais en contrepartie quels dégâts ! Ils assurent aussi le chiffre des mauvais restaurants de la place des Cardeurs, une place qui étaient peuplée d’artisans il n’y a pas si longtemps, et qui est devenue une horreur urbanistique, si bien qu’il n’y a presque plus que des restaurants pour Parisiens et touristes allemands dans notre ville, aussi chers que dégueulasses. 

La place des Cardeurs et ses restaurants à touristes

Mais à Aix on sait aussi s'amuser. Par exemple, en novembre dernier on faisait une course contre le cancer de la prostate ! Comme on le voit cette fantaisie était richement sponsorisée, devant cette pluie de subventions, on alliait le sérieux de la lutte contre le cancer, un marronnier qui permet de récolter beaucoup d'argent parce que le cancer ça fait peur, avec la bonne humeur programmée. A Aix-en-Provence on devait courir pour cela avec une moustache ! N'était-ce pas drôle ? Je vois ça depuis des décennies des associations qui brassent du vent pour ramener de l'argent. Un peu comme le fonds Marianne, ce n'est pas nouveau. On se souvient du scandale de l'ARC à la fin des années quatre-vingt-dix, et plus récemment celui de la Ligue contre le Cancer, des boutiques qui dépensent sans compter et qui n'affectent que des faibles parties de leurs recettes dues à la charité publique à la recherche contre le cancer. C'est une vieille histoire.




[1] https://www.leparisien.fr/corse-du-sud-2a/des-bateaux-de-croisiere-geants-juges-indesirables-a-ajaccio-10-09-2022-G2OGPEFSVFHYVI6YM37VDF7GH4.php

[2] https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/06/18/le-surtourisme-un-defi-pour-la-france_6178210_3234.html

[3] https://www.francetvinfo.fr/monde/environnement/crise-climatique/empreinte-carbone/transports/environnement-une-operation-anti-paquebots-de-croisiere-en-bretagne_5812502.html

[4] https://www.lefigaro.fr/social/le-paquebot-geant-wonder-of-the-seas-brievement-empeche-d-entrer-a-marseille-20220614

[5] https://www.20minutes.fr/planete/4041461-20230615-marseille-faut-comparer-pollution-bateaux-croisiere-celle-voitures#:~:text=Selon%20une%20%C3%A9tude%20de%20l,voitures%20immatricul%C3%A9es%20dans%20la%20ville%20%C2%BB.

[6] https://www.bfmtv.com/societe/les-francais-les-plus-impolis-du-monde_AN-201204160036.html

mercredi 12 juillet 2023

Crise au Journal du Dimanche

 

La « gauche » qui n’a pas d’idée s’occupe principalement et à contretemps de ce qui ne la regarde pas. La voici donc embarquée stupidement dans un soutien à la rédaction du Journal du Dimanche qui s’est mise en grève au motif que Vincent Bolloré, le milliardaire qui va remplacer Arnaud Lagardère comme propriétaire de ce torchon veut embaucher Geoffroy Lejeune comme rédacteur en chef. Celui-ci s’est fait virer de Valeurs actuelles pour avoir soutenu le petit combinard Éric Zemmour. Ce choix lui a été reproché non pas parce que Zemmour serait ceci ou cela, mais parce que ce soutien a entraîné une chute des ventes de cet hebdomadaire. Cette rébellion qui ressemble un peu à celle de Prigojine tant elle est vouée à l’échec, pose plusieurs problèmes. Écartons cette idée selon laquelle Arnaud Lagardère aurait pris cette décision tout seul, indépendamment de l’avis de Bolloré, et rappelons que cette nomination est cohérente avec l’orientation de la chaîne CNews qui appartient aussi à Bolloré. Mais qu’en réalité la question n’est pas là. D’abord parce que le JDD a toujours été un journal pourri, faire semblant de le découvrir à la mi 2023 relève de la cuistrerie. Macronien de droite de la première heure, Bolloré coche toutes les cases de la propagande patronale merdeuse. Il soutient les combines des laboratoires pour les vaccins, il crache sur les Gilets Jaunes et il est un fervent défenseur de la réforme des retraites. Les journalistes qui se rebellent contre leur propriétaire ont donc toujours soutenu une ligne de droite extrême. Mais les voilà qu’ils ne supportent pas Geoffroy Lejeune, comme si Vincent Bolloré, le patron, n’avait pas le droit de nommer qui il veut à la tête de « son » journal. Le scandale n’est pas dans la nomination de Geoffroy le jeune, mais plutôt dans le fait que la plupart des médias dominants, pour ne pas dire tous, appartiennent à une petite caste de milliardaires quand ils ne sont pas inféodés à l’Élysée. Ce journal est un instrument de propagande contre le syndicalisme actif depuis longtemps, et travaille pour une alliance MEDEF-CFDT. Mais cela ne gêne pas la gauche boboïde qui soutient cette rédaction très marquée « droite extrême ». 

