En hommage à Coralie Delaume qui vient de nous quitter et qui combattit la construction européenne avec talent et beaucoup d’humour aussi
Dans la perspective des élections de 2022 auxquelles tous
les politiciens se préparent, la question de la souveraineté s’avère centrale.
L’idée de souveraineté monte en puissance un peu partout dans le monde, elle
explique le score extravagant de Trump aux dernières élections présidentielles,
même si celui-ci n’en a pas fait un véritable usage, à part des pitreries du
type on construit un mur. On avance aussi que le nouveau président des Etats-Unis,
Joe Biden, qui sera intronisé le 21 janvier prochain, devrait poursuivre dans
cette voie protectionniste. Le sondeur Stéphane Rozès vient de le rappeler une
nouvelle fois que c’est un sujet qui est décisif[1].
On explique d’ailleurs souvent la montée des populismes ici et là par l’abandon
de cette notion, comme s’il s’agissait d’une notion désuète. Curieusement cette idée de mondialisation
sans frontières est largement partagée par les politiciens de droite et de
gauche. Les premiers parce qu’ils considèrent que les lois du marché démontrent
que les frontières ne sont pas une forme naturelle, et les seconds très souvent
au nom d’un internationalisme fumeux qui laisse de côté le fait que
l’internationalisme ne peut pas exister sans les nations. On oublie trop souvent
que la nation est d’abord une idée de gauche, issue de la Révolution française[2],
puis cette idée devint vraiment très puissante pour unifier la Résistance à
travers le Conseil National de la Résistance qui a imposé certainement les avancées
sociales les plus puissantes de l’histoire de la France. Abandonnée
progressivement par la gauche au fur et à mesure que l’Union européenne se
consolidait, cette idée a été récupérée ensuite par le Front National – dont le
sigle était un détournement du nom d’un réseau de la Résistance parmi les plus
importants, tandis que les fondateurs du Front national étaient dans le fond
plus européistes que nationalistes puisqu’ils étaient pétainistes et
collaborationnistes – sans que la gauche n’y trouve rien à redire. C’est un peu
comme la laïcité, ce fut un cheval de bataille fondateur de la gauche, et puis
au fil du temps on l’a abandonné au Front national.
Apprendre à distinguer le vrai Front national du faux
Mais l’idée nationale qui semblait en sommeil est redevenue populaire. La cause doit en être cherchée dans le marasme évident de l’Union européenne qui non seulement apparaît comme une construction technocratique loin des gens, mais surtout comme le résultat de la mondialisation sans frontière avec son cortège de dégâts sur l’emploi et les inégalités sociales. Mais on ne peut pas être contre la mondialisation, pour le développement du local et en même temps ne pas se poser la question du cadre spatial dans lequel une société se développe. Depuis Marx, on sait que le capitalisme a pour horizon un monde sans frontière dans l’unification du marché. En vérité c’est un débat très compliqué car Adam Smith, dans La richesse des nations, concevait l’économie de marché seulement dans un cadre national qui en désignait les limites plus ou moins naturelles. Ce qui veut dire que les nations, et donc les frontières avaient forcément un rôle à jouer bien au-delà de la question de la production des marchandises puisqu’elles unifiaient une nation, une communauté. Mais par la suite la plupart des économistes, à partir de Ricardo et de ses lugubres théories sur le libre-échange, reviendront sur cette idée et réduirons la question spatiale à la question du marché mondial, ce qui de fait revenait à réduire la question politique à sa seule dimension économique. L’intégration de l’Union européenne dans un marché sans frontière est la preuve de l’inefficience du libre-échange : plus l’intégration économique se réalise, et plus la croissance est faible et le chômage élevé. Une des raisons est que dans un monde sans frontières, l’Etat s’efface et la redistribution des richesses ne se fait pas, c’ets pourquoi le libre-échange qui met en concurrence le travail et les travailleurs du monde entier aboutit à une hausse des inégalités de revenus. On sait cela depuis au moins le XIXème siècle. Ce n’est pas un hasard sur les Trente Glorieuses correspondent à une accélération de la croissance, un resserrement des inégalités et une baisse drastique du chômage. Ce n’est pas un hasard non plus si les directives du CNR – Conseil National de la Résistance – ont été appliquées dans un cadre national. Dans un cadre de concurrence internationale, donc d’une ouverture des frontières, on aurait évoqué cette fameuse compétitivité pour ralentir les réformes ou les vider de leur sens. La première attaque contre la Sécurité sociale est venue de Georges Pompidou en 1967. Alors premier ministre du général De Gaulle, il avançait qu’il fallait réformer la Sécurité sociale pour se mettre en conformité avec les autres nations européennes. Sous-entendant par là qu’il fallait s’aligner sur un standard moins coûteux. Il ajoutait que c’était là la voix du progrès. Et qu’on ne pouvait pas aller contre le progrès ! Cette attaque concertée avec le patronat, entraîna des manifestations de masse très nombreuses et furent sans doute une répétition pour le mouvement social de 1968.
