vendredi 27 octobre 2023

Compléments sur l’idée de démocratie

  

La démocratie selon Macron 

Deux événements ont marqué l’opinion récemment : d’abord la grève au Journal du Dimanche qui a vu les censeurs sortir du bois et dire que c’était une honte qu’un propriétaire de journal ose imposer un directeur de la rédaction qui professerait des idées pas politiquement correctes[1]. Et puis il y a eu la dissolution de Civitas par Darmanin, décision applaudie stupidement par la gauche qui quelques semaines plus tôt dénonçait la dissolution du collectif Les soulèvements de la terre. Dans une démocratie doit-on dissoudre tout ce qui ne pense pas comme nous ? Pour moi, c’est non, et pourtant je suis vraiment très loin des fantaisies de Civitas, mais la question n’est pas du tout de savoir si Civitas est un ramassis d’imbéciles qui développe des idées moisies, mais juste celle d’un pouvoir discrétionnaire qui peu à peu nous indique comment on doit penser, au risque de se faire interdire de parole. Qui décide de la censure et au nom de quoi prétend-on le faire ? Aujourd’hui c’est Civitas qui est dans le collimateur, demain qui ? Dans l’affaire Civitras, la gauche institutionnelle s’est faite une fois de plus remarquer par son inconséquence qui en fait objectivement un allié de Macron et de son gang.

Comme on le voit, il est assez facile de critiquer l’absence de démocratie dans les sociétés dites avancées, en donnant des exemples. Précédemment j’ai parlé de l’écart qu’il y avait entre le mot et la chose, plus le mot s’impose dans le discours politicien et plus la « chose » disparait[2]. Le principal argument des défenseurs d’une démocratie très limitée, est de dire que la direction des affaires politiques est bien trop compliquée pour qu’on la confie au peuple, elle est donc réservée aux « experts » qui de plus en plus imposent des réformes en douce, sans le dire, honteusement. Ce qui est en jeu dans cette vision de la politique est qu’elle reproduit une division du travail entre les « instruits » – les intellectuels au sens d’Adam Smith – qui commandent et les « ignorants » qui exécutent. C’est l’essence même du capitalisme comme le disait Marx dans Le Capital, Livre I, Chapitre 14. Rapprochez cela de ce que disait l’ignoble von Hayek pour qui le marché pouvait tout à fait se passer de la démocratie, même parlementaire au nom de l’efficacité économique – notion assez peu définie, mais qui permet toutes les ignominies, Hayek soutiendra la dictature de Pinochet, avant de conseiller Margaret Thatcher[3]. Or la grande question est bien là : refuser une vraie démocratie directe, c’est reproduire et consolider les inégalités de classes. Même si le peuple a du mal à le formuler, c’est bien ce qui le motive. Ce discours hiérarchisant les dirigeants et les exécutants a pu fonctionner plus ou moins bien dans le passé, pour deux raisons :

– d’abord parce que le peuple des travailleurs était en effet bien moins instruit que ceux qui possédaient le capital, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui avec l’effondrement général de l’enseignement. L’élite politicienne n’est pas plus instruite que le commun, mais elle confisque la parole dans le but de construire la défense d’une classe particulière, celle du capital ;

– et parce qu’on avait appris au peuple à obéir sans se poser de de question en maniant la matraque, ce qui entrainait régulièrement des bouffées de colère sanglantes, bien avant d’ailleurs les ravages de l’industrie. La liste des exemples est longue, un livre n’y suffirait pas. Les mises en cause récentes des policiers en est un révélateur puissant. 

L’évidence que nous ne sommes plus en démocratie vient d’être officialisée avec le retrait de l’agrément d’Anticor[4]. L’affaire est très grave. Je ne connais pas cette association, et en général j’ai une grande méfiance envers « les associations » qui sont le plus souvent des outils pour draguer des subventions, mais ce que je sais pertinemment c’est que le gang Macron aura tout fait pour empêcher cette association de se porter partie civile devant les tribunaux pour des faits de corruption, notamment en ce qui concerne le petit copain de Macron, Alexis Köhler, toujours dans les mauvais coups de la macronie. Ce type de fascisme rampant fait ressembler la France à l’Ukraine de Zelensky ou à l’Afrique post-coloniale, où plus aucun contre-pouvoir n’existe. On comprend facilement qu’une démocratie n’a aucune existence réelle, s’il est impossible de porter des faits de corruption devant la justice. Bien entendu pour faire plaisir à un homme manifestement fou et corrompu, il faut la complicité des juges et que ceux-ci y trouvent leur intérêt. Le bloc bourgeois se mobilise quand il se sent en danger, c’est-à-dire quand il sent que son pouvoir d’essence divine est remis en question. C’est dans ce moment-là qu’il remet en question les principes mêmes que pourtant il dit gravés dans le marbre de l’État de droit. C’est bien un parlement « démocratiquement élu » qui a voté les pleins pouvoirs au Maréchal Pétain, et un autre parlement élu qui a autorisé Hitler à basculer vers une dictature en bonne et due forme. Autrement dit et c’est important de le comprendre : la démocratie parlementaire n’est jamais qu’une étape vers la dictature, c’est ce qu’avait compris Karl Polanyi dans son grand ouvrage[5].

Qu’est-ce que ce bloc bourgeois ?

En tant que système concret c’est l’alliance de la classe politique, des journalistes et de l’appareil juridique[6]. Il y a une division du travail, les premiers fabriquent des lois – du type réforme des retraites – les second les justifient et le troisième emploie la répression pour les faire appliquer. Tant que la société est en croissance, qu’elle n’est pas en crise, tout cela est masqué par des soi-disant règles démocratiques. Mais quand la crise est là, quand une large partie de l’opinion se dresse contre une loi, contre la corruption et contre la violence des possédants, alors cette soi-disant harmonie vole en éclats. Si on en est à dissoudre Anticor, c’est que les affaires que celle-ci traitait sont graves pour le pouvoir. On a remarqué que les juges du tribunal administratif ont ouvert la voie à l’annulation des procédures lancées contre le très corrompu Alexis Köhler en donnant à cette dissolution un effet rétroactif ! Cette ignominie ne peut se faire qu’avec la complicité active de la magistrature. Du jamais vu ! Mais avec les décisions ubuesques du Conseil Constitutionnel qui a interdit par deux fois et violemment au peuple de se prononcer sur ce qui l’intéresse, on était bien préparé à ce contournement même de la loi par ceux-là qui la produisent. Les classes dominantes par l’argent – mais ultra-minoritaires – se sont mis dans la position de ne rendre plus aucun compte à personne, sauf à ceux qui les financent. 

