jeudi 20 octobre 2022

Echec des mouvements sociaux du mois d’octobre

  

Marche contre la vie chère, 16 octobre 2022 

Que le gouvernement mente sur les chiffres de participation aux manifestations des 16 et 18 octobre, et avec l’aide du cabinet Occurrence, une soi-disant boutique indépendante, c’est vrai, mais ça ne change rien à l’affaire. Ces deux manifestations sont un échec[1]. Un échec en ce sens que malgré la colère palpable de millions de Français, la mobilisation a été quantitativement très décevante. Les raisons de protester contre le gouvernement sont pourtant très nombreuses, ça va de la hausse des prix des biens de première nécessité, à l’inaction sur la dégradation de l’environnement, en passant par la destruction accélérée des services publics qui ne fonctionnent plus quel que soit le domaine considéré. Par ailleurs le gouvernement se trouvait au même moment empêtré dans des défaites cuisantes à l’Assemblée nationale, démontrant qu’il n’avait même plus de majorité dans cette représentation bien peu démocratique. La grèves des raffineurs lancée chez Total et suivi aussi chez Exxon, paraissait également un mouvement puissant. Tout semblait réuni pour construire des actions dans la rue qui auraient dû mobiliser largement. Il n’en a rien été. Les raisons de cet échec sont très nombreuses. D’abord tactiquement le fait que Mélenchon tente de lancer des manifestations en précédant celle des syndicats a été combattu par la CGT et Philippe Martinez. Celui-ci qui, ne l’oublions pas, a fait élire Laurent Berger – le leader du syndicat patronal – à la tête de la Confédération européenne des syndicats, a suivi la grève des raffineurs de très loin. Il en a rajouté dans la stupidité satisfaite en expliquant qu’il était à Naplouse en train d’éviter les balles de l’armée israélienne mélangeant sa propagande pour la Palestine avec son mandat syndical[2]. N’épiloguons pas sur les mensonges de ce louche individu qui a appelé, rappelons-le, à voter deux fois pour Macron au second tour, en 2017 comme en 2022. En vérité lors de son voyage dans les Territoires palestiniens, il n’a échappé à rien du tout, mais l’important est qu’il était parti à Naplouse juste au moment où un puissant mouvement de grève se développait dans les raffineries. Aussi bouffon qu’un BHL ou qu’un Zelensky de sous-préfecture, il avouait ainsi indirectement qu’il n’avait rien fait pour le développement de la grève, qu’au mieux il suivait le mouvement déclenché par la base, qu’au pire il sabotait les initiatives de ses troupes. Syndicaliste des plus mous, il est probable qu’il sera débarqué au prochain congrès de la CGT où de puissantes fédérations, dont celle des Bouches du Rhône, veulent le virer. Il ne nous manquera pas, comme il ne manquera pas au mouvement social. 

Manifestation à Paris le 18 octobre 2022 

Malgré l’ébullition sociale, le bureaucrate syndical a passé plus de temps à dénigrer les initiatives de Mélenchon qu’à développer les nécessités d’une mobilisation pour le 18 octobre. Ces dissensions entre bureaucrates de partis et bureaucrates de syndicats ont pesé très lourd sur le terrain et expliquent au moins une partie du manque d’enthousiasme pour cette action déclenchée par le haut, histoire de calmer la base. C’est l’assurance de Macron. La grève ne s’est pas étendue, ce qui au fond arrange bien Martinez qui pourra toujours dire qu’il a tout fait pour que ce jour soit un succès mémorable. Mais l’essentiel n’est pas là. Il est dans le fait que le type d’action déclenché par les partis de gauche et les syndicats n’est plus de saison. Les raisons sont multiples. Il y a d’abord le fait que manifester une seule journée n'occasionne aucune gêne pour le gouvernement. Celui-ci attend que ça passe. Il envoie un peu sa milice pour matraquer de ci, de là, et puis chacun retourne à ses occupations. Les deux tiers des Français trouve la politique de Macron nulle et mortifère, que ce soit en matière de retraites – la réforme à venir – ou pour la lutte contre l’inflation qui ronge les salaires. Mais ils ont compris aussi que ce type de promenade dans Paris était dérisoire et peu offensive. Le gouvernement aurait tort de croire que la faiblesse des mobilisations des 16 et 18 octobre le tire d’affaire. On pourrait même dire que c’est l’inverse dans la mesure où les partis de gauche et les syndicats ne semblent pas en mesure de canaliser la colère populaire. Macron qui voudrait bien être le François Guizot de son siècle devrait faire l’effort de se souvenir de la manière piteuse qui mit fin à sa carrière politique. La milice de Macron s’est entraînée à matraquer les manifestants, s’attaquant au cortège de la CGT, mais elle a été surprise de la réaction des manifestants qui se sont défendus et qui ont pris en chasse le commissaire Paul-Antoine Tomi, dit le tabasseur ou Tomi-le-corse, qui a une sinistre réputation dans les manifestations, mais qui est aussi celui qui a géré comme on le sait le désastre de la finale de la Ligue des Champions au Stade de France[3], un incapable, doublé d’un malveillant. Il ne dut son salut qu’à sa vitesse de course à pied. Ces violences, sans être très importantes, ont cependant dépassé en intérêt les exactions des black-blocs, et on a vu la milice contrainte d’abandonner le terrain. 