Deux hommes politiques de gauche, pour une fois, François
Ruffin[3]
et Arnaud Montebourg[4]
ont soulevé officiellement cette question à travers l’existence nécessaire des
frontières justement. En vérité ils sont tous les deux sur ces positions depuis
pas mal de temps, Montebourg avec la défense de l’industrie française[5],
mais aussi Ruffin qui se faisait traiter de lepéniste parce qu’il voulait sortir
de l’euro et de l’Union européenne. Avoir des frontières, cela signifie que l’Etat
contrôle ce qui rentre et ce qui sort du territoire : les marchandises (c’est
le protectionnisme), les capitaux et les hommes. C’est une question de souveraineté.
On voit bien à quoi correspond cette souveraineté. Elle est une défense de l’économie
nationale, et elle est une défense de la civilisation et de la culture
nationale. La mondialisation et l’Europe se sont attaqué aux deux : elles
ont détruit l’économie française, et elles détruisent la culture nationale. Le déclin
de l’économie nationale peut se lire d’abord dans la désindustrialisation du pays.
Dans le tableau ci-dessous, nous voyons que si l’Allemagne n’a rien perdu de sa
capacité industrielle, la France est devenue un pays de services, pour le
meilleur il s’agit de services financiers, pour le pire, il s’agit du développement
de la domesticité dans le tourisme et l’hôtellerie par exemple. La désindustrialisation
de la France signifie au moins trois choses :
- d’abord une dépendance accrue aux marchés extérieurs,
notamment l’Allemagne et la Chine, en termes de produits manufacturés, donc une
perte de souveraineté. Les auteurs mercantilistes savaient parfaitement cela
qui avaient comme règle de ne vendre que le produit du travail à l’étranger, et
de n’acheter que les matières premières qu’on ne trouvait pas sur notre
territoire, même si les produits étrangers sont en apparence moins chers[6] :
- ensuite un effondrement de nos capacités dans le domaine
médical, effondrement qui s’est traduit par un taux de mortalité lié au
COVID-19 très élevé, et les palinodies des macroniens qui attendaient que la
Chine nous livre des masques pour changer de politique. La destruction de notre
appareil industriel qui est le résultat de notre adhésion à l’Union européenne
et à l’euro, a des répercussions sur la santé publique[7] ;
- enfin la création d’un chômage structurel dont on ne peut plus
sortir, car lorsqu’on détruit un emploi industriel, on détruit en fait cinq ou
six emplois liés à la filière considérée. C’est ce qu’on appelle le
multiplicateur d’emploi, il est faible dans les services et très élevé dans l’industrie.
Mais la question des frontières dépasse cet aspect
économique. Les mondialistes, qu’ils soient de gauche ou de droite, qu’ils s’appellent
Emmanuel Macron, ou Cédric Herrou, supposent que la fin des frontières ne
signifie pas la fin de la culture. C’est évidemment faux. Les propositions de
Macron d’enseigner l’arabe ont choqué, parce que le français est la langue qui
a unifié la nation – sans même parler du fait qu’apprendre l’arabe à des jeunes
élèves est une manière leur refuser le droit d’apprendre le français qu’ils ne
maitrisent pas. La question des frontières c’est aussi comme l’affirme Ruffin le
contrôle de l’immigration, les flux de personnes dit-il histoire de na pas
avoir d’ennui avec la police de la FI. On va prendre seulement deux faits. Le premier
concerne le multiculturalisme. Nous voyons que l’immigration de masse a
engendré une montée en puissance de la religion islamiste. Or celle-ci est
hégémonique, en ce sens qu’elle ne suppose pas une séparation effective entre
le politique et le religieux : « Bien sûr l'écrasante majorité des
musulmans ne sont pas terroristes ou n'ont de sympathie pour les terroristes.