 

Cette semaine noire pour les libertés a été aussi marquée par la dissolution du groupe écologiste Les soulèvements de la terre, avec l’aide d’une loi antiterroriste[7] ! Même Le Monde s’en est ému dans un éditorial du 24 juin 2023 particulièrement faux-cul au motif que les écologistes devraient chercher à convaincre plutôt que d’imposer, sachant que les écologistes quels qu’ils soient n’ont strictement aucun pouvoir d’imposer, ils prennent à peine le temps de se défendre[8]. Le Monde est un journal aussi hypocrite qu’idiot parce qu’en effet s’il y a des actions violentes comme à Sainte-Soline, c’est d’une part parce que l’État à imposer des décisions unilatérales en violant ses propres règles et que d’autre part la milice macronienne avait l’ordre d’être sauvage dans la répression pour faire peur- cette assertion est bien documentée aujourd’hui. En vérité cette dissolution est une déclaration de guerre à ceux qui n’acceptent pas la soi-disant transition écologique qui n’a comme seul objectif que de garantir des profits de court terme pour les marchands de green washing. Mais la réaction à cette ignominie macronienne risque d’entraîner justement une radicalisation des positions sur la question de la dégradation continue des conditions de la vie humaine à la surface de la terre. Déjà de nombreux rassemblements ont eu lieu pour protester contre l’ignoble Darmanin, et l’inventivité des protestataires va sans doute entraîner de nouvelles actions violentes, justement parce que dans la société décomposée macronienne, il n’y a pas de dialogue, il n’y a pas de contre-pouvoir, on l’a vu récemment avec les réformes des retraites, le gouvernement s’est montré tellement odieux et arrogant qu’il s’est même mis à dos le syndicat patronal, la CFDT – syndicat qui arbore la couleur orange, mais qui avec le passage du temps est complètement jaune. Que Macron et son gang les ait piétinés montre à quel point cette caste s’en moque tant qu’elle tient la milice. On remarque que le fascisme macronien s’accélère avec la poursuite terrifiante des mois plus tard des citoyens qui s’étaient rassemblés massivement à Sainte-Soline, ils sont victimes de cette hargne vindicative qui veut étouffer dans l’œuf toute idée de contestation[9], anticipant sans doute de nouveaux affrontements avec le peuple. C’est ce que cet imbécile de Macron appelle sans doute la voie de l’apaisement. Cette dérive visant à censurer et à interdire tout ce qui ne plait pas a été prolongée avec la dissolution de Civitas. Le problème n’est pas que Darmanin fasse ce sale boulot, mais plutôt que la gauche l’applaudisse. On comprend bien l’intention de Darmanin, en censurant Civitas, non seulement il justifie celle des Soulèvements de la terre, mais il se prépare à remettre sur le tapis le rassemblement au deuxième tour contre le fascisme. La ficelle est grossière, mais elle a bien fonctionné en 2017 et 2022. L’imbécilité de la gauche institutionnelle est ainsi dévoilée on ne peut mieux, elle fait le jeu du bloc bourgeois en adoptant ses critères de ce qui est bon pour la démocratie ou  non. 

Loïc Schneider risque 7 ans de prison 

La « démocratie » dite représentative s’est donc imposée par le droit mais, le droit est juste le cadre de fonctionnement d’une forme sociale particulière. Il ne faut jamais l’oublier, le capital n’est rien sans l’appui du droit et ce droit a été pondu par la classe bourgeoise, pour consolider son pouvoir. Mais le carcan juridique qui par ailleurs reproduit la complexité des choses de la vie moderne, au point de les rendre opaques et souvent incompréhensibles, a un but très souvent ignoré. Il n’est pas naturel, il fabrique des normes – le fameux État de droit – qui doivent avoir cet aspect naturel pour produire le consentement. C’est pourquoi quand le consentement minimal de la population disparait comme en France avec Macron, la bourgeoisie sort l’artillerie lourde de la répression. Or cette époque de paix civile est terminée depuis longtemps, l’évolution du capitalisme a produit de nouveaux individus dont la détermination est l’individualisme. Il faut prendre ce terme au sens le plus large et ne pas le prendre pour un simple synonyme d’égoïsme. C’est une tendance historique qui s’est développée pour le meilleur et pour le pire depuis disons au moins les Lumières et qui amène à la critique des instances dirigeantes. Elle a été appuyée par le développement de l’instruction et la circulation de l’information. On remarque d’ailleurs que depuis la fin des années soixante au moins, le bloc dirigeant formé de politiciens et des très riches s’acharne à contrôler l’information et à détruire tout embryon de sens critique dans l’enseignement. 

 

Mais ça ne fonctionne plus vraiment. On passe donc à la censure. Depuis que la Russie a déclenché son opération spéciale en Ukraine, la bureaucratie européiste a décidé que les médias russes étaient bannis. Pourtant nous ne sommes pas officiellement en guerre avec la Russie, et pourtant à tout prendre ils sont beaucoup moins menteurs que les médias occidentaux, même si évidemment l’information est biaisée d’un point de vue pro-russe. Peu de politiciens ont manifesté contre ce déni de démocratie, alors que selon l’ONU on doit défendre la liberté d’informer, même si celle-ci vient de l’étranger. C’est l’article 19 de la déclaration des droits de l’homme : « Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit. » déclaration dont les pays occidentaux sont signataires. La France de Macron a fait rire ces derniers jours, quand, à la suite du coup d’État au Niger, elle a dénoncé la censure de France 24 et RFI[10],  s’attirant les moqueries aussi de Maria Vladimirovna Zakharova qui a rappelé la censure des médias russes en Europe et en France. La censure s’étend vers les réseaux sociaux, cette fois ce ne sont plus des États, mais des sociétés privées – et c’est nouveau – qui s’autorise à censurer, à l’aide d’algorithmes stupides. Se battre pour une démocratie qui soit autre chose qu’un chiffon de papier, c’est se battre à la fois contre la concentration des médias par des milliardaires et contre cette concentration du pouvoir entre les mains d’un parti politique fut-il majoritaire. Le pouvoir macronien est en ce sens exemplaire : il repose à la fois sur un appareil de communication qui lui est très dévouée, et sur un parti croupion qui ne représente rien dans la société en dehors d’un ramassis de pantins opportunistes et semi-idiots. 

