mercredi 28 février 2024

Shlomo Sand, Deux peuples pour un État, Le seuil, 2024

  

Dans la situation désastreuse où se trouve Israël et Gaza, beaucoup de livres sont publiés ces temps-ci en France pour faire une surenchère d’allégeance aux Palestiniens. Mais quoi de mieux qu’une « vrai » juif pour critiquer Israël, quoi de mieux qu'un dissident russe pour critiquer Poutine ? Qu’il le veuille ou non, Shlomo Sand est l’auteur préféré des antisémites de gauche et’de droite. Ce faux historien, mais vrai propagandiste, vient de commettre un nouveau livre, et je vais en parler parce que Shlomo Sand c’est la bible de la gauche antisémite. On distingue l’historien du propagandiste, non pas à cause d’une neutralité supposée, mais à cause de l’attention qu’on accorde à des faits avérés. Le sujet est brûlant, au-delà de la guerre : quelle solution serait apte à stabiliser la région ? Shlomo Sand se fait vieux et ne sait plus ce qu’il dit. Il y a quelques années il nous disait que le peuple juif « fut inventé », donc qu’il n’existait pas. Mais aujourd’hui il suppose que sur cette malheureuse il y a deux peuples, les Palestiniens bien sûr dont il a épousé la cause il y a longtemps, pensant qu’ainsi il serait un peu moins juif que ce que son nom indique, et un second peuple qui est assez mal identifié. Des Juifs ? Un peuple qui n’existe pas ? Mais dès le début de son « roman » il nous dit, à l’aide de citations tronquées, notamment de Ben Gourion, que lorsque la Palestine a été colonisée par les Juifs d’Europe, les autochtones Palestiniens en réalité étaient des Juifs ! En voilà une nouvelle ! c’est d’ailleurs le fil rouge de son livre. Et donc si on suit le raisonnement scabreux de cet imbécile, des faux Juifs venus d’Europe – car pour Shlomo Sand, les Juifs n’ont jamais été contraints de quitter massivement la Palestine – auraient colonisés les vrais Juifs qui avaient choisi bien gentiment et sans contrainte de se faire musulmans ! Aimé des antisémites de gauche comme de droite, Shlomo Sand nous dit que certes les Arabes ont bien conquis la Palestine, mais ils ont seulement chassé les dirigeants qui leur étaient hostiles et ont laissé tranquille la population qui pouvait tranquillement exister. Donc si on suit jusque-là le raisonnement du malheureux Shlomo Sand, il y aurait eu deux formes de colonisation : l’une bonne, celle des arabes, et l’autre mauvaise celle des Juifs ou plutôt des faux Juifs – dont lui-même fait partie d’ailleurs ! 

Le 7 octobre le Hamas se félicitait se son pogrom réussi 

Shlomo Sand a aussi la mémoire qui flanche, dans son nouveau livre il avance que comme tout bon militant de gauche – en fait il appartenait à l’extrême-gauche trotskiste, celle du Matzpen – il était antérieurement pour une solution à deux États, ce n’est pas vrai, les militants trotskistes comme lui, étaient pour la solution à un seul État, supposant que cela suffirait pour rapprocher sur le long terme les points de vue. Mais il nous dit que cette solution avec deux États a échoué par la seule faute des Juifs israéliens, à cause de leur fourberie native. Et donc que maintenant c’est bien mieux une solution à un seul État ! La solution à deux États – à mon avis encore la seule possible quoiqu’on en pense sur le long terme – a d’abord échoué en 1948 quand les pays arabes ont déclaré la guerre à Israël lorsque cet État a été reconnu par l’ONU, puis ensuite en 1956, en 1967 et encore en 1973. Ces quatre défaites de rang ont chaque fois amené Israël à s’agrandir, avec notamment l’idée, au moins pour une partie des Israéliens, d’échanger des territoires contre la paix. La « colonisation » ininterrompue est donc d’abord le résultat des guerres engagées par les pays arabes, puis le refus des Palestiniens de transiger. Aujourd’hui encore le Hamas vise ouvertement de rejeter les Juifs à la mer, d’épurer leur territoire. Les cartes ci-dessous montrent cette évolution, les militants pro-palestiniens aiment à mettre en avant ce grignotage pour prouver à quel point les Israéliens – en dehors de Shlomo Sand et de ses semblables – sont franchement mauvais. Mais cette carte ne prouve rien. Pour faire un parallèle avec la guerre en Ukraine, on peut dire que les Russes ont annexé les régions du Donbass parce que les Ukrainiens ont refusé, sous la pression des anglo-saxons et de l’OTAN, de négocier quoi que ce soit avec eux. C’est d’ailleurs ce refus constant qui a poussé finalement les Israéliens à s’enfermer dans les idées de colonisation à outrance et à finalement donner leur confiance aux représentants de la droite et de l’extrême-droite religieuse qui prônent l’usage de la force. Mais Shlomo Sand ne s’embarrasse pas des subtilités de la cause et de l’effet. Pour lui le fait que l’extrême droite israélienne ait une grande importance est la preuve que les Juifs ont effectué un « virage à droite ». Pour être juste il faut se souvenir de deux choses, d’abord que le gouvernement de Netanyahu est minoritaire, ensuite que cette droite instable qui gouverne est la conséquence de l’échec du parti travailliste. Mais glissons sur cette question qui n’est pas tout à fait le sujet. Le 7 octobre on a vu que les provocations sanglantes du Hamas ont entraîné une riposte violente de l’armée israélienne. Le gouvernement israélien avait-il d’autres solutions ? Je n’en sais rien, un journal antisémite comme Le monde le pense, mais il est certain que les conséquences du pogrom du Hamas le 7 octobre 2023 sont terribles pour les Gazaouis.   

 

Ce livre a été rédigé – plus ou moins bien – avant l’attaque du Hamas sur les civils israéliens et l’enlèvement des otages. Il est d’ailleurs traduit de l’hébreu plutôt mal, je veux dire dans un mauvais français. Le principe même du livre est démenti par la brûlante actualité. Bien qu’il se dise pessimiste sur la possibilité d’un État unique sous lequel Arabes et Juifs vivraient en bonne entente, Shlomo Sand fait semblant de croire que c’est la voie de la raison et donc que si c’est la voie de la raison, si on peut l’imaginer, elle est aussi possible ! C’est de la pure métaphysique : si on peut imaginer que Dieu existe, alors il existe ou existera ! On trouve ce genre de formulation chez Hegel par exemple, avec moins de candeur et plus de sophistication. Les événements récents, de l’attaque du Hamas le 7 octobre au désastre de Gaza encore en cours au moment où j’écris, montrent qu’au contraire il est nécessaire et urgent de séparer les deux peuples de manière radicale, même si pour Shlomo Sand le peuple juif n’existe pas ! D’ailleurs il cite volontiers l’exemple de la séparation réussie entre la République Tchèque et la Slovaquie. Le confondant asse curieusement avec l’éclatement de la Yougoslavie qui est seulement le résultat des entreprises de déstabilisation des Américains et des bombardements illégaux de l’OTAN. Les frontières, aussi stables soient-elles, sont toujours modifiées dans le temps par des rapports de force. C’est un lieu commun. Et c’est aussi ce qu’on voit en Ukraine, nation née de la décomposition de l’URSS, mais dont le tracé des frontières ne convient à personne, que ce soient les Polonais, les Hongrois ou les Russes. Bien entendu, séparer Gaza de la Cisjordanie lorsqu’on a défini plus ou moins bien les Territoires Palestiniens, est une autre source de problèmes, un État national – ce qu’auraient pu devenir les Territoires Palestiniens – digne de ce nom doit conserver un minimum de continuité territoriale pour être pris au sérieux.  