La milice en action 

Parmi les raisons qui font que ce type de manifestation ne fait plus recette, il y a la manière de faire. Que voit-on ? En tête de cortège nous avons des personnalités connues, Mélenchon, Ernaux, wokiste patentée et nouveau Prix Nobel de littérature, Faure, Autain, Martinez, et j’en passe, ils étaient tous là. Leur comportement est celui-du berger qui guide le troupeau. Cette façon de faire est en réalité plutôt méprisante, supposant qu’il y ait une hiérarchie entre les manifestants qui ne savent pas trop ce qu’ils veulent et leurs guides. Sans parler du fait que l’exemple des Gilets jaunes a montré que les seules choses qui gênent le gouvernement ce ne sont pas les manifestations périodiques, mais bien le blocage de l’économie sur la durée, que ce soit la grève ou le blocage des ronds-points. La marche sur l’Elysée avait en son temps donner une trouille verte à Macron. Mais il y a aussi le fait que ces têtes de gondole qui aiment se mettre en avant sont très détestées – parfois pour de mauvaises raisons d’ailleurs – et donc c’est bien maladroit et clivant de jouer ce jeu du spectacle, on se croirait à Guignol. Dimanche 16 octobre, les « vedettes » de la gauche en perdition ont défilé à la tribune, confisquant une fois de plus la parole populaire, réclamant l’attention d’un public qu’elles leur croient acquis. Ces méthodes-là sont totalement dépassées, et je ne sais pas d’ailleurs si elles ont été un jour adéquates à stimuler la soif d’émancipation du peuple, cultiver le côté moutonnier de la foule est totalement archaïques, les vedettes parlent et la masse applaudit d’une manière mécanique, sauf si c’est Sandrine Rousseau qui tient le crachoir. Entendre Mélenchon parler d’un nouveau Front Populaire du haut de son estrade, dominant ce qu’il croit être le peuple, est bien plus que mensonger, c’est surréaliste par les temps qui courent. Soyons clairs, alors que Macron est incapable de gouverner autrement qu’à l’aide du 49-3, il n’y a plus d’opposition structurée, le RN a fait savoir qu’il ne voterait pas la motion de censure déposée par la NUPES, et la NUPES a dit la même chose, elle ne votera pas une motion déposée par le RN à l’Assemblée nationale Macron est tranquille. L’heure des discours est dépassée. 

 

« Ma profession de foi est aussi rassurante pour les patriotes que terrible pour les scélérats. Je crois à l’infaillibilité du peuple » Anacharsis Cloots



[1] https://www.marianne.net/politique/melenchon/pourquoi-la-marche-contre-la-vie-chere-est-un-echec-pour-melenchon

[2] https://atlantico.fr/article/decryptage/philippe-martinez-a-echappe-aux-balles-israeliennes-cgt-tsahal-naplouse-palestine-syndicat-penurie-de-carburant-hausse-des-salaires-negociations-salaries-totalenergies-exxonmobil-israel-france-benoit-rayski

[3] https://www.mediapart.fr/journal/france/170622/revelations-sur-la-clique-qui-conduit-la-prefecture-de-police-sa-perdition

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