 

Cependant ce contrôle trouve rapidement ses limites quand il concerne la vie quotidienne des Français, on l’a vu avec les Gilets Jaunes, plus timidement avec le vaccin pour le COVID, et encore plus massivement avec la réforme des retraites malgré la propagande quotidienne des chiens de garde qui relayaient la politique gouvernementale jour après jour, les manifestants n'ont pas désarmé. Il a fallu envoyer la milice, bastonner, terroriser pour bâillonner la contestation. Ces derniers temps on trouve plusieurs ouvrages sur l’émeute. C’est-à-dire une violence soudaine qui parait incontrôlée et incontrôlable. Les médias et les politiciens sont à l’unisson pour réciter le catéchisme selon lequel dans une démocratie, la violence n’est pas une option politique. Dans son ouvrage, Éloge de l’émeute, LLL, 2023, Jacques Deschamps montre exactement le contraire. Non seulement l’émeute est facilement considérée comme un blocage de toute discussion par la partie la plus forte, celle du patronat et de l’État, voir l’absence de dialogue du côté macronien lors de la réformes des retraites, mais elle fait partie directement du processus démocratique, en ce sens qu’elle dénoue plus ou moins bien des situations tendues. En 2018 ce sont les émeutiers Gilets Jaunes qui ont poussé Macron, saisi au ventre par une trouille verte, à bouger et à mettre de l’eau dans son vin. Même si l’émeute ne débouche pas souvent vers la révolution, elle a des résultats tangibles, on se souvient qu’en Mai 68, les grèves ajoutées aux barricades ont radicalement modifié le dialogue social. Penser l’émeute et la violence politique en dehors du processus démocratique réel est un non-sens. J’ajoute que la France est un pays exemplaire de ce point de vue au moins depuis 1789. L’émeute est déjà au moins la preuve d’une absence de démocratie réelle puisqu’elle est le résultat d’une impossibilité d’exprimer son mécontentement autrement que par une action violente. 

 

Pour dire les choses plus simplement, qu’on interdise les manifestations qui pourraient être violentes au nom d’une démocratie imaginaire et consensuelle, est anti-démocratique dans la mesure où la démocratie, c’est justement le peuple en action qui prend son destin en main. C’est en quelque sorte la thèse que développe Rob Grams dans un article que je trouve fort intéressant intitulé Pourquoi la France est bien une dictature ?[11] Si on le suit jusqu’au bout on comprend que la démocratie ne peut pas exister dans la simple délégation des pouvoirs à travers une élection périodique, mais elle existe dans l’action, et peut-être même uniquement dans ce moment-là. Il vient évidemment que l’action va se heurter aux ennemis de la démocratie qui veulent imposer leur vision ultra-minoritaire à la très grande majorité, c’est d’autant plus choquant quand le capital impose ses lois aux travailleurs qui les nourrissent. Si le pouvoir réagit violemment alors on passe à l’émeute. C’est ce qui s’est passé en Mai 68 avec les barricades qui ont accompagnées la grève générale, c’est ce qui s’est passé avec les Gilets Jaunes et encore avec le rejet de la réforme de la loi sur les retraites. Chaque fois ces mouvements ont été très populaires, c’est-à-dire que sa violence était approuvée par la majorité qui en rendait responsable les services de l’État. 


 

C’est d’ailleurs pour éviter que la violence de l’émeute devienne trop légitime dans l’opinion que les « journalistes » commençaient toujours par interroger les syndicalistes en leur demandant, si oui ou non, ils approuvaient cette violence. L’idée crapuleuse était de dissocier les bons syndicalistes prêts au dialogue des mauvais émeutiers. Mais en vérité, si le mouvement contre la réforme des retraites était finalement assez peu violent, les manifestants approuvaient ces violences parce qu’elles activaient le mouvement dans le bon sens. Résumons cette idée : lorsque la violence politique provient des « dominés » qui n’ont plus aucun relais pour se faire entendre contre la tyrannie d’une minorité, elle est moralement légitime, d’autant plus qu’ils représentent la très grande majorité. À l’inverse quand la violence politique est exercée par l’appareil d’État confisqué au profit exclusif d’une petite minorité, nous sommes dans une dictature. En tous les cas la violence politique apparait comme le complément nécessaire de la démocratie réelle ! 


[1] https://ingirumimusnocte2.blogspot.com/2023/07/crise-au-journal-du-dimanche.html

[2] https://ingirumimusnocte2.blogspot.com/2023/06/etes-vous-prets-pour-une-democratie.html

[3] Jacob Jean. Le marché d'Hayek contre la démocratie. In: Raison présente, n°95, 3e trimestre 1990. Bouleversements à L'Est. pp. 61-76.

[4] https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/06/23/anticor-perd-son-agrement-et-denonce-une-atteinte-grave-aux-libertes-associatives_6178895_3224.html

[5] The Great Transformation, Rinehart & Company, Inc., 1944, traduit tardivement en français chez Gallimard en 1983

[6] Bruno AmableStefano PalombariniL’illusion du bloc bourgeois. Alliances sociales et avenir du modèle français, Raisons d'agir, 2017

[7] https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/06/21/la-dissolution-du-collectif-ecologiste-les-soulevements-de-la-terre-a-ete-prononcee_6178559_3244.html

[8] https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/23/les-soulevements-de-la-terre-une-dissolution-problematique_6178900_3232.html

[9] https://reporterre.net/Apres-Sainte-Soline-Loic-poete-maraicher-risque-7-ans-de-prison

[10] https://www.20minutes.fr/monde/4047942-20230803-coup-etat-niger-paris-condamne-tres-fermement-suspension-diffusion-france-24-rfi

[11] https://www.frustrationmagazine.fr/pourquoi-la-france-est-bien-une-dictature/?fbclid=IwAR3UNNf0KX1_vlHe4QyyXd9iQcSTHPCYGFHCzzSh478KycF52HHuwPxoNNY

samedi 21 octobre 2023

Le Terrorisme islamiste de retour en Europe

  