 

Évidemment le fait que les deux peuples soient plus ou moins imbriqués l’un dans l’autre sur cette étroite bande de terre, rend le projet des deux États difficile. Et c’est sur cette réalité que Shlomo Sand va bâtir sa propagande pour un seul État binational. Pour Shlomo Sand, la Palestine – Israël et les Territoires palestiniens – est de fait un État binational, tellement les deux populations sont imbriquées l’une dans l’autre. La poursuite d’un mouvement de colonisation continue qui entraîne le mitage des territoires, rend les choses très compliquées. Il est très probable que les Juifs qui veulent toujours coloniser un peu plus aient dans l’idée que non seulement cela permet une meilleure sécurité en encadrant plus facilement les Palestiniens, mais qu’en outre ça renforce sur le long terme l’idée d’un grand Israël. Shlomo Sand est dans l’erreur la plus totale parce qu’il ne parle que de la colonisation juive en Palestine. Il suppose que la colonisation arabe de la Palestine n’a pas été une colonisation de peuplement – les Palestiniens sont selon lui les anciens Hébreux ! Il dénonce l’apartheid en Israël même, les Arabes israéliens n’ayant pas les mêmes droits que les Juifs israéliens. Il oublie volontiers qu’avant le mandat britannique les Juifs n’avaient pas les mêmes droits que les Arabes. C’était d’ailleurs quelque chose que dénonçait Karl Marx[1], mais Shlomo Sand a abandonné son marxisme d’origine depuis longtemps comme tous les trotskistes et assimilés. Il préfère s’en tenir à la fable parfois colportée par des antisémites malveillants, selon laquelle, avant la création d’Israël Juifs et Arabes s’entendaient très bien au Maghreb comme au Machrek. Mais non, les Juifs ne sont sortis que du statut de dhimmi que grâce à la colonisation française et britannique. C’est un fait indiscutable, c’est tellement vrai que les Juifs d’Algérie, et qui étaient là bien avant la conquête arabe, après l’indépendance choisirent de s’exiler vers la France, le pays qui les avait émancipés.

 

Néanmoins, en l’état actuel des choses, si on considère la Palestine dans son ensemble, on peut parler d’une sorte de guerre civile, voire d’une guerre de religions. Sauf évidemment que Shlomo Sand ignore volontairtement le caractère vindicatif de l’Islam. La bonne conscience antisémite d’extrême-gauche dont Shlomo Sand, juif honteux, se fait le porte-parole, est hémiplégique, elle regarde essentiellement les misères réelles des Palestiniens, mais veut ignorer les misères que les Juifs ont subies pendant des siècles sous la férule des Musulmans. Mais ce n’est pas là la seule confusion intéressée qu’il met en scène. Le voilà qu’il s’essaie à définit le sentiment national. Là ça devient franchement cocasse. Il fait la distinction entre État et nation, pourquoi pas, pour supposer que la nation est toujours créée par l’État. Autrement dit la nation existe seulement par la volonté coercitive de l’État. Que l’État par son travail solidifie la nation me semble juste et indiscutable, qu’il produise pour cela un roman national, c’est une évidence. Mais cela n’explique en rien l’avènement de l’État lui-même : qui le crée, qui en fait une référence plus ou moins évidente pour le peuple ? Ses références sont mauvaises et limitées sur cette question, s’il avait lu Strayer[2], il aurait mieux compris les rapports qu’il peut y avoir entre État et nation. Si l’ethnicité n’est pas la seule détermination de la création de l’État, la culture au sens le plus général et donc la nation sont bien à l’origine de l’État. Renverser cette causalité participe d’un hégélianisme mal digéré selon lequel le mot précède la chose. S’il est convenable de dire que l’État national est né en Europe de la Révolution française, il faut se poser la question de sa raison d’être. Bien avant 1789, le Maréchal Vauban expliquait les frontières de la France par une forme d’unité géographique défini par les caractéristiques physiques du Royaume[3]. L’idée de Shlomo Sand est de démontrer que l’État israélien n’a pas de support matériel réel et n’existe qu’en référence à la Bible. Pire encore pour lui les autochtones sont les Arabes palestiniens, refusant, contre toute évidence, de regarder la conquête arabe comme une colonisation de peuplement. C’est un défaut d’analyse impardonnable parce que s’il est vrai que des colons juifs sont bien venus s’installer en Palestine pour des raisons diverses et variées, Shlomo Sand ne répond pas aux deux questions suivantes, qu’en était-il du noyau juif historique de Palestine ? Doit-on chasser les derniers colonisateurs et seulement eux ou remonter plus loin et chasser tous les colonisateurs qu’ils soient juifs ou arabes ou musulmans ? Sans remonter jusqu’à la nuit des temps, Henry Laurens, essayiste pro-palestinien virulent, a écrit une monumentale histoire de la Palestine. Dans le tome 1 il explique que sous l’Empire Ottoman quand les Juifs commencèrent à arriver dans le dernier quart du XIXème siècle, les Turcs encourageaient matériellement les Musulmans à coloniser la Palestine, territoire alors peu peuplé[4]. Et il en vint de partout. D’Algérie comme de Syrie. Et puis ensuite dans l’entre-deux-guerres alors que le Yichouv était une des rares régions de prospérité dans le monde en crise, vinrent s’installer des Arabes depuis l’Égypte, la Transjordanie ou encore le Liban et la Syrie. Sont-ce là les autochtones selon Shlomo Sand ? 

Pogrom de Jérusalem en 1920, nommé par les Arabes émeutes de Nabi Moussa 

Pour appuyer ses raisonnements, Shlomo Sand qui de temps à autre se dit athée, va s’appuyer sur les pires des religieux orthodoxes qui récusaient l’idée de construire un État juif en Palestine. Comme quand il désigne les Palestiniens comme les vrais descendants des Hébreux, il suppose que les « vrais Juifs » sont ceux qui sont pour un État binational ! Et donc c’est aussi pour cela que tôt ou tard cet État national deviendra une réalité matérielle ! Ce qui est assez inconséquent, c’est que pour appuyer l’idée d’un État binational, il se sert d’une vague démonstration pour nous dire que les Palestiniens et les Juifs sont une même ethnie, mais que par ailleurs il répète continument que l’ethnie et la race n’existent pas et ne sauraient être des justification à la formation d’un État ! On voit la fourberie du propos, il pioche des arguments quand ça l’arrange du côté des religieux ou des côtés des racistes, et quand ça le dérange il les rejette. Il ne peut logiquement pas dire d’un côté que le peuple juif n’existe pas et de l’autre qu’il est le même que le peuple palestinien. Ce n’est pas très sérieux. Même à supposer que les Juifs et les Arabes de Palestine aient les mêmes racines et que pour cela ils ne doivent faire qu’un seul État, une seule nation, encore faut-il en convaincre les Juifs et les Arabes. Mais pas un seul moment Shlomo Sand n’examine le fait que lui et ses semblables n’ont aucun impact sur la réalité politique de cette région. Or justement une nation qu’elle repose ou non sur une fiction initiale suppose l’adhésion de ses citoyens qui s’y reconnaissent. Tant que l’insécurité règnera, les Israéliens resteront très éloignés d’un État binational. 