Assimiler tous les musulmans à des terroristes est stupide et incorrect. Mais
reconnaître qu'il y a un lien entre islam et terrorisme est approprié et
nécessaire." "J'ai été musulmane, souvenez-vous, et c'est quand
j'étais le plus dévote que j'étais le plus remplie de haine », écrit Ayaan
Hirsi Ali qui sait de quoi elle parle puisqu’elle est originaire de Somalie. Ce qui
veut dire que nous n’avons pas défendu nos frontières au non du libéralisme économique
et sociétal justement. Et l’immigration de masse a créé de nombreux problèmes,
allant de la transformation de quartiers entiers en zone de non droit, jusqu’aux
attentats que la France, pays le plus généreux dans son accueil, a subis plus
que n’importe quel autre pays européen. Or le communautarisme ce ne sont pas
des communautés diverses qui vivent ensemble, mais des communautés qui se replient
sur elles-mêmes dans l’hostilité des autres communautés. On l’a vu récemment en
Seine Saint-Denis, les Chinois sont agressés systématiquement par des Musulmans
qui par ailleurs se plaignent du racisme des Français[8].
Les Chinois de la région parisienne ont alors manifesté pour que l’Etat prenne
enfin en charge leur problème de sécurité face au communautarisme islamiste. Nous
n’avons pas vu la Mélenchon et autre Obono manifester à ce moment-là contre la sinophobie.
Il est vrai que les asiatiques qui manifestaient ne se camouflaient pas avec
un voile et surtout, ils agitaient des drapeaux français au lieu de les brûler.
Manifestation de la communauté chinoise le 4 septembre 2016
Chaque communauté enfermée dans ses préjugés manifeste à sa manière. Si les
asiatiques ont été bien seuls à manifester contre l’insécurité – entendez contre
les agressions des musulmans – il s’est trouvé de nombreux « intellectuels »
ou politiciens pour soutenir la séparation des musulmans au nom de la lutte
contre le racisme. Ça va du soutien qu’on accorde à des semi-idiots poètes d’occasion
qui slament en crachant contre le France, aux prières de rue qui sont qu’on le
veuille ou non une occupation du territoire en vue de sa transformation, une
enclave en quelque sorte au cœur de la République. Il y a en vérité des
frontières invisibles misent en place par telle ou telle communauté qui refuse
de s’adapter et qui prétend imposer ses normes. Tout le monde connaît des
quartiers de Paris où les Juifs sont interdits de paraître, d’autres quartiers
où les femmes ne peuvent pas se promener comme elles l’entendent sans risquer
de se faire agresser, des bars où elles ne peuvent pénétrer. Ces frontières
informelles sont connues, mais comme elles ne sont pas officielles et ne
ressortent que de la tradition, elles permettent aux associations musulmanes de
porter plainte pour diffamation[9].
On note que devant l’évidence de ces faits trop nombreux pour ne pas faire
sens, Macron est passé du « vivre ensemble » à la lutte contre le
séparatisme. Mais il s’agit toujours de frontières !
Entendons-nous bien, pointer du doigt les conséquences négatives de l’immigration
de masse, ce n’est pas vouloir boucler les frontières à double tour, c’est
refuser que la nation se transforme en quelque chose qui ne ressemble plus à
rien dans la perte de ses racines dans le déploiement d’un déséquilibre
ingérable pour l’Etat. De même développer une politique économique ce n’est pas
refuser de commercer avec le reste du monde, c’est simplement commercer en
conservant son autonomie, soit ne pas générer un déficit commercial important
qui correspondrait à un transfert de richesses vers l’étranger, et donc à un
transfert d’emplois. Il faut savoir que notre déficit commercial avec l’Allemagne
s’aggrave tous les ans, et il s’est accéléré depuis l’arrivée de Macron à l’Elysée.