Professeurs assassinés 

Le terrorisme islamiste est de retour en Europe, si tant est qu’il n’ait jamais disparu. Au-delà de l’émotion, posons rationnellement la question. C’est évidemment en liaison avec la guerre que le Hamas a déclenché le 7 octobre dernier sur le sol d’Israël, commettant des actes de barbarie que la gauche a eu beaucoup de mal à condamner. ce qui veut dire que ceux qui condamnent hâtivement Israël pour sa riposte à Gaza feraient bien d’y regarder à deux fois. Le 13 octobre 2023, c’est donc un professeur de lettres, Dominique Bernard, qui a été tué sur son lieu de travail à coups de couteau, trois ans après la décapitation de Samuel Paty. Entre temps Agnès Lassalle, professeur d’espagnol a été elle aussi poignardée par un de ses élèves. Ce dernier crime a été classé comme un simple fait-divers au prétexte que le jugement de l’assassin était altéré au moment des faits[1]. Mais en réalité, on a mis le couvercle sur cette affaire prétextant du fait que l’assassin était mineur. Mais il parait assez clair que ce meurtre a été commis comme un effet de mode indirectement lié au moins à la guerre que l’Islam mène contre l’Occident. Que les professeurs soient des cibles privilégiées de ces attentats terroristes est tout de même le résultat aussi bien de la décomposition de la société, que de la dévalorisation constante de cette malheureuse profession. Les professeurs sont mal payés, mal traités, dénigrés, et maintenant ils risquent leur peau en allant enseigner au lycée. C’est un facteur aggravant dans la « crise des vocations ». Que les islamistes visent des enseignants, quoi de plus « normal », l’éducation est leur ennemi. Les enseignants qui vont travailler la peur au ventre sont de plus en plus nombreux et pratiquent une autocensure qui est déjà un renoncement à leur magistère[2]. Et il est évident que si les programmes d’enseignement ont changé « radicalement », c’est aussi sous la pression de la mouvance islamiste, souvent d’ailleurs accompagnée par l’assentiment d’une large partie des professeurs et par la gauche institutionnelle qui joue dans cette affaire le rôle de la mouche du coche, ou celui de la collaboration avec l’ennemi. Je vise ici directement Mélenchon, Panot et le NPA, et tous ceux qui ont dédouané le Hamas de ses crimes au prétexte qu’Israël s’est défendu. Condamner en priorité les meurtres d’enfants, de nouveaux et les prises d’otages ne veut pas dire forcément qu’on approuve la politique de Netanyahou. Mais celle-ci ne saurait être une excuse. 

L’assassin de Dominique Bernard 

Il est bon de mettre un nom et un visage sur ce crime terroriste, ce que longtemps les journalistes ont refusé de faire « pour ne pas attiser la haine ». Mohammed Mogouchkov, 20 ans, est né à Malgobek, est arrivé en France en 2008. Le modus operandi de ce crime est le même dans les deux cas, un Tchétchène « radicalisé », fiché S, s’arme d’un couteau, et s’en va chercher un professeur d’histoire, il ne trouvera qu’un professeur de lettres, mais ça lui suffira pour satisfaire sa haine. Comme dans le cas de Paty, l’assassin baignait dans un entourage radicalisé, c’est-à-dire des gens qui vouent une haine définitive à l’Occident et qui veulent la guerre de civilisation[3]. Que font ces gens sur notre territoire, à part fomenter des mauvais coups ? Sont-ce là les chances pour la France dont nous par le médiocre Macron ? Dimanche c’était la Belgique, Bruxelles plus précisément qui était touchée par un attentat, un terreau expérimental pour le terrorisme islamiste. Deux personnes sont mortes, des Suédois qui étaient venus pour assister au match de football Belgique-Suède. Abdelsalem Lassoued est un Tunisien installé sur le territoire belge, lui aussi était surveillé, et classé comme un individu dangereux. Mais cette surveillance n’a servi à rien du tout, elle n'a pas prévenu l'assassinat de deux suédois innocents. Il est sorti dans la rue à la recherche de Suédois à crever pour satisfaire son idéologie religieuse. Certains journalistes ont parlé d’un « loup solitaire », sous-entendant par là qu’il était un peu fada et que derrière lui il n’y avait pas de réseau. Rien n’est plus faux, en effet, ce loup solitaire s’étant procuré une kalachnikov, il fallait bien qu’il ait des accointances avec des réseaux de marchands d’armes. Ce genre d’arme ne se trouve pas à tous les coins de rue. Il sera facile d’enterrer l’enquête sur ce drame puisqu’en effet ce criminel a été finalement abattu. 

Abdesalem Lassoued, l’auteur de l’attentat de Bruxelles est décédé 

Ces assassins ont comme point comme – sauf peut-être celui de Saint-Jean de Luz – d’avoir derrière eux un réseau de gens tout aussi surveillés qu’eux et qui sont directement en guerre avec l’Europe qu’ils rêvent de conquérir. Que faire face à cette violence stupide importée ? Va-t-on toujours se contenter de marches blanches, de bougies, de discours lénifiants pour « condamner avec la plus grande fermeté ? On se souvient que quand Paty avait été assassiné, Darmanin avait bombé le torse pour décider de fermer la mosquée de Pantin pour… 6 mois ! Pisser dans un violon revient exactement au même. La première chose qu’on constate c’est que cette situation ubuesque est le résultat de l’incompétence pour ne pas dire plus des politiciens français, mais aussi européens, de droite comme de gauche. La première erreur a été de nier un lien pourtant évident ente immigration, islamisation de l’Europe et terrorisme. À droite on le niait pour des raisons économiques, baisse des salaires, financement des retraites, et à gauche pour des raisons idéologiques, à la fois au nom de l’internationalisme, et de la défense des pauvres. le peuple qui plus intelligents que la classe des politiciens l’avait rapidement compris et s’est détaché presque complètement de la gauche dont les partis, jadis de masse, ressemblent à une armée mexicaine en déroute. Des intellectuels aussi inconsistants qu’Alain Badiou ou François Héran, le premier n’ayant jamais renier son soutien à la terreur des Khmers rouges, et le second présentant l’immigration comme un phénomène naturel, comme la pluie ou le vent, et irréversible, sur lequel on ne pourrait avoir aucune prise. Les Français, comme les Européens, demandent à ce qu’on stoppe l’immigration venue d’Afrique, et également que l’Islam soit moins visible dans le paysage, que ce soit à cause des accoutrements vestimentaires ou des édifices religieux, sans même parles des prières de rue qui sont à l’évidence des provocations. Ces chiffres sont même en augmentation sur les trente dernières années. Mais le fait que les politiciens n’aient jamais sérieusement réagi depuis trente ans, non seulement les disqualifie, mais explique la montée constante du vote en faveur de Marine Le Pen et de son parti – ce qui ne veut pas dire que ce parti fera mieux, mais c’est une autre histoire. Il faut interpeler les gens de gauche sur cette question : des guignols comme Mélenchon prétendent être favorables à la démocratie directe et donc au RIC, mais il va de soit qui le RIC voit le jour, l’issue d’un vote massif et populaire sur la question de l’immigration serait réglée. Comme je l’ai souvent répété, la gauche avait plus ou moins vocation dans le temps de porter la parole du peuple, c’est ce qui expliquait ses succès. Mais aujourd’hui – et ce n’est pas nouveau – elle prétend faire la leçon à tout un chacun et lui expliquer que sa pensée ne vaut rien, et qu’il faut la remplacer par une autre élaboré sur un coin de table par des semi-intellectuels qui n’ont aucune idée de ce qu’est le peuple dans sa chair. Les bonnes âmes nous dirons que tous les musulmans installés sur notre sol ne sont pas des terroristes, c’est vrai, mais à l’inverse, tous les attentats terroristes sont portés par des musulmans. D’une manière ou d’une autre, l’Islam est un facteur de division dans nos sociétés qui mène directement à l’affrontement entre communautés. 