Une troisième vague migratoire des Juifs vers le Proche-Orient suit la création de l'État d'Israël le 14 mai 1948. 

L’autre grand défaut du « raisonnement » de Shlomo Sand, c’est qu’il regarde seulement du côté des Juifs qui selon lui, et de tout temps, ont manifesté un racisme exacerbé vis-à-vis des Arabes. Il n’est évidemment pas question de nier le racisme anti-arabe des colons juifs, mais il est un fait que ceux-ci se sont trouvé dès le départ face à un racisme puissant de la part des Arabes. Bien avant l’implantation des colons juifs en Palestine, les Juifs ancestraux pour le coup étaient continuellement rabaissés, martyrisés, violés, victimes de pogroms c'est ce que rappelait Marx dans le texte que j’ai cité ci-dessus. Ce racisme anti-juif a d’ailleurs amené le grand mufti de Jérusalem à lever une armée d’Arabes palestiniens pour aller combattre contre le bolchévisme aux côtés des nazis, la 13ème division SS « Handschar », créée en mars 1943 et dissoute en mai 1945. La preuve que les Juifs sont mauvais et considèrent les Arabes comme des êtres inférieurs c’est qu’ils refusent les mariages mixtes. C’est selon Shlomo Sand la preuve de l’existence d’un régime d’apartheid. Il est vrai que les Juifs se sont préservés de leur disparition en préférant la forme endogamique du mariage, mais cela a toujours été le cas pour eux qu’ils soient en exil ou qu’ils soient en Israël. Mais est-ce que pour les Arabes palestiniens le mariage mixte est tolérable ? Rien ne le prouve, surtout s’il s’agit de marier sa fille ! Chez les Arabes palestiniens, les mariages sont contrôlés et donc endogamiques de fait. Bien entendu si les mariages mixtes étaient largement facilités, cela modifierait complètement le problème, mais à ce moment-là, qu’on le souhaite ou non, la question religieuse serait dépassée. Shlomo Sand la néglige, et du coup il oublie que si les ultra-religieux juifs sont des personnes très pénibles, la religion musulmane est dans l’ensemble bien plus contraignantes et bien moins ouverte que la religion juive sur la question des droits de l’homme et de l’éducation par exemple. Alors qu’officiellement les Français de « souche » ne sont pas en guerre avec les Musulmans, les relations mixtes pour les filles d’origine musulmane ne sont pas bien vues et stigmatisées par les Musulmans eux-mêmes. 

Visite de Lors Balfour à une colonie juive de Palestine en 1925 

A presque toutes les pages il y a des contradictions ou des erreurs de grande taille. Par exemple Shlomo Sand suppose que la conscience palestinienne d’être une nation remonte à 1950 après la prise en compte de la Nakba. C’est totalement faux, cela ne commence seulement qu’en 1967 après la Guerre des Six Jours, c’est-à-dire quand la défaite des pays arabes contre Israël est consommée. Le sentiment d’abandon des Palestiniens eux-mêmes sera renforcé avec la défaite de la Guerre du Kippour en 1973. Autre question, celle du rachat des terres agricoles par des Juifs. Comme on le sait ces terres vendues aux Juifs étaient la propriété de grands propriétaires terriens arabes qui souvent vivaient au Liban ou en Turquie. Ce sont eux qui vendirent massivement ces terres aux Juifs. Et évidemment les Juifs voulaient les exploiter pour leur propre compte. Shlomo Sand par des Juifs qui achetèrent ces terres en employant le terme de spéculateurs. En vérité, les spéculateurs c’était les grands propriétaires arabes qui vendaient aux Juifs jusqu’à quatre fois plus cher ce qu’ils auraient vendu aux agriculteurs arabes de Palestine. C’est ce qu’on appelle la loi du marché. Mais au lieu de se retourner contre les grands propriétaires terriens, les agriculteurs s’en prirent aux Juifs, et c’est ce que fait Shlomo Sand aussi. On comprend bien que les paysans arabes de Palestine étaient maltraités, sous-équipés et exploités, et que les chasser des terres qu’ils cultivaient était un drame. Mais qui est responsable de ce drame, les Juifs ou le système latifundiaire arabe ? Pour Shlomo Sand c’est évidemment les Juifs qui auraient dû avoir un comportement responsable et socialiste pour ne pas se livrer à ce genre de transactions. Autrement dit les Juifs auraient dû avoir au préalable, c’est-à-dire avant de venir s’installer en Palestine, une conscience communiste au nom de la solidarité avec les paysans arabes. Il parie sur le fait que les Arabes de Palestine leur auraient alors fait une place de bon cœur ! 

Les pionniers juifs en Palestine amenèrent une mécanisation inédite dans la région – ici Un tracteur dans les marais du Kibboutz Nir David dans la vallée de Beit Shéan, décembre 1936 

Le cœur de l’ouvrage est fait d’une recension de tous ce que les penseurs juifs et quelques autres ennemis d’un État national israélien ont pu écrire. C’est très long et assez peu relié avec l’actualité, sauf à prétendre que ces gens-là avaient raison avant les autres, sur le mode on vous l'avait bien dit. Les Cassandre pourtant on le sait non seulement n'ont pas toujours raison, mais elles n’évitent pas les événements d’arriver. Je me suis demandé à quoi servait ce très long cours d’histoire intellectuelle, reprenant beaucoup de choses qu’on connait aussi bien sur Martin Buber, Gershom Sholem, Hannah Arendt, mais aussi beaucoup d’autres qu’on connait moins bien. Cela va dans deux sens, les Juifs sont les agresseurs et les Arabes les victimes. Et puis les Juifs ont été pervertis par le nationalisme européen. On se rend compte en lisant cette collection de citations plus ou moins digestes que ce que Shlomo Sand espère à travers cette démonstration c’est de ruiner l’idée d’État national. Mais ce faisant, il ouvre sans s’en rendre compte la porte aux formes de gouvernance mondialisée. Plus encore il ne répond pas à la question suivante : sans une posture nationaliste, Israël aurait-elle survécu ? D’ailleurs au fil de ces pages assez confuses, il ressort tout de même que pour Shlomo Sand le « nationalisme défensif » n’est peut-être pas tout à fait une mauvaise chose !    

Image de la Nakba, remarquez que sur cette image les femmes ne sont pas voilées 

L’idée centrale est que l’État binational c’est mieux que l’État national. Et pourquoi donc ? Essentiellement nous disent-ils parce qu’aujourd’hui les populations juive et palestinienne sont complètement imbriquées les unes dans les autres, et donc que nous avons à faire déjà à un seul État pour deux peuples. Cette idée est minoritaire aussi bien chez les Palestiniens que chez les Juifs. Il suffirait nous dit Shlomo Sand d’accorder simplement des droits supplémentaires aux Palestiniens pour les mettre à égalité avec les Juifs et ainsi former un État binational qui respecterait les cultures et les religions différentes. Certes il est exact que les Arabes ont des droits inférieurs aux Juifs, même les Arabes qui ont la nationalité israélienne. Mais cette logique que Shlomo Sand compare au combat des noirs américains pour les droits civiques se heurte à de nombreux obstacles. Évidemment le combat des afro-américains n’a presque rien à voir avec celui des Palestiniens, d’une part parce que les afro-américains ont été transplantés et que la culture qu’ils ont perdue, ils l’ont malheureusement abandonnée à l’Afrique. Ensuite parce que les Noirs américains n’avaient pas de religion suffisamment forte pour vouloir la conservée. Ils ont adopté la religion des blancs, la plupart se sont christianisés, et plus tardivement une petite partie d’entre eux s’est islamisée, faisant de cette appropriation un levier pour le black power. 