Ce déficit commercial avec l’Allemagne signifie trois choses :
– d’abord que nous dépendons de l’Allemagne de plus en plus pour les biens d’usage, d’équipements, mais plus encore de l’agriculture car les Allemands sont en avance sur nous si on peut dire dans le domaine de l’agriculture industrielle, porcs, bovins, laits et fromages, parce qu’ils ont créé des fermes industrielles de dimension démente avec les problèmes environnementaux et sanitaires qui vont avec[10] ;
Ferme industrielle en Allemagne
– ensuite que nous transférons notre savoir-faire et notre technologie vers
l’Allemagne, puisque nous les détruisons pour leur faire plaisir. Ce transfert
pose de gros problèmes à terme, notamment si nous sortons de l’Union européenne
et de l’euro, il faudra refaire tout le chemin en sens inverse, acquérir à prix
d’or la technologie que nous ne possédons plus. Cela pose également le problème
de la formation de la main d’œuvre. La désindustrialisation s’est accompagné
d’un effondrement de l’enseignement professionnel et supérieur, nous n’avons
plus d’ouvriers qualifiés, ni d’ingénieurs ;
– enfin, ce transfert continu de richesse équivaut à un transfert d’emplois
industriels de notre pays vers l’Allemagne. Un calcul grossier nous montre que
c’est entre 20 000 et 30 000 emplois qui tous les ans partent vers l’Allemagne,
c’est bien mieux que le STO de sinistre mémoire et nos hommes politiques de droite
ou de gauche ont collaboré à ce pillage.
Notez que ce pillage de la France par l’Allemagne n’a été possible que grâce
à la complicité des « élites » françaises. Ce sont en effet les
élites autoproclamées qui sont toujours à l’avant-garde de la collaboration. Je
note deux inflexions importantes qui ont « tué » l’industrie française,
d’abord en 1983 la volte-face de Mitterrand sur la question européenne, et par
suite celle du Parti socialiste. Il faut rappeler que jusqu’à une date assez récente
le Parti socialiste, comme l’ensemble de la gauche d’ailleurs considérait que l’intégration
européenne était d’abord une politique de droite – Giscard si on veut – au service
des multinationales. En 2005 une large majorité des électeurs socialistes a
voté contre le TCE. Puis la social-démocratie s’est vendue progressivement à l’idéologie
du libre-échange. Pascal Lamy, membre éminent du PS, fut par la suite Commissaire
européen au commerce, puis directeur de l’OMC. Ce rocardien manœuvrier était
donc aux premières loges pour démanteler toutes les règles qui auraient pu
protéger l’intégrité de la France, sa spécificité et son économie. Il faut dire
qu’il avait été diplômé des trois pires boutiques qui en France diffusent la logorrhée
néolibérale, Sciences Po, HEC et l’ENA.
Le second outil du saccage de la France fut la mise en place de l’euro, car en effet sans l’abandon du franc, le pillage eut été plus difficile parce que la France aurait pu comme elle le faisait dans le temps dévaluer sa monnaie pour conserver ses parts de marché à l’international et surtout limiter le déficit commercial. Autrement dit la monnaie nationale protège la nation. Si je regarde le graphique ci-dessous, je me rends compte que jusqu’à l’introduction de l’euro, l’excédent commercial français était supérieur à celui de l’Allemagne. Et puis la rigidité des taux de change empêchant la France d’ajuster la valeur de sa monnaie a produit cette évolution catastrophique. Mais il y a autre chose, c’est que l’entrée de la France dans l’euro a été un jeu de dupes. C’est le médiocre Dominique Strauss-Kahn, alors ministre de l’économie, qui négocia le tarif d’entrée. Il avait le choix, soit une entrée sur une parité de 6,557 francs pour un euro, soit 10 francs pour un euro, soit comme certains le suggéraient 15 francs pour un euro. Plus le franc était surévalué vis-à-vis de l’euro, et plus la concurrence avec l’Allemagne allait être difficile. Les négociateurs allemands qui n’en sont pas encore revenus, ont obtenu ce qu’ils voulaient sans avoir à se battre, comme en quarante quand l’armée français a été coulée par ses propres généraux. En adoptant le taux de 6,557 francs pour un euro, c’est comme si on avait dévalué le mark et réévaluer le franc.