 

La seconde réflexion est celle-ci : on veut empêcher que le JDD devienne un journal au service des idées d’extrême-droite. Cette motivation appelle deux remarques. La première c’est qu’on ne sait pas quelle est la définition de l’extrême-droite qui est retenue, le racisme, la dictature, la répression policière des manifestants. Ce que ces gens-là appellent extrême droite ne me parait pas plus dangereux que Macron et son gang qui ont installé une sorte de dictature dans la France d’aujourd’hui, bafouant à peu près toutes les libertés formelles, de celle de débattre à l’Assemblée à celle de manifester ou d’organiser un référendum sur la réforme des retraites. Ensuite on peut se demander au nom de quoi on interdirait à « l’extrême droite » de s’exprimer dans un organe de presse. Normalement en « démocratie » la liberté d’expression est un droit, consolidé d’ailleurs dans la Charte des Droits de l’Homme, validée par l’ONU. La tribune que la gauche boboïde a signée dans Le Monde, balance entre la nécessité d’interdire Bolloré de choisir son rédacteur en chef, et celle d’interdire que ce journal face de la place aux idées qui ne sont pas macroniennes, ou plutôt qui sont l’expression d’un macronisme de droite. C’est évidemment une posture hypocrite qui vise en réalité deux buts, démontrer que le fascisme existe bien et que c’est une nécessité que de le combattre – comme si Macron était un pis-aller – et ensuite conforter le pouvoir d’une poignée de journalistes bourgeois qui veulent croire à leur importance, mais qui sentent leur magistère contesté. 

 

La première tribune publiée dans Le Monde rameute le ban et l’arrière-ban de la gauche du PS, les vieux débris Lionel Jospin, Martine Aubry et Bernard Cazeneuve, des petits magouilleurs macroniens comme Martin Hirsch, avec en prime Yannick Noha ! Elle défend le point de vue d’une liberté d’expression restreinte à ce qui ne dérange pas cette gauche de type Terra Nova. Que le JDD déverse à longueur d’année ses aigreurs d’estomac sur les Gilets Jaunes et sur les manifestants, c’est très bien, qu’on mette Geoffroy Lejeune pour faire ce même travail, c’est mal ! On regrette que Ruffin ait signé ce genre de débilité. Mais il y a une autre tribune qui cette fois souligne que les journalistes ont le droit de choisir leur rédacteur en chef ! Diantre ! Cela équivaudrait à enlever à son propriétaire le droit de choisir sa ligne éditoriale, chose que ces journalistes habitués à ramper et à mentir n’ont jamais fait auparavant. Mais dans ce cas-là, on ne voit pas pourquoi des milliardaires achèteraient un journal qui ne rapporte rien d’autre de pouvoir peser politiquement. Preuve que Le Monde est en campagne contre Geoffroy Lejeune, il y a aussi dans la même édition datée du 28 juin, un édito qui fait la synthèse des deux. Dire que les journalistes ont le droit de choisir leur rédacteur en chef c’est remettre en question le droit de propriété, c’est comme dire que les employés de Carrefour ont le droit de choisir leur PDG. C’est la première étape vers le socialisme, et ce n’est pas compatible avec le droit français actuel !

  