Travailleurs palestiniens de Gaza allant travailler en Israël 

Le second point c’est la puissance des religions et particulièrement de l’Islam. Shlomo Sand prône un État laïque où chaque peuple pourrait exercer librement son culte. C’est un point important que Shlomo Sand ne discute pas. Or il est très probable que chaque communauté craindrait dans ce système de se voir marginalisé. Peut-on parier sur la tolérance comme vertu principale de ces deux peuples ? Également Shlomo Sand milite pour le mariage mixte. C’est une opinion, une possibilité, mais rien ne dit que cette possibilité, fut-elle inscrite dans la loi, serait suffisamment attractive pour être pratiquée. On sait que dans les pays libéraux – au sens des droits de l’homme – les communautés juive et musulmane ne pratiquent pas beaucoup le mariage mixte. Pourquoi donc cela les séduiraient-ils dans un territoire où règne une grande méfiance ? Pire encore, un des problèmes centraux de l’État binational, c’est la question des inégalités économiques. Elle existe bel et bien et forme dans cet espace un autre mur. Ce serait une association entre des plus riches et des plus pauvres, les plus riches continuant de dominer par l’argent, le savoir et leur capacité d’entreprendre. Shlomo Sand ne parle pas de cette question. Il disserte sur les exemples réussis, selon lui, d’États binationaux. Et il cite comme modèle la Belgique, occultant le fait que les communautés flamande et wallonne qui cohabitent ont en permanence des velléités de séparation. Défendant un modèle fédéraliste, il en vient à donner comme exemple l’Irlande ! Supposant que les vieilles querelles séculaires entre l’Irlande du Nord et l’Irlande du Sud se sont éteintes. Mais même si ces vieilles querelles sont bien moins violentes que par le passé, c’est parce que dans un premier temps les deux États ont coexisté. Cela n’a pas abouti cependant à un État binational.   

 

Le modèle fédéraliste étatsunien n’est pas un modèle non plus, quand on voit par exemple que le Texas a une forte velléité d’en sortir et que cela pourrait advenir si par exemple Trump était empêché de se représenter aux élections de novembre 2024. Mais la plupart des modèles fédéralistes reposent sur une expérience d’États séparés définis par une emprise territoriale nette. Or Shlomo Sand imagine, suite à tous les tenants d’un État binational, que chaque communauté régnerait sur les domaines sociaux, éducatifs et religieux, laissant l’économie, la défense et les douanes à un État fédéral. Cette utopie est curieuse parce que pour avoir un ministère de la défense, il faut que les deux communautés aient des intérêts stratégiques communs. La partie palestinienne regardant plutôt du côté de ce qu’on appelle le Sud global et la partie juive, encore rattachée pour un moment aux Etats-Unis. Vouloir fonder un État laïque en laissant au centre deux populations sous l’emprise des religions est certainement le meilleur moyen d’éloigner les deux peuples. 

 

L’autre point important qui n’est jamais analysé par Shlomo Sand et ceux qui l’ont précédé dans la défense d’un État binational, c’est ce qu’on pourrait appeler « la confiance ». On voit mal en effet les Israéliens confier des pouvoirs de police à la partie musulmane. Mais les défenseurs de cette thèse supposent qu’en signant une paix fondée sur l’existence d’un tel État la confiance reviendrait entre les deux communautés. Le bon sens indique que la confiance est liée à l’expérience. Et donc que celle-ci ne peut revenir que si les deux communautés sont maîtresses de leur destin. C’est pour cette raison que deux États bien délimités sont la solution, parce que chaque communauté pourrait alors faire l’expérience de leur souveraineté, ce qui n’empêcherait pas les coopérations. Évidemment la mise en place de deux États possédant leur autonomie et leurs frontières n’est pas compatible avec le mitage de la colonisation. Mais elle peut se travailler. Le Groupe d’Aix, groupe de réflexion israélo-palestinien a commencé à avancer des solutions, notamment sur les échanges de territoires de façon à ce que les deux futurs États ne soient pas imbriqués l’un dans l’ordre. Également ce groupe a mis l’accent sur la possibilité d’un développement économique d’un futur État palestinien autonome[5]. Car évidemment la clé de la paix pour les Palestiniens est bien de sortir, d’une manière ou d’une autre de leur position économique dégradée, si l’amélioration sensible du bien-être ne suit pas, tous les plans les mieux pensés tomberont à l’eau. Dans un État binational tel que l’ont présenté ses tenants, il est presque certain que les travailleurs arabes seraient dépendants de l’offre de travail émanant de la partie juive. 

 

Ma conclusion est la suivante pour que deux communautés se fondent dans un seul État, de la mer jusqu’au Jourdain, selon la formule utilisée à la fois par les ultra-orthodoxes et Shlomo Sand, il faut d’abord de la confiance. Celle-ci n’existe pas. Mais à mon sens elle pourrait être retrouvée au fil du temps si les deux communautés, tout en restant proches, exerçaient pour elles-mêmes leur souveraineté, ce qui ne les empêcheraient pas de monter des projets de partenariat dans les domaines économique, éducatif ou de sécurité.


[1] Karl Marx, « Declaration of War. – On the History of the Eastern Question », New-York Daily Tribune, April 15, 1954.

[2] Joseph R Strayer, On the Medieval Origins of Modern State, Princeton University Press, 1970. Traduction Les origines médiévales de l’État moderne, Payot, 1979.

[3] Les Oisivetés de Monsieur de Vauban, ou ramas de plusieurs mémoires de sa façon sur différents sujets, Champ Vallon, 2007.

[4] La question de Palestine, l’invention de la Terre Sainte, 1799-1922, tome 1, Fayard, 1999.

[5] http://aix-group.org/

jeudi 22 février 2024

Les hommages à Manouchian

  

La vie moderne est ainsi faite que tout est objet de récupération, et ce mouvement publicitaire rend tous les hommages qu’on peut accorder à de véritables héros suspects. Macron, grand spécialiste des enterrements, premier ordonnateur des pompes funèbres d’une République moribonde, a décidé de faire entrer Manouchian au Panthéon. Ça participe d’une forme de spectacle dégénéré qui va d’un hommage à Johnny Halliday à un hommage à Manouchian en passant par Charles Aznavour et Simone Veil, noyant dans un système stupide d’équivalence des personnalités totalement différentes.  Manouchian fut un grand héros de la Résistance, c’est incontestable. Mais Macron, cette vieille crapule, en le panthéonisant semble vouloir enterrer avec cette cérémonie funèbre l’esprit de résistance propre à l’identité de la France. Manouchian n’a pas besoin de cela pour être grand. Avec cela chacun va chercher son Manouchian à lui. D’abord il y a les « communistes », enfin, le PCF d’aujourd’hui qui tentent de récupérer l’héritage glorieux de leur parti. Mais le PCF d’aujourd’hui n’a plus aucun rapport avec celui de la Résistance. Si je regarde les unes récentes de L’Humanité, je vois que la ligne éditoriale oscille entre deux pôles : d’un côté servir la soupe à Macron qu’on va interviewer comme si cette canaille avait quelque chose à dire d’intéressant, et de l’autre rappeler que le PCF fut aussi peuplé de vrais résistants. Il est clair pour tout le monde que le PCF d’aujourd’hui ne résiste à plus rien, ni à l’OTAN et à sa guerre en Ukraine, ni aux destructions programmées de la nation sous la férule de la bureaucratie européiste et va-t-en-guerre. Je n’ai pas vu Fabien Roussel, prompt à dénoncer Marine Le Pen qui n’a aucun pouvoir, critiquer les dépenses d’armement de Macron pour la guerre en Ukraine. Le PCF d’aujourd’hui qui n’a plus beaucoup d’audience chez les ouvriers, est passé totalement à côté de la révolte des Gilets jaunes, et au contraire l’a combattue. 