 

Si les Français, comme les Européens d’ailleurs, sont pour une restriction drastique de l’immigration de masse d’origine extra-européenne, ils sont également pour limiter l’aspect visible de l’Islam dans notre pays, que ce soit le port du voile, la construction des mosquées ou encore les écoles coraniques. C’est évidemment par cette colonisation culturelle que les sociétés européennes se transforment et qu’ensuite cela donne de la matière à la guerre que l’Islam a décidé de poursuivre sur notre sol. Malgré l’émotion générée par ce qui s’est passé en Israël, et par les attentats terroristes qui se sont déroulés en France et en Belgique, le gouvernement français n’est pas près de tenir compte des désirs des Français. Voici cette petite crapule de Dussopt, traître par destination, qui nous explique qu’il nous manque encore 20 000 travailleurs non qualifiés pour assurer les jeux olympiques de 2024 à Paris, et qu’en conséquence, il n’y aura pas de fermeture du robinet[4]. La rhétorique est toujours la même, l’immigration est un impératif économique duquel on ne sautait déroger. Le bon déroulement des jeux olympiques semble plus important que la vie humaine pour ce genre d’imbéciles. Mais une telle politique n’est certainement pas l’assurance qu’il n’y aura pas d’attentats durant cette période, je parierais que malheureusement ce sera l’inverse. Dans cette tribune hypocrite Dussopt nous explique qu’il faut bien faire la différence entre des musulmans qui travaillent et les terroristes qui font des attentats. 

 

Mais le problème est que non seulement les terroristes ne disent pas à l’avance qu’ils le sont, et qu’en plus ils ne sont pas isolés et sont « comme un poisson dans l’eau » dans la communauté musulmane. Il faut bien commencer par quelque chose, et afin de contenir à terme l’importance de la population musulmane dans les pays d’Europe, il faut bien restreindre drastiquement l’immigration, facteur de désordre politique, mais aussi de désordre économique, poussant constamment les salaires à la baisse. Le deuxième volet étant de normaliser et d’assimiler ces populations à des mœurs compatibles avec une République laïque. Ce n’est pas un hasard si le terrorisme islamiste s’attaque en priorité aux enseignants, et plus particulièrement aux professeurs d’histoire. Mohammed Mogouchkov cherchait un professeur d’histoire, avant de se contenter d’un simple professeur de lettres. Les enseignants ont de plus en plus peur, et face à cette peur, ce métier, mal payé ne sera plus réservé dans les zones sensibles qu’à des volontaires issus de la diversité. Ce n’est pas seulement une question de niveau, mais ce sera, et c’est sans doute déjà, une reprise en main de l’éducation, financée parles deniers de l’Etat. Comme on le comprend le travail sera long, et plus il commencera tard plus il sera douloureux si on peut éviter la guerre civile. C’est également une nécessité si on veut restaurer notre souveraineté et conserver une identité culturelle française à notre pays, et surtout si on veut vivre sans craindre de se faire égorger à tous les coins de rue. 

Arras hommage à Dominique Bernard, le 15 octobre 2023 

Ça fait des décennies que l’État via l’Éducation nationale, les associations subventionnées, font des campagnes publicitaires très couteuses pour promouvoir le « vivre ensemble ». Au bout de quarante années de ces campagnes répétées d’éducation, rien n’a changé, bien au contraire, les choses se sont aggravées. Un plan qui échoue après autant d’années c’est la preuve qu’il était mauvais.  Il faut se poser des questions. Pourquoi cela ne marche-t-il pas ? Soit les populations n’en comprennent pas l’intérêt, peut-être sont-ils idiots ? Soit ces mêmes populations ne veulent pas vivre ensemble. Et quand deux entités ne s’entendent pas, soit on divorce à l’amiable, soit une communauté tue l’autre, d’une manière symbolique en l’assimilant, soit d’une manière physique en l’empêchant d’exister, par exemple l’égorgeant, ou en l’obligeant de se cacher de ne plus parler, de ne plus exister. Nous en sommes clairement à ce dernier stade. Le mal est très profond, résultat de plusieurs décennies de négation du problème, on se rend compte de la difficulté de la reprise en mains. Le 16 octobre, l’éducation nationale avait organisé une journée d’hommage aux enseignants assassinés, Samuel Paty et Dominique Bernard. Cette journée a été perturbée dans de très nombreux établissements. Gabriel Attal recensait 179 perturbations de cet hommage qui feront l’objet d’un signalement au procureur de la République et peut être d’exclusion[5]. Il y en a eu probablement beaucoup plus. Ce qui veut dire qu’il y a au sein de l’école de la République déjà une tendance à la sécession. Sur X on trouvait des tweets franchement odieux de « jeunes » qui se réjouissaient de la mort d’un professeur assassiné. Ces jeunes-là sont dans leur tête déjà près à la guerre, même si la plupart ne passeront jamais à l’acte. 