Cette seconde tribune est signée des pétitionnaires habituels, la clownesque Annie Ernaux, ou l’ancienne ministre de Macron Françoise Nyssen ou encore le macronien repenti Pierre Rosanvallon. On y trouve également le ridicule Marc Lazar qui passe son temps par ailleurs à casser du sucre sur le dos des Gilets Jaunes et de tous ceux qui revendiquent une démocratie directe. Cette idée d’indépendance des journalistes n’a pas de sens, simplement parce que si ce principe est admis, on se demande sur quelle base et par qui les journalistes « indépendants » seront recrutés. Cette tribune semble vouloir nous faire croire qu’il pourrait y avoir des journalistes honnêtes en matière politique. Je veux bien admettre que des journalistes qui enquêtent sur le terrain, qui s’occupent de sport ou de culture puissent conserver leur « indépendance », mais je n’y croit pas une seule minute en ce qui concerne les sujets importants, les élections, les vaccins, la Guerre en Ukraine, l’économie, l’Europe ou les retraites. La raison est très simple, ils sont formés dans des écoles de journalisme et ce qu’on leur enseigne n’est compatible qu’avec le modèle mondialiste et libéral. On ne voit pas en quoi Bolloré serait pire que Bernard Arnault ou Patrick Drahi. C’est la même canaille, en vérité cette hiérarchisation des risques est là pour nous faire admettre que de lutter contre un fascisme imaginaire, c’est plus constructif que de lutter sur celui qui existe maintenant. Réclamer l'indépendance des journalistes sans lutter contre la propriété privée des moyens de communication frise l'imbécillité.

 

Tempête dans un verre d’eau, cette histoire ne veut rien dire et la gauche qui ferait mieux de préparer une manifestation contre la venue de Stoltenberg à Paris perd son temps dans des querelles oiseuses, elle ferait mieux de se poser la question : pourquoi il n’y a plus de presse de gauche ? S’exciter sur une affaire qui n’existe pas et qui en outre laisse croire que les journalistes du JDD sont des journalistes honnêtes et sérieux est de la fumisterie.

vendredi 7 juillet 2023

Les responsabilités dans la mort de Nahel

   

« Mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde. »  Albert Camus[1]

Manifestement, le gouvernement ne sait pas quoi faire, en dehors du sempiternel slogan de restaurer l’ordre. Macron a montré son désarroi, ne comprenant pas ce qui se passait, il n’avait rien de sérieux à proposer, ses ministres étaient tout autant que lui la tête dans le cul. C’était visible à chaque intervention d’un membre du gouvernement, l’ignoble Borne, appuyée par les plumitifs du Monde, en a profité pour s’attaquer à Mélenchon, je n’aime pas Mélenchon, mais il n’est en rien responsable de cette situation de guerre civile. Les habitants des ghettos savent peut-être qui il est, mais ils ne l’écouteront jamais, surtout pour un appel à la révolte ou pour un appel au calme. Croire que sa parole aurait un poids dans les « quartiers », relève de l’imbécillité et de la malveillance. Le décès de Nahel M. comme on l’appelle dans les journaux a été compris en trois temps : d’abord le fait qu’un policier qui manifestement n‘avait pas ses nerfs tire sur un jeune apprenti délinquant de banlieue. L’émotion a été énorme bien entendu, et peu se sont réjouis de sa mort. Ensuite on a essayé de tenter de dire qu’au fond le policier n’était pas coupable, que ce Nahel M. n’avait qu’à s’arrêter que peut-être il avait tenté de rouler sur le policier. Enfin il y a eu l’insurrection des quartiers où sont stockés les immigrés et les descendants d’immigrés, avec le feu et les pillages. Là l’opinion s’est retournée, un récent sondage Ifop souligne que 57% de la population gardent leur confiance dans les forces de l’ordre, consécutivement aux pillages[2]. Ce qui veut dire deux choses, d’abord que les exactions des jeunes des ghettos ont fait passer au second plan celles de la police qui sont pourtant bien documentées depuis la crise des Gilets Jaunes en 2018. Ensuite que la majorité du peuple français considère que l’immigration et ses descendances c’est un problème sérieux pour le pays. Contrairement à ce qui s’était passé en 2005, les émeutes consécutives à la mort de Nahel n’étaient plus concentrées dans la région parisienne et les grandes villes française, mais elles ont été réparties sur tout le territoire, avec une explosion dans l’Ouest de la France, territoire où d’ailleurs les manifestations contre la réforme des retraites avaient pris une tournure insurrectionnelle. Il est donc évident que « le mal » s’est étendu en quelques années sur le plan géographique. Ce qui va rendre de plus en plus difficile le maintien de l’ordre au fur et à mesure que les émeutiers se rendent comptent de leur puissance « politique ». Ils savent qu’ils ont pour eux la mobilité, la jeunesse, le nombre, et que la répression d’un tel mouvement est bien plus compliquée que celle des manifestations syndicales traditionnelles où on annonce à l’avance où on sera et ce qu’on va faire. Cette généralisation de l’émeute à tout le territoire français est la nouveauté de ces derniers jours. La mort de Nahel a été le déclencheur, cela aurait pu être tout autre chose, le terrain était prêt. 