 

Leur seule ligne directrice c’est de combattre une extrême droite fantasméetoute puissante. Et donc L’Humanité a approuvé la théorie du barrage à Marine Le Pen aussi bien en 2017 qu’en 2022. Et pourtant entre 2017 et 2022, il n’y avait plus aucune illusion à se faire. Macron est le vrai représentant de la droite extrême répressive et néfaste aux travailleurs. Jadis le PCF était à la pointe de la lutte contre l’OTAN, aujourd’hui ce parti ne s’oppose en rien à la livraison d’armes à Zelensky qui défend pourtant les intérêts américains. Totalement aligné sur la doxa de l’Occident, L’Humanité y est allé de sa larme sur Saint-Navalny[1]. Fabien Roussel le 21 février 2024, sur France Info, disait que la France et l’UE avaient bien raison d’aider l’Ukraine à faire la guerre à la Russie et à l’entretenir. N’étant manifestement plus dans l’opposition, le PCF désigne comme son seul ennemi la Rassemblement National. Ce qui est tout à fait plaisant pour Macron. Pour ma part, je ne fais aucune différence entre Macron et le Rassemblement National. Et je ne crois pas que le parti de Marine Le Pen soit moins ou plus facho que celui de Macron, j’ai encore le souvenir brûlant des Gilets jaunes emprisonnés, matraqués énucléés, les amputant de leur main, bastonnés et gazés, pendant que les journalistes de L’Humanité tentaient de faire croire que ce vaste mouvement était manipulé par le Rassemblement National. Les voilà donc aujourd’hui qui ont fait campagne pour qu’on interdise, comme le demande Macron, Marine Le Pen de l’hommage public du Rassemblement National à Manouchian. Pour ma part, que Macron rende un hommage bruyant à Manouchian qui était son exact opposé, c’est tout aussi incongru que l’hommage du Rassemblement National. En faisant semblant qu’il y ait des différences de fond importantes entre Macron et Marine Le Pen, le PCF trompe son maigre public qui croit que ce parti est encore communiste. Mais comme Macron et Marine Le Pen, le PCF est pour l’Union européenne, pour l’OTAN et pour la poursuite de la guerre contre la Russie. 

Voilà maintenant Le monde qui salue Manouchian du bout des lèvres, certes, c’était un communiste, mais « un communiste atypique », nous dit-on. Selon eux le communiste typique c'est l'apparatchik qui suit bêtement les consignes de Moscou. Le monde est embêté par cet hommage parce qu’il montre qu’évidemment les communistes de l’époque sont entrés bien plus rapidement qu’on ne le dit généralement dans la Résistance. Quand Manouchian combattait en risquant sa vie les nazis, l’ancêtre du Monde s’appelait Le Temps, c’était le journal de référence ! Il commentait les discours d’Hitler comme aujourd’hui il commente sans rire les discours de Biden, Trump ou Macron, et il soutenait le maréchal Pétain comme aujourd’hui ils soutiennent Josep Borrell ou Ursula von der Leyen. Mais comme Manouchian est intouchable, Le monde fait comme si celui-ci était un accident dans l’histoire du PCF. Soumis depuis ses origines à tous les pouvoirs, Le monde ne déroge pas à la mode d’aujourd’hui. D’autres encore en profitent pour faire la réclame pour une politique immigrationniste, au motif que Manouchian, étranger pourtant, se battait pour la France, tandis que des Français de souche se couchaient devant l’ennemi.

 

 

 

Sur Arte on rendait un curieux hommage à Manouchian avec deux documentaires. On y passait un vieux documentaire des années quatre-vingts, Des terroristes à la retraite, réalisé par Mosco Boucault. Ce documentaire avançait très imprudemment que c’était le PCF lui-même qui avait vendu Manouchian à la Gestapo. L’intention de nuire était évidente. On sait depuis assez longtemps maintenant, grâce aux travaux des historiens, que c’est la police française qui a traqué et livré la bande de Manouchian à l’occupant. En panthéonisant les Manouchian, le croquemort Macron avait l’air d’enterrer deux idées à l’opposé de ce qu’il est : l’idée de communisme et de fraternité, et celle de résistance qu’il s’emploie pratiquement tous les jours à réprimer. Cette panthéonisation est proprement écœurante, pour rendre hommage à Manouchian, il vaut mieux encore réécouter le poème de Louis Aragon, un mauvais communiste selon les canons du Monde, que de regarder cette cérémonie morbide. 

 

La version de L’affiche rouge était chantée par Feu ! Chatterton, avec une voix d’écouillé, et bien peu d’émotion. On préfèrera la version plus virile de Léo Ferré lui-même qui ne s’est pas compromis dans ce genre de business tarifé et opportuniste pour servir la soupe à un politicien louche. 

https://www.youtube.com/watch?v=SFt2v4OSTbU


[1] https://www.humanite.fr/monde/alexei-navalny/russie-la-mort-de-navalny-confirme-de-sombres-perspectives

mardi 20 février 2024

Sur le décès de Navalny

  