Evolution du solde commercial de la France et de l’Allemagne
Les raisons de cette escroquerie manifeste sont doubles :
– d’abord le fait qu’on s’est basé sur la balance des paiements pour
décider de ce taux, à un moment où l’Allemagne était en mauvais état. Nous aurions
pu obtenir bien d’avantage de l’Allemagne à ce moment-là, en effet ce pays
était encore plombé dans sa dynamique par le financement de la réunification et
avait besoin de notre soutien. Peut-être que nous n’aurions pas obtenu 15
francs = 1 €, mais il semble que la parité 10 francs pour 1 euro était tout à
fait à notre portée et cela nous aurait causé bien moins d’ennuis ;
– ensuite le fait que Dominique Strauss-Kahn pensait – bien que « pensait »
soit pour lui un trop grand mot – qu’en acceptant la parité 6,557 francs = 1 €,
cela obligerait les capitalistes français à réorienter leurs investissements vers
les secteurs à haute valeur ajoutée, entraînant la France sur la voie de la
modernisation accélérée. Mais ça ne s’est pas passé comme ça, les capitaux
français ont préféré se réfugier dans le développement d’un capitalisme
financier sans morale et au contraire cette fantaisie strauss-kahnienne a
accéléré la désindustrialisation de la France. Et cela s’est traduit par un
chômage structurel dont nous ne sommes jamais sortis.
Ce rappel est nécessaire car s’il est bien connu des économistes comme
Jacques Sapir[11] et quelques autres, on ne
rattache pas toujours la défense des frontières à la question de la monnaie. Or
les Allemands ont tiré les leçons de leurs deux dernières défaites militaires, ils
ont compris qu’il était plus simple et moins coûteux de piller l’Europe et donc
la France avec une monnaie qui enchaîne ses partenaires qu’avec des tanks. Les frontières
représentent la souveraineté, elles se défendent aussi bien par l’armée que par
les règles qu’une nation impose au reste du monde. Il faut des règles pour le
contrôle des marchandises, des capitaux et des hommes. Seules ces règles sont susceptibles
de construire une communauté de destin. La monnaie est une de ces règles, comme
l’est la laïcité comme le sont les frontières politiques de la nation.
C’est sans surprise donc qu’une étude allemande dont est issue le tableau
ci-dessus montre le résultat de la disparition des frontières monétaires entre
les pays européens[12].
Cette étude émane d’un think tank pro-européen et donc n’affiche pas de
malveillance vis-à-vis de l’Union européenne et de la monnaie unique. Chaque français
a donc perdu 56 000 € entre 1999 et 2017, du fait de l’introduction de la
monnaie unique, tandis que chaque allemand avait gagné sur la même période un
peu plus de 23 000 €. Le bilan est encore plus désastreux en Italie où la
perte par italien serait sur l’ensemble de la période d’étude serait de 73 000
€. On remarque que ce dernier pays qui a détruit systématiquement son système
de soins pour rentrer dans les normes budgétaires imposées par Bruxelles a été
celui qui a le plus souffert de la crise sanitaire. C’est aussi dans ce pays
que la volonté de sortir de l’Union européenne parait la plus forte.
Globalement dans ce jeu à somme nulle, ce que l’Allemagne et les Pays Bas ont
gagné, c’est ce que la France et l’Italie ont perdu. Sur le plan commercial,
les excédents de l’Allemagne sont le déficit commercial des autres pays
européens, à commencer par la France.
Ce long détour nous permet de revenir à Montebourg, celui-ci teste
manifestement une possible candidature à l’Elysée, pour cela il se démarque de
François Hollande dont il a été le ministre éphémère de l’économie avant d’être
remplacé par Macron. Il nous dit que son point de vue est en dehors du clivage
gauche-droite qui est en effet de plus en flou, de moins en moins lisible. Il raconte
à qui veut l’entendre que, devant Obama, Hollande s’était ridiculisé en se
déclarant impuissant face aux oukases de Merkel[13].