Source Le Monde 

On remarque que les violences liées au mouvement des Gilets Jaunes ou aux manifestations des retraites étaient relativement admises, contrairement à celles qui sont en rapport avec l’immigration et sa descendance. Autrement dit quand les Gilets Jaunes se rebellent ou quand on manifeste contre la réforme des retraites, on y voit le peuple français qui s’oppose au tyran Macron. Quand ce sont les jeunes des ghettos, on y voit les prémices d’une guerre civile, un danger pour la France. Christophe Guilluy dans un article du 6 juillet 2023 publié dans Marianne soulignait que les banlieues ne se résumaient pas aux jeunes révoltés ou aux trafiquants de drogue, c’est exact. Certains arrivent à s’en échapper, mais ils sont rapidement remplacés par de nouveaux venus, et cela reste des ghettos avec trois caractéristiques : un taux de chômage élevé, un sous-équipement en services publics, notamment éducatifs, flagrant et enfin une sur-délinquance. Mais il est évident aussi que la mort de Nahel n’a été que le prétexte de la révolte. Il y a donc bel et bien une situation qu’à la base on a laissé pourrir, Macron a de lourdes responsabilités quand il avait fait le malin en appelant Jean-Louis Borloo à la rescousse pour construire une sorte de politique de la ville rénovée, et qu’ensuite il avait congédié sèchement. Je ne suis pas certain que ce plan ait été suffisant pour éviter le pire, mais il est clair que Macron l’a mis à la poubelle, sans avoir rien d’autre à proposer, en s’en foutant complétement, démontrant une fois de plus que cet individu n’apprend rien, et que les pistes qu’il avance ne sont que des éléments de langage de communicant[3]. 

 

En 2015, Le Journal Du Dimanche publiait une carte des « ghettos », listant « les zones à problèmes »[4]. Pour une fois on nommait clairement ce que sont ces zones que Le Monde appelle pudiquement « les quartiers ». En France on répugne à parler de « ghettos », parce que cela rappelle par trop la situation pourrie des grandes villes américaines où l’embrasement est régulier sur fond de guerres ethniques, voir la récente affaire George Floyd, situation qui est le résultat d’un multiculturalisme délétère. Voilà ce qu’écrivait alors le JDD : « Dans ces quartiers, une personne sur deux vit avec 900 euros par mois. Le taux de chômage y est de 23% – contre 9,7% au niveau national – et culmine à 45% chez les moins de 25 ans, malgré les emplois aidés. » Ce sont des chiffres, des moyennes qui masquent en réalité des disparités énormes. Si à Marseille on prend des cités comme La Busserine ou La Castellane, le taux de chômage doit être plutôt suéprieur à 50%. Il est clair que la misère de ces ghettos, alliée à la pression religieuse sont des facteurs de sécession d'un nombre croissant de territoires de la République. L’étonnant n’est pas dans l’irruption de ces émeutes, mais plutôt dans le fait qu’elles n’aient pas eu lieu avant. Que Macron et son gang se soient déclarés surpris de cette irruption violente, montre à quel point ces gens non seulement sont déconnectés, mais aussi leur faiblesse intellectuelle. Que ce soit dans la dimension sécuritaire, économique et politique, il est clair qu’ils portent une responsabilité énorme, même si ces problèmes des ghettos n’ont pas été créés par Macron lui-même, ils ont été clairement aggravés pour deux raisons : le sabotage continuel de la protection sociale, le sabotage d’une politique du logement social, et ensuite cette tentation de s’en remettre au pouvoir de la police pour continuer le pillage et le démembrement de la France. Le 5 juillet Le Monde annonçait deux mesures envisagées par l’exécutif : d’abord un flyer produit et distribué par Dupont-Moretti pour rappeler aux parents leur devoir de serrer la vis à leurs rejetons turbulents[5]. C’est risible d’impuissance et de stupidité, sans doute une idée vendue par McKinsey. Et puis voilà Macron qui après avoir fustigé les jeux vidéo comme déclencheur de la violence sociale, a envisagé de couper les réseaux sociaux pendant les émeutes[6] ! 