 Si les médias en Occident rechignent à parler du sort de Julian Assange qui écorne l’idée que les Etats-Unis et l’Occident en général représentent l’idée de démocratie, ils sont en revanche acharnés à mettre en scène Navalny comme un martyr de La lutte pour cette même démocratie. C’est selon eux que le régime de Poutine est une dictature qui fait assassiner ses opposants à tour de bras, par opposition aux belles démocraties occidentales. En vérité, personne ne sait rien sur les conditions du décès de Navalny. Et moi non plus d’ailleurs, on sait que dans les prisons, russes ou américaines, italiennes ou françaises, tout peut se produire, une crise cardiaque comme un règlement de compte entre prisonniers. Mais, vieux réflexe pavlovien, toute la presse qui n’en sait pas plus que moi, accuse Poutine. Quelles sont les idées de ce remue-ménage ? La première idée est de jouer sur l’émotion du lecteur qui ne sait pas grand-chose de Navalny et qui a défaut de capacités d’analyse possède un cœur qui le pousse à l’émotion. L’agent des Américains, Benoît Vitkine, titrait stupidement dans le journal Le monde, « Alexeï Navalny meurt en emmenant avec lui « les derniers espoirs » d’une Russie libre ». VItkine ajoute que par sa rigueur et son intégrité, Navalny a redonné foi à la politique. L’imbécilité du propos est frappante, d’abord parce que Vitkine suppose que Navalny en tant qu’opposant à Poutine avait une importance pour les Russes, ce qui est faux, les Russes généralement sont derrière Poutine à 80% et non derrière Navalny. Une petite frange de modernistes et européiste est peut-être intéressée par ce que racontait et ce que représentait Navalny, mais j’en doute. Ensuite Vitkine veut nous dire que sans Navalny les Russes seraient incapables de secouer le joug du dictateur ! La faible audience de Navalny en Russie, son isolement, donnent à comprendre que Poutine n’avait aucun intérêt à son assassinat. Sauf à penser que Poutine est fou et méchant de nature. Le monde admettait par ailleurs qu’il ne savait rien des conditions dans lesquelles était décédé Navalny, autrement dit sans rien savoir il décidait de ce qu’il en était. Ça n’empêche pas non plus le journal atlantiste Libération de décréter qu’il a été tué par Poutine. C’est comme ça qu’on fait de l’information aujourd’hui en France, on ne s’embarrasser pas de démontrer quoi que ce soit, on affirme. Ce journal ne présente même pas ça comme une hypothèse plus ou moins probable, mais comme une certitude. Cette précipitation des médias occidentaux à accuser Poutine, rappelle que dans le temps ces mêmes médias avaient décidé que Navalny avait été une victime d’un empoisonnement, avant même d’avoir quelque élément pour le prouver. Pour Jacques Baud cet empoisonnement était certainement accidentel, mais en l’absence de preuve de quoi que ce soit Le monde s’en tenait et s’en tient toujours à la thèse de l’empoisonnement par le Kremlin[1]. Dans la mesure où Joe Biden et son équipe ont besoin d’émotion pour faire en sorte que le Congrès valide l’aide à l’Ukraine afin de continuer sa guerre, on pourrait tout à fait imaginer que c’est la CIA, ou quelque membre de la SBU ukrainienne qui est à l’origine de la mort de Navalny. En effet ce serait un bon moyen de contrer ainsi le succès de l’interview de Poutine par Carlson Tucker. Une hypothèse comme une autre au fond, puisque Navalny recevait des visiteurs ! Mais moi aussi  je n’ai rien pour étayer cette thèse qui sans doute vaut tout autant que celle d’un meurtre commandité par Poutine. pas plus pas moins. 

 

Quoi qu’en disent les médias dominants, Navalny n’était pas un saint. Mais en outre sur le plan politique il comptait pour peu, en 2018, un sondage pour les présidentielles le donnait à 2% d’intentions de vote, derrière Iabloko, alors que les médias menteurs occidentaux nous disent que c’était le leader de l’opposition. Il s’adressait à cette frange de la population russe, étroite, qui pense que son avenir serait de se rapprocher du modèle de l’Union européenne. Il avait été désigné par des membres de l’opposition à Poutine d’agent de l’étranger, que ce soit son ancien parti Iabloko ou le parti communiste russe. Jacques Baud explique pourquoi techniquement il est selon la loi russe un agent de l’étranger. Certes il n’est pas directement un agent de la CIA, mais ses financements étrangers, notamment ceux de la NED – organisme financé par le département d’État – en font bel et bien un pion manipulable par les Etats-Unis. Jacques Beaud rapporte d’ailleurs un tweet de John Brennan, ancien directeur de la CIA de 2013 à 2017, où celui-ci écrit, « Imaginez les perspectives pour la paix mondiale, la prospérité et la sécurité si Joe Biden était président des Etats-Unis et Alexeï Navalny le président de la Russie. Nous sommes bientôt à mi-chemin ». C’était avant l’élection de Biden, mais comme on le voit, John Brennan en avançant que nous sommes à mi-chemin, prévoyait la guerre en Ukraine pour faire éclater la Russie. Évidemment parier sur le fait que Navalny pourrait être élu en Russie prouve que les Américains ont beaucoup du mal pour saisir ce qu’est la Russie. Ce n’est pas l’Ukraine, et Nuland aurait bien du mal à y concocter un coup d’État pour y amener un marionnette au pouvoir, comme elle l’a fait en 2014. Navalny a par ailleurs été condamné avec son frères pour escroquerie, sur une plainte de la société française Yves Rocher. Le monde et d’autres journaux avaient alors accusé la firme Yves Richer d’être manipulée par le pouvoir russe. Mais Yves Rocher maintint ses accusations contre les frères Navalny et quand Navalny s’est retourné en France contre Yves Rocher, il a été débouté par les juges français[2]. Navalny cependant, cela tombe sous le sens, ne pouvait pas générer un tel activisme judiciaire, sans posséder des fonds en grande quantité. Mais d’où ces fonds proviennent si les frères Navalny n’ont pas de travail connu ? Personne n’en dit rien. On a également oublié l’affaire Kriovliess, une entreprise d’exploitation de bois. Navalny avait créé une société. Cela lui permettait du fait de son poste de conseiller du gouvernement de Kriov d’acheter le bois pas cher et de le revendre au prix du marché en empochant le bénéfice. Il avait été condamné pour cette escroquerie à cinq ans de prison, ayant selon le tribunal détourné ainsi 400 000 € de fonds publics.  Quand Le monde a traité de cette affaire et de ses suites, il n’en a parlé que comme d’un procès pour empêcher Navalny de se présenter aux élections[3]. Ce journal négligeait volontairement d’exposer les raisons matérielles de ce procès qui étaient en fait du trafic d’influence. À l’époque, en 2017, c’était Isabelle Mandraud qui s’était collée à cette basse besogne d’occultation de la réalité matérielle du procès. 

 

Navalny n’était pas seulement un carambouilleur, il était aussi raciste que les Ukrainiens du régiment Azov. C’est ce qu’a rappelé un journaliste de France Info, troublant le concert de louanges[4] ! L’organisation de défense des droits humains, Amnisty International avait décidé en 2021 de retirer au dissident russe Alexeï Navalny ce statut, invoquant ses déclarations nationalistes et racistes des années 2000[5]. Il en avait après les Tchétchènes, les musulmans contre qui il fallait user d’un désinfectant, et aussi les Juifs. Le monde, pourtant toujours prompt à dénoncer le racisme ici et là, préfère parler d’un homme intègre ! Mais de tout cela les journalistes n’en ont cure, tout occupé à ramper devant leurs maîtres. Ne sachant rien sur rien et encore moins sur le reste, les voilà qui ont décidé de peindre Navalny en martyre, nouvelle figure christique de la mondialisation heureuse à l’américaine. Les mêmes journalistes qui doutent que ce soient les Américains qui aient détruit les gazoducs Nord Stream, ou qui doutent encore du fait – malgré les témoignages de Merkel et d’Hollande – que les accords de Minsk avaient été signés pour gagner du temps et réarmer l’Ukraine avant de passer à l’attaque contre le Donbass, par contre ne doutent pas que Navalny a été assassiné par Poutine, même et surtout s‘ils n’ont rien pour étayer leurs accusations. On sait pourtant que Navalny était malade depuis de nombreuses années. Son avocat Kobzev parlait d’une maladie inconnue que les autorités pénitentiaires ne soignaient pas[6]. Autrement dit, il pourrait avoir été victime de négligences ou que sa mort ait été la conséquence d’une « maladie inconnue » pour parler comme son avocat. 