Le terrorisme du Hamas s’invite au cœur de la classe politique et fracture encore un peu plus les débris de la gauche. Chacun y allant de ses solutions pour régler la question palestinienne, sous-entendant par là que si les crimes du Hamas sont affreux, il y a une responsabilité aussi d’Israël. Poussée à plusieurs reprises par le journaliste Jean-Jacques Bourdin, à l’antenne de Sud Radio, à dire si le Hamas, qui a conduit des massacres en Israël, le 7 octobre, est « un mouvement de résistance », Obono de la direction de LFI a fini par répondre : « Oui. » « C’est un mouvement de résistance qui se définit comme tel », a-t-elle affirmé, estimant qu’il « a pour objectif la libération de la Palestine » et « résiste à une occupation »[6]. Oser comparer le Hamas au mouvement de Résistance en France est une honte. Les Résistants français n'allaient pas en Allemagne pour égorger des nouveaux-nés, et ne prenaient pas en otage les populations civiles. Évidemment sachant que le Hamas est assez peu populaire en France, le seul but de ces propos est de consolider sa base électorale du lieu de son élection, qu’importe pour elle que son parti soit de plus en plus loin de la gestion des affaires de la France, en agitant des peurs, elle fidélise son public et s’assure une petite rente de situation. Ruffin et Corbières ont tout de suite condamné ses propos. Mais il est probablement que cela va annoncer une scission au sein de ce parti. Cette énième crise au sein de la gauche qui n’a plus rien à dire sur aucun des sujets du jour, est aussi un résumé de ce que traverse le monde occidental, écartelé entre un humanisme en carton envers le peuple palestinien qui souffre, et les Israéliens, Juifs donc qui ressortent d’une longue lignée de martyres en tous genres. 

Les questions se posent évidemment de plus en plus sur le rôle des associations comme la Cimade ou France Terre d’Asile. Ce sont des associations subventionnées par les pouvoirs publics, au niveau national, mais aussi comme le montre le logo de France Terre d’Asile par l’Union européenne. Ces associations qui sont censées « accompagner l’insertion des migrants » sont régulièrement citées parce qu’elles luttent d’arrache-pied contre les exécutions des OQTF et contre la justice qui les valide. Et le terroriste qui a assassiné le malheureux professeur d’Arras était sous le coup, lui et sa famille, depuis longtemps d’une telle demande. La Cimade avance qu’évidemment elle n’est pas concernée par ce meurtre. Elle l’a répété dans un communiqué furieux[7]. Pourtant ces associations qui vivent de fonds publics posent deux questions au minimum d’abord : pourquoi l’État et l’Union européennes sous-traitent-ils ce qui devrait être du ressort de leur pouvoir régalien ? Ensuite, si ces associations s’appliquent à tourner la loi au nom d’une logique « no border », pourquoi continuent-elles à recevoir des fonds publics ? L’assassin de Bruxelles, un Tunisien, serait arrivé en Europe via Lampedusa, probablement sur un navire affrété par SOS Méditerranée qui est soutenu par des collectivités publiques, dont ma municipalité de Paris.  Que d’un côté l’État vote des lois restrictives sur l’immigration ou sur l’expulsion des fichés S, mais que de l’autre il subventionne des associations qui luttent contre l’existence même des frontières, apparait comme une incohérence remarquable ou une forme de schizophrénie. Dans tous les cas le crédit de l’État est très entamé.   

 

Récemment les choses ont commencé à changer, non pas au niveau du peuple qui depuis longtemps sait à quoi s’en tenir, mais au niveau des « élites » qui fournissent des représentations de ce phénomène. On entend de moins en moins la petite musique selon laquelle il n’y aurait aucun lien entre l’immigration, l’islamisation des sociétés européennes et les attentats terroristes. La gauche du type LFI ou PCF et l’extrême-gauche façon NPA, sont maintenant complètement marginalisées, leur audience est restreinte à une frange de la communauté musulmane.



[1] https://www.tf1info.fr/justice-faits-divers/agnes-lassalle-l-enseignante-poignardee-tuee-a-saint-jean-de-luz-decoree-de-la-legion-d-honneur-2255145.html

[2] https://www.sudouest.fr/politique/education/hommage-a-dominique-bernard-a-l-ecole-cette-peur-d-enseigner-qui-devient-contagieuse-17093503.php

[3] https://www.france24.com/fr/france/20231015-attaque-au-couteau-d-arras-ce-que-l-on-sait-sur-l-enqu%C3%AAte-48-heures-apr%C3%A8s-l-attentat

[4] https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/10/17/pour-olivier-dussopt-le-climat-terroriste-ne-doit-pas-empecher-la-regularisation-des-travailleurs-sans-papiers-dans-les-metiers-en-tension_6194998_3224.html

[5] https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/10/17/hommage-a-dominique-bernard-et-samuel-paty-gabriel-attal-annonce-179-saisines-du-procureur-de-la-republique-apres-des-incidents-dans-des-ecoles_6195023_3224.html

[6] https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/10/18/daniele-obono-qualifie-le-hamas-de-mouvement-de-resistance-gerald-darmanin-saisit-la-justice-pour-apologie-du-terrorisme_6195084_823448.html

[7] https://www.20minutes.fr/societe/4058221-20231017-attentat-arras-cimade-refuse-tout-lien-entre-mobilisation-mort-enseignant

dimanche 15 octobre 2023

A qui profite les crimes du Hamas ?

  

La guerre déclenchée par le Hamas sur le territoire d’Israël est un désastre sur à peu près tous les plans. La manière de s’attaquer aux enfants aux nouveau-nés aux femmes, aux vieillards rappelle les pogromes de l’ancien temps, ceux qui se pratiquaient dans l’Ukraine de Bandera et de Petlioura.  Essayons d’aller un peu au-delà de l’émotion que les opérations terroristes du Hamas a engendrée. Personne ne pense que le Hamas, quelle que soit la haine que ses combattants manifestent envers les Israéliens et les Juifs en général, ait conçu cette attaque tout seul. On a beaucoup parlé de l’Iran qui leur aurait fourni des armes et un soutien logistique, notamment en matière de surveillance électronique. Le Qatar a été désigné aussi comme un des principaux sponsors du Hamas. On a dit également que ce désastre était la conséquence des défaillances dans les services de renseignement israélien. Tout cela n’est pas faux, mais ne suffit peut-être pas. Les crimes du Hamas déstabilisent Israël et montrent sa vulnérabilité, mais cela ne profite pas, loin de là, aux Palestiniens de Gaza qui vont souffrir des déplacements forcés et de la répression de l’armée israélienne. Ils revivent 75 ans après l’exode organisé en 1948 lors de la création d’Israël. Le Hamas est clairement l’ennemi du peuple palestinien en ce sens que si son offensive n’a aucune chance d’aboutir à la fin d’Israël, elle ne peut pas plus travailler à améliorer le sort des Palestiniens de Gaza qui vivaient déjà dans la misère de l’aide internationale et sous la férule du Hamas. L’Iran prétend ouvrir maintenant un deuxième front, probablement par Hezbollah interposé au nord d’Israël, à partir des bases qu’il occupe au Liban. En-a-t-il les moyens ? Et puis, on pourrait dire qu’une défaite de grande ampleur du Hamas arrangerait bigrement à la fois le Hezbollah et le Fatah dont il est le premier ennemi. Également la question qui se pose est de savoir si l’Iran est prêt à en découdre avec Israël directement, alors que ce pays est en voie d’intégration dans l’ensemble international des BRICS. 