 

Une obscure sociologue explique benoîtement dans Le Monde que tout ça, c’est la faute d’une mauvaise éducation des garçons qui sont trop imprégnés des valeurs viriles, donc on devrait leur faire de la danse plutôt que du football[7] ! Peut-être veut-elle les mettre de force dans des camps de rééducation repeints en rose ? Toute solution dès lors qu’elle est farfelue et stupide, a droit de citer dans Le Monde ! Ces ébullitions périodiques seraient donc le résultat du patriarcat qui, ayant déserté les couches moyennes, mieux dressées à obéir, se réfugie maintenant chez les pauvres ! Également dans le genre farfelu, Macron a avancé qu’il réfléchissait – comme si réfléchir était à sa portée – à la possibilité de couper les allocations familiales aux parents des délinquants encore mineurs, comme si les parents de ces mineurs en déshérence, accablés de tous les maux, avaient la possibilité de restaurer un semblant d’ordre dans leur famille. L’idée de Macron, est un chose impossible sans une refonte complète de la loi, puisque ça voudrait dire que les allocations familiales sont distribuées sur des critères discriminatoires, mais ça lui permet de se rapprocher électoralement de la droite type Les Républicains ou des zemmouristes. C’est bien dans sa manière fascisante que de croire qu’en cassant le thermomètre la fièvre s’éteindra et qu’ayant peur de perdre les allocs, les parents fracasseront de coups leur progéniture pour la faire rentrer dans le droit chemin. Mais on voit qu’en réalité ce pitre de Macron pense déjà au coup d’après, et il va prendre prétexte de ces émeutes impopulaires pour accentuer la répression de tous les mouvements de contestation. Cette façon désinvolte de répondre à la crise sociale par des décisions ubuesques ou par une restriction renforcée des libertés, est la marque d’un régime à l’agonie. Après moi le déluge, disait Louis XV dans une citation apocryphe. C’est la position de la canaille qui traficote dans les coulisses du pouvoir, avec comme principe moral Prends l’oseille et tire-toi. Dans le tableau suivant, dressé par l’INSEE, avec des chiffres discutables, difficiles à vérifier, on se rend compte tout de même que le nombre d’immigrés en pourcentage de la population comme en volume s’est considérablement accru ces dernières années. Cette évidence nourrit d’ailleurs l’hypothèse de grand remplacement que nient comme ils peuvent des gens comme Hervé Le Bras[8] ou François Héran avec des discours tarabiscotés et incompréhensibles destinés à éduquer le peuple de façon à ce qu’il tolère l’intolérable. 

Source Insee[9] 

D’une manière mécanique la pression de l’immigration a fait exploser les ghettos, sans que les moyens pour améliorer l’intégration aient augmenté en conséquence, c’est même le contraire, alors que le nombre d’immigrés s’accroit de manière régulière depuis que Macron est au pouvoir, le nombre de mises en chantier de logements sociaux n’a fait que diminuer. A tout le moins depuis 2017 le gouvernement a fait volontairement des économies de ce côté-là. Or ce gouvernement ouvertement immigrationniste, comme tous les européistes, ne se donne pas les moyens d’accueillir les immigrés et leur descendance dans de bonnes conditions.  C’est d’autant plus vrai que les migrants ressortissant du statut du regroupement familial sont de plus en plus nombreux. Le tiers des habitants de la Seine-Saint-Denis sont des immigrés ou assimilés. Or cette population est « naturellement » plus pauvre que la moyenne, et la difficulté de se loger, notamment dans les grandes villes, ajoute à la consolidation des ghettos. Autrement dit, les ghettos ont été construits sciemment depuis une soixantaine d’années, alimentant les fractures sociales comme on dit et séparant les communautés les unes des autres. Cette mécanique a été aggravée récemment et cyniquement par le gang Macron, avec l’illusion qu’on pouvait très bien couper les aides à ces « quartiers », et que le marché pourvoirait à la pénurie de travail. Les émeutiers sont principalement des très jeunes gens, ce qui veut dire qu’ils sont encore scolarisés et que le marché du travail ne les intéresse pas. Dans ces conditions plus que difficiles, on se pose la question d’une « politique de la ville »[10]. Certes celle-ci peut être utile pour améliorer l’offre de logement sociaux ou les réseaux de transports urbains. Mais au-delà il est clair qu’il manque de vrais emplois, environ 8 millions selon moi, et puis  qu’il n’y a pas de volonté de mixité sociale des populations. Chaque fois qu’on a commencé à mélanger les populations d’origine française ou européennes avec celles qui sont issues d’Afrique, cela a abouti rapidement à ce que les premiers abandonnent le terrain aux seconds, c’est l’échec du fameux « vivre ensemble ». Les Français plus ou moins de souche ne veulent pas mettre leurs enfants dans l’école publique des quartiers périphériques parce que cette mixite ne leur plait pas, ils ne la désirent pas, nourris par l’expérience, ils la craignent. Au fil des ans les résidences où les logements sociaux sont construits, n’accueillent plus que des immigrés ou des descendants d’immigrés à l’exclusion quasi systématique des Français dits de souche. Il y a donc dans la formation des ghettos, au-delà des problèmes d’emploi, une dimension culturelle qui échappe le plus souvent aux sociologues qui rabattent ce phénomène sur un racisme ordinaire qui serait propagé par la droite, le gouvernement et l’extrême-droite. Mais enfin, si les communautés différentes pouvaient cohabiter sans problème, on ne voit pas pourquoi les Français dits de souche abandonnerait le terrain pour suivre simplement une directive raciste. Ils s’en vont parce qu’ils ne veulent pas vivre dans un climat d’hostilité permanent et pas pour des questions d’idéologie. Il serait bon que les sociologues reviennent à une vision matérialiste de ce qu’ils étudient : ils préfèrent faire des sacrifices financiers plutôt que d’élever leurs gosses dans cette promiscuité. 