Cette mort est une aubaine pour les propagandistes de l’OTAN et de la guerre. Ils sont tous là : Raphaël Glucksman en tête bien sûr, la russophobie de se personnage se transmettant de père en fils comme une sorte de rente de situation. Et puis Macron, employé des pompes funèbres, toujours le premier à prononcer des oraisons, la quasi-totalité de la classe politique française. Bardella a lui aussi accusé Poutine de crime, prouvant ainsi qu’il n’est pas un opposant sérieux. Le pitre Zemmour, jadis grand admirateur de Poutine, y est allé aussi de sa larme de vieux crocodile : « Alexeï Navalny vient de mourir en prison pour avoir usé d'un droit fondamental : la liberté d'expression. Il n’est ni le premier, ni le dernier, à tomber sur le champ de bataille de la liberté politique. Ce combat ne finit jamais. Tous ceux qui l’ont mené la tête haute entrent dans l’Histoire » a-t-il dit sur son compte Twitter, montrant qu’il n’était au fond qu’un atlantiste comme les autres[7]. Mélenchon s’est joint lui aussi à cette conjuration des imbéciles, rejoignant Macron et Zemmour dans la surenchère : « La mort d'Alexeï Navalny en prison en Russie est un crime puisqu'il s'agit d'un prisonnier d'opinion politique. Les Insoumis hébergent des réfugiés politiques russes. Ils savent ce qu'est la répression dont sont capables les autorités russes »[8]. Prouvant ainsi qu’en France il n’y a plus aucune opposition politique, ni à Macron, ni à l’OTAN, ce qui accroit toujours un peu plus la distance entre les Français et leur « représentation ». Même Ruffin qui d’ordinaire est plus prudent s’y met dans cet exercice convenu : « Alexeï Navalny n’est pas simplement mort : il a été tué par la répression du régime de Vladimir Poutine. Pensées à ses proches. Pensées à tous les opposants, démocrates russes, éliminés avant lui, ceux qui ont aujourd’hui peur pour leur vie » a-t-il twitté. Seuls Phillipot et Asselineau n’ont pas marché dans la combine. 

 

On remarque que tout cela intervient au moment où la ville d’Avdivka vient de tomber. Or cette nouvelle défaite de l’OTAN en Ukraine est terrible, parce qu’elle ouvre la porte en grand à l’armée russe pour en finir avec l’armée ukrainienne et probablement à de nouvelles prises territoriales. Le monde minimise cette nouvelle défaite qui pourtant a fait des milliers de morts ukrainiens : « La victoire russe est toutefois plus symbolique que stratégique. À part le fait qu’elle est un point d’accès à la ville de Donetsk, Avdiïvka n’a, comme Bakhmout conquise en mai 2023, pas une importance cruciale au regard du vaste champ de bataille ukrainien » on se demande bien pourquoi depuis deux ans les Ukrainiens avaient renforcé les défenses de cette ville, et surtout pourquoi ils ont sacrifié autant de soldats dans cette bataille. Rémy Ourdan qui est à Kiev et non pas sur le terrain, répète ce que les services de propagande ukrainiens lui disent de rapporter, même si on ne comprend pas que la ville d’Avdiivka était un verrou, il est évident que cette défaite n’est pas symbolique puisqu’elle couronne la stratégie d’attrition menée par les Russes. Le monde préfère parler de Navalny, mais d’un Navalny qui n’existe pas vraiment, d’une construction mentale, une icône, presqu’une image sainte, les yeux grand-ouverts pour implorer le ciel[9]. C’est beaucoup moins gênant que de parler concrètement de la guerre et de ses conséquences, même si tout le monde admet en Occident aujourd’hui que la contre-offensive de printemps a lamentablement échoué, accroissant démesurément les pertes humaines et la destruction de l’Ukraine. Zelensky ne parle plus d’ailleurs d’aller reconquérir la Crimée et dit que la situation est extrêmement difficile sur le front. 

Image prise le 15 février dernier 

Les Britanniques toujours à la pointe de la russophobie mondiale depuis trois siècles, ont convoqué l’ambassade de Russie pour exiger une enquête « transparente » sur la mort de Navalny[10]. Cette comédie c’est un peu comme si Moscou convoquait l’ambassadeur du Royaume Uni pour lui demander des comptes sur le traitement odieux de Julian Assange ou pour sa participation aux sabotages de Nord Stream ou du pont de Kertch. Tout ça c’est de la communication, mais la communication à un but : justifier les grandes manœuvres de l'Europe pour tenter de mettre en place une industrie d’armement, et des traités d’assistance à l’Ukraine pour peut-être plus tard tenter de repartir à l’assaut de la Russie… à condition que d’ici là l’industrie européenne d’armement soit devenue compétitive ! On en est loin vu les plans d’austérité qui s’annoncent en Europe. Cependant comme on le voit la célébration du « martyre » de Navalny avec des photos bien choisies, le montrant comme un bon garçon plein d’espoir et de rêves, est maintenant un élément du plan occidental pour justifier sa politique agressive contre la Russie et faire croire que les traités signés par l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni, avec l’Ukraine qui sont une véritable déclaration de guerre à la Russie, sont nécessaires. La Russie considère maintenant la France comme un pays hostile. Remarquez que la presse française parle de « la prison de Poutine » ou de Navalny « tué par Poutine ». Cette personnalisation excessive vise surtout à faire croire que les Russes n’existent pas, qu’ils sont sous l’emprise d’une sorte de gourou fou, que Navalny auraient pu peut-être, les libérer de cette hypnose mortifère et donc que sans doute il faudra y aller nous-mêmes pour les libérer, comme autrefois on voulait libérer les Russes du bolchévisme, malgré eux. Jens Stoltenberg, petit-fils de nazi, lui aussi a dit qu’il allait demander des comptes à Poutine, saluant ce grand combattant pour la démocratie qu’était Navalny et ajoutant que l’OTAN était plus forte que jamais, grâce à lui, bien sûr[11]. Il prêchait une fois de plus pour sa paroisse, retardant encore un peu plus le moment où, atteint par la limite d’âge, il devra partir de la tête de cette organisation, job pour lequel il reçoit un salaire de 174 000 dollars par an, sans compter les avantages en nature. Il s’est étonné aussi que les Chinois n’aient pas plus réagi à l’annonce du décès de Navalny. 