On a dit que cette attaque meurtrière allait obligatoirement entraver les rapprochements entre Israël et les pays du Golfe, et donc que c’était tout le bénéfice pour l’Iran en grande difficulté à l’intérieur de ses frontières. Mais il y a un autre grand bénéficiaire de cette décomposition d’un processus de paix au Moyen-Orient, ce sont les Etats-Unis. En effet, depuis la guerre en Syrie, et progressivement, les Etats-Unis se sont fait éjecter de la zone. L’Arabie saoudite leur a tourné le dos, s’alliant aux BRICS et acceptant une sorte de paix avec l’Iran. C’est donc pour les Etats-Unis une occasion rêvée de revenir dans la course en se posant comme défenseur d’Israël qui, ces derniers temps, regardait vers la Chine. Les Russes sont plutôt ennuyés par ce conflit qui justement risque de les entraîner à leur corps défendant à prendre parti. Comme la Chine, ils ont renvoyé Israël et le Hamas dos à dos demandant des négociations et un cessez le feu. Surtout en année électorale, c’est pain béni pour Joe Biden qui se pose en ultime rempart face à la barbarie du Hamas, surtout après les imbécilités de Trump qui n’a rien trouvé de mieux que de critiquer Israël pendant que ce pays comptait ses morts. Israël n’était pas préparé a-t-il dit, mais il a ajouté aussi que le « Hezbollah » était intelligent[1] ! 

Dans le kibboutz de Beeri, Israël compte ses morts 

On ne sait pas quelles sont les intentions du Hamas, veut-il que les troupes israéliennes rentrent dans Gaza pour les piéger et faire un massacre ? Veut-il que les Israéliens massacrent des grandes quantités de Palestiniens pour finir de déconsidérer l’État hébreux dans l’opinion internationale ? Ailleurs on réenclenche l’idée d’une négociation qui aboutirait forcément à la création de deux États. Il y a encore quelque mois cette idée était considérée comme dépassée. Qui a la capacité de parrainer une telle solution ? Certainement pas les Etats-Unis ni l’ONU, peut-être la Turquie qui s’est rapproché ces dernières années d’Israël pour contrecarrer les velléités expansionnistes de l’Iran. N'oublions pas que récemment les Turcs et les Israéliens ont collaboré pour parrainer un plan de paix pour l’Ukraine dont l’Occident n’a pas voulu. Les dissensions qui ne manqueront pas d’éclater entre l’Arabie saoudite et l’Iran risquent également de compromettre ou de ralentir le mouvement d’élargissement des BRICS. Là encore on voit bien que se sont encore les Etats-Unis qui profiteront d’un Iran revanchard et jusqu’auboutiste. Comme on le comprend le drame qui se joue en Israël et à Gaza a des retombées plus lointaines en termes de politique internationale. Israël en s’orientant vers un processus de paix avec les États arabes s’émancipait d’une tutelle américaine trop voyante. L’État hébreux ne peut pas apparaître dans cette région uniquement comme la pointe avancée de l’Empire étatsunien. Il y avait trois options pour Israël, la première consistant à geler la situation tout en continuant la colonisation. Netanyahou a clairement échoué dans cette voie en privilégiant les alliances électorales circonstancielles à la confection d’un plan de paix sérieux sur le long terme. On peut parler même de suicide. La seconde voie, c’est celle d’un État binational. Celui-ci ne peut pas être à l’ordre du jour parce que la méfiance est beaucoup trop grande. La troisième est celle de deux États sécurisés. Cette idée qui a la faveur du moment est cependant difficile à réaliser, non pas sur le papier, parce qu’on peut procéder assez facilement à des échanges de territoires, les plans sont près. Mais les obstacles sont toujours politiques, j’en vois deux principalement : d’abord le Hamas n’en voudra jamais, il disparaitrait dans la paix, ensuite pour l’instant les Palestiniens n'ont pas les capacités politiques de gérer un véritable État souverain et démocratique et d’œuvrer à son développement. L’évolution positive de ce conflit vers la négociation viendra peut-être de l’opinion israélienne qui est très critique vis-à-vis de la politique de gestion au jour le jour du gouvernement actuel. On a vu les ministres de ce gouvernement d’incapables se faire insulter et apostrophés directement sur le terrain quand ils ont tenté de se rendre auprès des populations choquées. 

 

Gaza sous les bombes 

Ce rapide tour du problème, bien incomplet d’ailleurs, n’incite pas à l’optimisme. Cependant il montre que dans cette guerre c’est bien plus qu’un simple face à face entre les Palestiniens et les Israéliens qui se joue. En attendant, les Israéliens comme les Palestiniens de Gaza souffrent dans leur chair et n’en voient pas la fin. Tandis que les Israéliens pleurent leurs morts, les Gazaouis s’exilent par centaines de milliers, voire un million, n’obéissant pas aux injonctions du Hamas  qui aimerait bien qu’il y ait un bain de sang pour qu’Israël endosse le costume du criminel. L’Égypte a semble-t-il ouvert ses frontières. On ne peut que souhaiter que cet ultime affrontement ouvre la voie à un processus de paix sérieusement pensé.