Nombre de logements sociaux mis en chantier en France de 2006 à 2022, source Statista 

Cette mort de Nahel et les émeutes qui ont suivi ont fait sortir les récupérateurs de tout bord du bois. Et ils sont tellement nombreux que je me demande si on peut en faire le tour sans en oublier ! D’abord du côté de la victime du policier, voilà le père, Hicham Hammouti qui avoue n’avoir jamais vu son fils depuis pratiquement sa naissance, mais qui se porte partie civile. Il a probablement compris qu’il y avait de l’argent à la clé à gratter. « Je veux être assis sur le ban des victimes » a-t-il dit[11]. Dans les ghettos, c’est un phénomène bien connu depuis longtemps que les familles sont monoparentales, c’est-à-dire que la mère en général tente de faire quelque chose pour sa progéniture, tandis que le père est parti vivre sa vie ailleurs. Sans doute HIcham Hammouti a-t-il senti l’odeur de l’argent quand il a vu que la cagnotte pour son fils dépassait les 400 000 €. Ces derniers jours il y a eu un concours totalement stupide de cagnottes, cagnotte contre cagnotte, chaque camp s’indignant de ce que l’autre ne soit pas interdit de gagnotter, les députés de la FI ont dit que la cagnotte pour le policier devait être interdite, vu qu’il a tué un jeune, oubliant au passage que ce policier tant qu’il ne sera pas jugé est considéré juridiquement comme innocent, les zemmouristes ont affirmés quant à eux que la cagnotte pour Mounia devait être aussi confisquée au motif que son fils, bien que décédé, était un délinquant. C’est du cirque bien entendu pour consolider son marché électoral de niche. La cagnotte lancée par Jean Messiah pour le policier a recueilli 1,6 millions d’euros, soit quatre fois celle de Nahel[12]. Les zemmouristes qui tentent de faire croire qu’ils ne sont pas dans la minorité, ont avancé que c’était un référendum, et donc que c’était une sorte de référendum en faveur de l’innocence du policier, récupérateurs stupides ils croient que leur côte remontera dans l’opinion. Les trotskystes, autres minoritaires de l’autre bord, ont tenté de se replacer au centre du jeu en relançant les Comités Adama en déshérance[13]. Ils espèrent recruter dans les ghettos pour grossir leurs rangs clairsemés en critiquant la gauche qui n’aurait soutenu Nahel que très mollement. Ça fait plus de cinquante années qu’ils font ça, leur insuccès ne les a pourtant pas fait changer de stratégie. C’est de l’entêtement imbécile. Ils continuent dans un voie sans issue, croyant que si la révolution par les ghettos arrive, ceux-ci les placeront à la tête du pays. C’est la même logique du chaos que celle de Zemmour, mais avec d’autres éléments de langage. Plus il y a le feu, plus il y a de morts, et plus ils croient à leurs chances d’exister un jour politiquement. Mais ils se trompent aujourd’hui comme ils se trompaient hier, non seulement c’est le parti de l’ordre qui reprendra le dessus parce que la cause des ghettos et des pillages n’est pas populaire, mais aussi parce que le peuple des ghettos est totalement indifférent aux agitations trotskystes, au mieux ils s’en servent comme paravent pour justifier leur violence. 