Ioulia Navalnaïa le 16 février à la Conférence pour la Sécurité de Munich 

Curieusement le 16 février Ioulia Navalnaïa était à Munich invitée par la conférence sur la sécurité organisée par l’OTAN, actant le fait que Navalny était bien un agent de l’étranger ! Il suffit de se demander qui avait payé son voyage. Par ailleurs on sait que Ioulia, veuve officielle de Navalny, ne vivait plus avec lui depuis bien longtemps. Cette mise en scène qui semblait ignorer le décès de Navalny était assez indécente dans son principe. Certains journalistes parlaient d’une sorte de « Davos de la sécurité », sans même se rendre compte du caractère péjoratif de cette dénomination, puisque ce soi-disant forum est la démonstration que ceux qui décident de la suite des événements ne sont pas ceux qui sont élus[12]. L’idée globale était de démontrer qu’il fallait se surarmer pour arrêter Poutine en Ukraine, la preuve était la présence de Ioulia Navalnaïa ! Elle a dit : « …qu’ils sachent qu’il n’y aura pas d’impunité. Ils seront sanctionnés et punis. Il faudra qu’ils soient tenus responsables. Ce jour arrivera bientôt. Je m’adresse à la communauté internationale : faisons bloc pour lutter contre ce fléau, contre ce régime. Poutine devra être personnellement tenu responsable des atrocités commises dans notre pays ces dernières années »[13]. Ce qui était assez drôle c’est qu’elle parlait de la communauté internationale, comme si en dehors de l’Occident la mort de Navalny avait une quelconque importance. On se demande aussi qui punira Poutine : elle-même ? Joe Biden ? Zelensky ? Un tribunal ad-hoc après la guerre ? Le monde se réjouissait dans le même article que la mort de Navalny accélérerait la préparation à la guerre des Européens. Évidemment cet article de propagande pour la guerre contre la Russie était signé, entre autres, Sylvie Kauffmann, une habituée comme on sait d’une transformation de l’Union européenne en machine de guerre contre la Russie. Toujours la même stupidité qui rôde, si Poutine a fait tuer Navalny, c’est bien la preuve qu’il ne s’arrêtera qu’à Paris si on le laisse faire ! Énoncer cela comme une évidence c’est prendre les lecteurs du Monde pour des imbéciles. Car même si Poutine le voulait, il n’a pas les moyens, ni en hommes, ni en matériel d’aller occuper même un pays comme la Pologne. Travailler sur de telles hypothèses n’a pas de sens. 

Zelensky tentant de rappeler que s’il perd la guerre c’est la faute à l’avarice des Occidentaux et non à une stratégie militaire erronée 

Et puis à cette même conférence sur la sécurité de Munich, on a eu droit à l’inévitable Zelensky qui est venu réclamer encore de l’argent et des armes pour défendre « nos valeurs », suggérant que l’Ukraine faisait le travail pour le compte des Européens, il a ajouté lui-aussi que Poutine devrait lui rendre des comptes – à lui personnellement ! Il a dit ça sans rire, devant un parterre qui faisait semblant de le croire. Le cadavre de Navalny dans ce genre de rendez-vous hypocrite sert à effrayer les populations européennes pour qu’elles marchent au pas et qu’elles aillent dans le sens à la fois d’un désengagement des Etats-Unis et de la constitution d’un glacis pour se couper de la Russie, éventuellement qu’on admette comme une évidente nécessité une mobilisation générale. En même temps Joe Biden annonçait qu’il se battrait pour que le Congrès vote bien, mais cela sous-entendait qu’un lâchage des Etats-Unis était tout à fait à l’ordre du jour. Il semble que doucement mais sûrement on passe d’une guerre de l’OTAN dirigée par les Américains contre la Russie, que Trump ou Biden soient élus, à une guerre de l’OTAN menée directement par les seuls Européens qui n’en ont pas les moyens. Ce qui appauvrirait toujours un peu plus l’Europe. Navalny est alors le totem qu’on agite pour rallier les indécis. On reparlera de cette transformation de la position américaine, alors que des rumeurs de négociations sont en cours entre les Russes et les Américains[14]. Les Européens s’apprêtent tous à signer des traités bilatéraux de sécurité avec l’Ukraine, sur le modèle de ceux signés par la France l’Allemagne et le Royaume Uni. Ce que refusent de faire les Etats-Unis ! On verra bien le sens que cette nouvelle fantaisie peut avoir. 

 

Sur le site de l’Ambassade des Etats-Unis à Moscou, on pouvait voir, outre les habituelles pleurnicheries sur le décès de sa sainteté Navalny, qu’une page lui était dédiée depuis pas mal de temps, actant d’une certaine manière qu’il était bien un agent de Washington. Cependant la digue mise en place pour tenter d’évacuer toutes les critiques envers Saint-Navalny est en train de craquer. Le monde y va doucement, voilà donc une certaine ou incertaine Anna Colin Lebedev qui nous dit que les Ukrainiens ont eux aussi une dent contre Navalny ! L’article est intitulé explicitement Les Ukrainiens ont bien des choses à reprocher à Navalny[15]. Il a pris position contre la guerre pourtant cela ne suffit pas à blanchir Navalny.

Sur les réseaux sociaux circulent des images « malveillantes » de Ioulia Navatny avec ses différents amants ou en train de s’amuser


[1] L'affaire Navalny, le complotisme au service de la politique étrangère, Max Milo, 2021. 

[2] https://groupe-rocher.com/sites/default/files/2023-06/Oleg%20et%20Alexe%C3%AF%20Navalny%20-%20Yves%20Rocher%20Vostok%20-%2022%20mai%202023_0.pdf

[3] https://www.lemonde.fr/international/article/2017/02/08/condamne-a-de-la-prison-avec-sursis-alexei-navalny-maintient-sa-candidature-a-l-election-presidentielle-russe_5076601_3210.html

[4] https://www.francetvinfo.fr/monde/russie/alexei-navalny/mort-d-alexei-navalny-propos-racistes-nationalisme-et-positions-conservatrices-l-autre-visage-de-l-opposant-russe_6370291.html?fbclid=IwAR22dRiyXMSyqrQVsNtm60sTjLjoJSLLe3aj_evFtEgKWQ-mXJ0xLC7Qv00

[5] https://www.liberation.fr/international/europe/pour-amnesty-international-alexei-navalny-nest-plus-un-prisonnier-de-conscience-20210224_ZRU6734ZQRBEFMW7IZJLGQJ57Y/

[6] https://www.lapresse.ca/international/europe/2023-04-11/russie/alexei-navalny-malade-laisse-sans-soins-affirme-son-avocat.php

[7] https://twitter.com/ZemmourEric/status/1758509740617806061?ref_src=twsrc%5Egoogle%7Ctwcamp%5Eserp%7Ctwgr%5Etweet

[8] https://twitter.com/JLMelenchon/status/1758503048865816830?ref_src=twsrc%5Egoogle%7Ctwcamp%5Eserp%7Ctwgr%5Etweet

[9] https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/17/guerre-en-ukraine-les-forces-russes-s-emparent-de-la-ville-d-avdiivka_6217056_3210.html

[10] https://www.lefigaro.fr/flash-actu/mort-de-navalny-le-royaume-uni-convoque-les-diplomates-russes-20240217#:~:text=Le%20gouvernement%20britannique%20a%20convoqu%C3%A9,un%20au%20Kremlin%2C%20Alexe%C3%AF%20Navalny.

[11] https://www.nato.int/cps/fr/natohq/news_222901.htm

[12] https://www.ouest-france.fr/politique/defense/cest-quoi-la-conference-de-munich-ce-davos-de-la-securite-internationale-qui-souvre-vendredi-b0e10e64-cc1b-11ee-a3b1-a38454b34a5c

[13] https://www.lemonde.fr/international/article/2024/02/17/a-munich-la-dignite-de-ioulia-navalnaia-la-veuve-d-alexei-navalny-il-seront-punis_6217060_3210.html

[14] https://www.marianne.net/monde/sylvie-bermann-les-americains-reflechissent-a-des-negociations-de-paix-en-ukraine

[15] https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/19/anna-colin-lebedev-politiste-les-ukrainiens-ont-bien-des-choses-a-reprocher-a-navalny_6217339_3232.html

Henri Barbusse, Le feu, journal d’une escouade, Flammarion, 1916

  C’est non seulement l’ouvrage de Barbusse le plus célèbre, mais c’est aussi l’ouvrage le plus célèbre sur la guerre – ou le carnage – de...