 

Addendum, la guerre des cartes, un peu d’histoire

 

Comme nous allons le voir, il est complètement illusoire de croire que la question de fonds posée par la cohabitation de Juifs israéliens et d’Arabes musulmans pourra se régler en avançant que les uns étaient là avant les autres, en effet les mouvements de peuplement de la Palestine sont fort complexes et ne peuvent être compris en disant que des Juifs venus de l’étranger sont venus troubler une paisible communauté palestinienne. Le premier point à prendre en considération est que ce qu’on appelle la Palestine, c’est le résultat d’un découpage administratif résultant de la défaite en 1918 de l’Empire Ottoman qui était allié avec l’Allemagne dans la Première Guerre mondiale : les Britanniques administrèrent suite à un accord avec les Français, la Palestine, et les Français s’installèrent au Liban et en Syrie. Ce qu’on appelle encore aujourd’hui la Palestine n’a jamais eu d’existence réelle autrement que du fait de ce découpage, elle n’a jamais été, du moins avant 1967, l’émanation de la volonté d’un peuple de faire une nation. Il faut bien comprendre qu’un peuple émerge le plus souvent comme une nation du fait d’une guerre, et c’est la Guerre des Six jours qui a commencé à mettre en place un nationalisme palestinien. Il faut en tenir compte bien entendu, et cela veut dire qu’il faut envisager deux États, bien que les Palestiniens soient peut-être encore plus divisés que les Juifs sur ce qu’il faudrait faire pour arriver à la paix.

 

Depuis quelques jours, conséquemment à l’attaque du Hamas et à la riposte israélienne, on assiste à une guerre des cartes. Les cartes ci-dessus sont appréciées des pro-palestiniens parce qu’ils pensent que cela démontrerait que les « sionistes » ont pris les terres des Palestiniens. En réalité cela ne démontre rien du tout. D’abord parce qu’en 1946 la Palestine n’existait que comme un territoire – et non un État – sous l’administration britannique. La carte la plus à gauche parle d’implantation juives. Mais les Juifs étaient encore à cette époque très nombreux sur ce territoire, certes ils étaient opprimés par les musulmans, mais historiquement ils étaient là depuis la nuit des temps. Marx parle de leur misère à Jérusalem. Donc ils étaient bien là, même si périodiquement ils subissaient des pogroms. Lorsque les Juifs d’Europe centrale, de Pologne et de Russie commencèrent à migrer vers la Palestine, la communauté juive de Palestine était en voie d’extinction du fait des mauvaises manières que leur infligeaient les Arabes. Ils vivaient dans un état de soumission et de misère effroyable. Non seulement ils payaient l’impôt des dhimmis, mais on leur volait aussi leurs enfants pour en faire des musulmans ! Avant l’installation des sionistes, il n’y avait pas de paix, ni d’harmonie entre les Juifs autochtones et les Musulmans. C’est une fable que certains tentent de mettre en scène pour tenter d’expliquer l’origine des problèmes par la colonisation des sionistes, pièce rapporté sur un territoire sans problème. 

 

Ensuite la guerre de 1948 n’est pas une révolte des Palestiniens qui n’existaient pas en tant que peuple, mais une guerre déclenchée par les États arabes, notamment la Jordanie qui voulait rattacher la Cisjordanie à son royaume et l’Égypte qui ambitionnait alors de prendre Gaza. Les différentes guerres qui se sont succédées ont vu en effet les Territoires dévolus au futur État arabe de Palestine, par les accords de 1948 de l’ONU, rétrécir au fur et à mesure des refus des États arabes puis du Fatah, puis du Hamas de négocier sérieusement. L’élargissement du territoire contrôler par Israël est d’abord la conséquence de ce refus. La colonisation israélienne a Ensuite fait le reste. Cette colonisation qui a mythé complètement l’espace au détriment d’ailleurs de la sécurité d’Israël est la conséquence à la fois du refus Palestinien et de la droitisation continue d’Israël, mais aussi de la poussée démographique extraordinaire qui a eu lieu dans ce pays après la chute du mur de Berlin. La tricherie des propalestiniens occidentaux qui sont plutôt antisémites tend à présenter la misère des Palestiniens comme une simple spoliation d’une terre historiquement palestinienne. Cette tricherie occulte deux éléments importants : le premier est qu’entre 1875 et 1948, les Juifs qui se sont installés en Palestine ont racheté ces terres à des propriétaires arabes, le second c’est qu’à partir du dernier quart du XIXème siècle, période où les Juifs commencent à migrer vers la Palestine, l’Empire Ottoman qui avait la main sur ce territoire, va encourager et financer une migration de musulmans qui vont venir aussi s’installer là, venant de tout le pourtour de la Méditerranée, notamment d’Algérie – probablement consécutivement à la colonisation de l’Algérie par la France. Henry Laurens, pourtant propalestinien acharné, le montre dans le tome 1 de son Histoire de la Palestine[2]. Bien entendu cela ne peut pas excuser les mauvaises manières que les Juifs devenus Israéliens ont faites aux populations arabes. Il faut évidemment revenir sur l’idée qu’il y aurait originellement une population arabe et musulmane en Palestine. Celle-ci ne s’y est installé qu’à la faveur des conquêtes arabes. Avant celles-ci, les Juifs étaient installés sur un vaste territoire qui débordait d’ailleurs de la Palestine mandataire, vers la Cisjordanie et le Liban, comme le montre la carte ci-dessous. Les Philistins étaient un peuple d’origine grecque qui se localisaient dans la bande de Gaza, c’est eux qui ont donné le nom à la Palestine. Mais ils n’avaient rien d’arabe. 

 

Entre les deux guerres mondiales, la Palestine mandataire non seulement a échappé à la débâcle de l’économie mondiale, mais elle a connu un boom économique très fort. Cela a donné beaucoup de travail aux populations arabes qui sont venues souvent du Liban, de la Cisjordanie et de l’Égypte pour offrir leur bras et s’installer. L’économie était tirée par le Yichouv. Les salaires étaient deux fois plus élevés pour les Arabes que ce qu’ils étaient dans les autres pays arabes, ce sont donc des milliers d’Arabes musulmans qui vinrent aussi, s’installer sur ce bout de terre[3]. Jusque vers ce moment la Palestine était considérée comme un territoire très peu peuplé et sans avenir économique, délaissé d’ailleurs par les gros propriétaires fonciers arabes qui accablaient les paysans musulmans, ce qui ne pouvait pas se faire avec les Juifs nouvellement installés.



[1] https://www.i24news.tv/fr/actu/israel-en-guerre/1697089367-trump-monte-au-creneau-israel-n-etait-pas-prepare-netanyahou-m-a-decu

[2] La Question de Palestine, L’invention de la Terre Sainte, Fayard, 1999.

[3] Jacob Metzer, The Divided Economy of Mandatory Palestine, Cambridge University Press, 1998

Henri Barbusse, Le feu, journal d’une escouade, Flammarion, 1916

  C’est non seulement l’ouvrage de Barbusse le plus célèbre, mais c’est aussi l’ouvrage le plus célèbre sur la guerre – ou le carnage – de...