Il a avancé semble-t-il sur cette question des frontières, mais il ne nous dit
pas ce qu’il fera de l’euro, ni même s’il œuvrera pour sortir de l’Union
européenne. Il ne peut pas nous refaire le coup du plan A, plan B à la Mélenchon,
ambigüité qui du reste a été sanctionnée en 2017 par les électeurs, ambiguïté qui
plombe aujourd’hui l’idée selon laquelle Mélenchon qui passe beaucoup plus de
temps à combattre l’islamophobie qu’à développer un programme sérieux. Mélenchon
qui pleurniche pour décider les communistes à le soutenir – mais pourquoi le
feraient-ils – pourrait-il figurer au second tour de l’élection présidentielle ?
Personne à gauche ne le croit, ses palinodies, ses retournements de veste l’ont
discrédité pour toujours. Pour avancer Montebourg doit préciser sa démarche sur
les points suivants :
– que faire avec l’Union européenne ? A l’heure actuelle circule une
pétition pour réclamer un référendum sur cette question, mais d’autres pétitions
reste en retrait, réclamant seulement un meilleur contrôle des frontières
européennes. Or comme nous l’avons vu, à l’intérieur des frontières
européennes, nous resterons désarmés car l’Union européenne n’est pas une
nation et ne le sera jamais, ce qui l’encline à être dirigée par une
bureaucratie corrompue ;
– que faire avec l’euro ? Nous avons vu que la monnaie nationale est
une autre manière de défendre nos frontières économiques ;
– à l’heure actuelle on doit être clair sur la question environnementale et
remettre en question le dogme de la croissance économique comme solution.
Terminons par ce point important, Montebourg est un critique de longue date
de la Vème République et donc d’une plus large implication du peuple
dans les affaires qui le concerne. Cette idée relativement simple d’un peuple
souverain, fait apparaître plus que jamais la centralité de l’idée de nation.
[1] https://lvsl.fr/stephane-rozes-la-presidentielle-doit-remettre-letat-au-service-de-la-nation-et-de-sa-souverainete/?fbclid=IwAR2otdDpDW9uPKeJN0mRmIAAgPRVMZMEwQkPSKkNmyVsSQpERNWP_MmTbnY
[2] Patrick Cabanel, « La
gauche et l'idée nationale », Jean-Jacques Becker éd., Histoire
des gauches en France. Volume 1. La Découverte, 2005
[3] https://www.lepoint.fr/politique/francois-ruffin-est-favorable-au-retablissement-des-frontieres-02-12-2020-2403734_20.php
[4] https://www.lefigaro.fr/politique/arnaud-montebourg-souhaite-le-retour-de-frontieres-nationales-20201122
[5] Antoine
Montebourg, L’engagement, Grasset, 2020. https://ingirumimusnocte2.blogspot.com/2020/11/arnaud-montebourg-lengagement-grasset.html
[6] Antoyne
de Montchrestien, Traicté d’oeconomie politic, 1615.
[7] https://ingirumimusnocte2.blogspot.com/2020/08/des-soins-sans-industrie-jean-pierre.html
[8] https://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/aubervilliers-93300/aubervilliers-condamnes-pour-11-agressions-contre-des-chinois-09-08-2016-6027649.php
[9] https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/bar-interdit-aux-femmes-a-sevran-david-pujadas-et-delphine-ernotte-seront-juges-pour-diffamation-1592588019
[10] https://www.novethic.fr/actualite/environnement/agriculture/isr-rse/allemagne-indigestion-generale-due-aux-elevages-de-porcs-142735.html
[11] Jacques
Sapir, L’euro contre la France, l’euro contre l’Europe, Cerf, 2016.
[12] Dr. Matthias Kullas & Alessandro
Gasparotti, 20 Jahre Euro: Verlierer und Gewinner Eine empirische
Untersuchung, CEP, Februar 2019.
[13] https://actu.orange.fr/politique/meme-obama-nous-faisait-la-lecon-quand-arnaud-montebourg-raconte-sa-honte-de-francois-hollande-magic-CNT000001vx6oC.html
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