Le père de Nahel, Hicham Hammouti se porte partie civile à son tour 

Cette sinistre affaire et ses séquelles ne mettent pas en lumière seulement l’incurie du gouvernement. Elles montrent aussi que derrière l’émotion, chaque groupe tente de faire avancer ses petites combines politiciennes ou pécuniaires sur le compte d’un cadavre. Dans la nuit du 1er au 2 juillet, un jeune homme de 27 ans a été touché d’une balle de LBD tirée par un policier, alors qu’il roulait sur le cours Lieutaud en scooter[14]. Personne n’a fait de marche blanche pour lui, personne n’a fait de cagnotte, sa photo n’a pas été publiée. Le moment de l’émotion étant passé, tout le monde s’en moque. On sait pourtant depuis longtemps que les LBD sont des armes mortelles qui devraient être interdites dans les manifestations. 

Propositions 

Nous avons donc deux problèmes qui sont liés, qui s’entretiennent l’un l’autre. Celui d’une immigration de masse incontrôlée et sans avenir, et celui d’une police qui a oublié depuis longtemps les principes de la République. Les solutions ne seront pas faciles à mettre en place, si tant est que le gouvernement, ce ramassis de fainéants, s’y attelle un jour. Elles passent par une remise en question de l’immigration de masse, parce que même s’il est vrai que dans les ghettos les immigrés et leurs descendants sont mobiles et parfois s’en échappent, ils sont immédiatement remplacés par de nouveaux arrivants qui reconstituent le stock et le problème. Ensuite il faut une politique de l’emploi et du logement qui améliore concrètement l’ordinaire des cités. Sachant qu’il y a aujourd’hui 8 millions de sans-emplois, on ne fera pas l’impasse sur une baisse des durées travaillées, notamment un retour de la retraite à soixante ans et un passage aux 32 heures par semaine, donc inévitablement d’une augmentation de la part des salaires dans la valeur ajoutée. Tant qu’on considérera que l’immigration c’est un volant de main d’œuvre qui permet la déflation salariale, on ne s’en sortira pas. 

La Castellane, Marseille 

Le second volet c’est de mettre impérativement au pas la police française dont la crédibilité est contestée jusque dans les organisations internationales. La remettre au pas cela veut dire trois choses :

d’abord recruter correctement les policiers, c’est-à-dire recruter des individus qui possèdent un minimum de sens moral, éviter de recruter des fainéants qui ne sont là que pour les primes et pour donner libre cours à leur sauvagerie impunie et native. Éviter de recruter des psychopathes doit être un impératif catégorique. Attention, je ne dis pas que tous les policiers sont des psychopathes, je dis seulement qu’on en voit trop qui sont heureux de casser des têtes et des bras ;

ensuite les former correctement, c’est certainement un métier difficile, on n’en disconviendra pas, il faut apprendre à conserver son sang-froid ce que manifestement le meurtrier de Nahel n’a pas su faire. On peut comprendre que souvent ils aient peur, mais ils auraient moins peur s’ils se comportaient dignement ;

enfin il faut que cesse complètement l’idée que la police est là pour finaliser les visées politique du gouvernement. Autrement dit la police doit respecter la loi, ce qu’elle ne fait pas depuis au moins 2018, nassage, tirs de LBD, violences délibérés, Macron a laissé faire parce que cela l’arrangeait, en donnant des ordres, via cette canaille de Darmanin, pour faire peur aux manifestants, avec les conséquences qu’on sait : la France a brûlé par deux fois cette année au moment de la réforme des retraites et avec les dernières émeutes. Cette volonté d’utiliser la police à des fins politiques a eu deux conséquences : d’abord d’encourager la police a continué ses exactions, ensuite de renforcer les manifestants à riposter par la violence, ce qui a justifié la violence des émeutiers. Je n’irais pas jusqu’à dire comme le stupide Manuel Bompard que la police doit être désarmée, mais plutôt qu’elle doit être civilisée et renvoyée à ses missions de base, plutôt que d’être considérée comme un instrument comme un autre de la politique néolibérale de l’Europe. 

Nos courageux policiers 

Après l’épisode manqué de la réforme des retraites qui avait vu Macron dégringoler dans l’opinion publique, il se donnait cent jours pour apaiser la France et se réconcilier avec elle ! C’est une nouvelle fois raté. Ces deux quinquennats maudits resteront dans l’histoire comme les pires mandats d’un président de la république. Avec Macron tout régresse, la sécurité, la santé, l’ensemble des services publics, le pouvoir d’achat, il est impossible de trouver quelque chose de positif dans la politique de cette marionnette louvoyante. Récemment à propos de la révolte des ghettos, il disait que notre problème c’était un manque d’autorité, à commencer par les familles, ajoutait-il. D’où le manque de respect. Sans doute pensait-il à lui-même que personne ne respecte. Dans une démocratie on ne peut respecter que ce qui est respectable.


[1] Citation souvent transformée en « Mal nommé les choses, c’est ajouter au malheur du monde ».

[2] https://www.letelegramme.fr/france/mort-de-nahel-les-francais-gardent-confiance-dans-la-police-selon-un-sondage-6386211.php

[3] https://www.lefigaro.fr/politique/emeutes-urbaines-plusieurs-elus-regrettent-l-abandon-du-plan-borloo-en-2018-20230630

[4] https://www.lejdd.fr/Societe/Cette-carte-des-64-ghettos-de-France-qui-n-existe-pas-714524

[5] https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/05/a-la-suite-des-emeutes-eric-dupond-moretti-annonce-un-flyer-cense-rappeler-les-parents-a-leurs-obligations_6180703_3224.html?fbclid=IwAR3S0MEgjEg2oNTz9nQgRW8ObwkArNPES5vO3RexevL2MwctSHqM-ch9xJo

[6] https://www.lemonde.fr/pixels/article/2023/07/05/emmanuel-macron-suggere-de-bloquer-les-reseaux-sociaux-pendant-les-emeutes_6180622_4408996.html?fbclid=IwAR1YVb47-mokgQUkQxh5gnLDuyBPS-YZiNZ2z8ahgt703aecufTAoK30gQk

[7] https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/07/emeutes-urbaines-il-est-grand-temps-de-repenser-l-education-des-garcons_6180896_3232.html?fbclid=IwAR20ODy90bnBEmJowhOeKI_Z23EtPstMsS0fnKa_SCQ-cSDzkhb52hpKw68

[8] Ce malheureux comique nous dit que « la France est un pays qui va bien, mais où les gens se sentent mal. Cette idée stupide signifie que les Français ne se rendent pas compte de leur bonheur ! Ce clown va nous dire bientôt que notre chance c’est d’avoir Macron comme président ! https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/06/17/herve-le-bras-demographe-la-france-est-un-pays-qui-va-bien-dont-les-habitants-se-sentent-mal_6178020_823448.html

[9] https://www.insee.fr/fr/statistiques/6793314?sommaire=6793391

[10] https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/06/emeutes-urbaines-ce-qu-elles-relevent-ce-n-est-pas-tant-l-echec-de-la-politique-de-la-ville-que-celui-de-toutes-les-politiques-publiques_6180744_3232.html

[11] https://www.leparisien.fr/faits-divers/mort-de-nahel-je-veux-etre-assis-sur-le-banc-des-victimes-pour-mon-fils-son-pere-du-silence-05-07-2023-GFCPDSHIBJC45LRGHXSEAWLK2Y.php

[12] Jean Messiah avait ouvert une première cagnotte en France mais elle a été récusée au motif qu’il ne prouvait pas que l’argent récolté irait bien au policier. Il en a donc ouvert une deuxième aux Etats-Unis, et c’est celle-là qui a fonctionné.

[13] https://www.revolutionpermanente.fr/Pour-Adama-Nahel-et-toutes-les-victimes-de-la-police-contre-l-offensive-autoritaire-tous-a-Beaumont?fbclid=IwAR3v-lwFYdFDETOz3ZAw3n4WueMLvpZR8HnJrpQMnrHp2oUqn4Xf5iPEA5M

[14] https://www.liberation.fr/societe/police-justice/homme-tue-par-un-probable-tir-policier-de-lbd-a-marseille-ce-que-lon-sait-20230705_D4LZZOWUCVHGPK5G5KNFYQXES4/

Henri Barbusse, Le feu, journal d’une escouade, Flammarion, 1916

  C’est non seulement l’ouvrage de Barbusse le plus célèbre, mais c’est aussi l’ouvrage le plus célèbre sur la guerre – ou le carnage – de...