Malgré la propagande des partis, de l’Etat et des journaux pour aller voter, le deuxième tour des élections cantonales et régionales a confirmé le premier tour[1]. Le point principal est que 2 Français sur 3 ont refusé de se prêter à la comédie d’une fausse démocratie, malgré les admonestations de tout bord. Tous les journaux, les politiciens de métier, de droite et de gauche, Facebook, se sont mis à faire la propagande pour aller voter, rien n’y a fait. Massivement les Français ont refusé de choisir entre des crapules et des imbéciles. Pire encore, les bureaux de vote ont eu du mal à trouver des assesseurs. Le moins qu’on puisse dire est que les Français se sentent de moins en moins électeurs, ce qui veut dire qu’ils ne croient plus que les élections soient un processus démocratique. Cette abstention élevée contraste avec l’approbation par exemple d’une démocratie plus directe ou participative. Je rappelle que le RIC était approuvé par près de 80% de la population. Les abstentionnistes refusent donc de choisir, renvoyant dos à dos le RN, la droite et la gauche. Ce refus a de multiples raisons. La première est que le programme présenté par les uns et les autres ne les intéresse pas, éloigné qu’il est des préoccupations des gens ordinaires, il sonne creux. La seconde, mais c’est un peu la même, c’est que gauche, droite ou RN, c’est la même caste de « professionnels de la profession » qui se trouve aux manettes et qu’elle est inapte à faire face aux problèmes de l’heure. Elle n’est pas compétente. Il est typique d’ailleurs que ce soient les classes les plus défavorisées qui soient aussi les plus détachées du rituel du vote. Ce sont pourtant elles qui auraient le plus besoin d’une autre politique, d’une autre représentation pour défendre leurs intérêts. Dans e temps c’était la gauche qui représentait ces intérêts, plus ou moins bien, mais enfin elle les représentait. Ce n’est manifestement plus le cas aujourd’hui. Soyons plusq précis, en Ile-de-France Le monde nous dit que Valérie Pécresse est réélue haut la main. Voici les résultats.
Si j’additionne les abstentionnistes, les bulletins nuls et
blancs, j’arrive à 69,37%, soit plus de deux électeurs sur trois qui ont refusé
de choisir entre les listes en présence. Dans ce contexte la liste de Pécresse
ne rallie même pas la moitié des suffrages exprimés, mais rafle près de 60% des
sièges. Si je rapporte le pourcentage des votes exprimés au 30,63% des
personnes qui ont voté, c’est à peine 14% des électeurs qui ont approuvé le
programme de cette liste baroque soutenue par Manuel Valls et Jean-Paul Huchon,
deux anciens caciques du PS, et potentiellement compatibles avec Macron. Autant
dire qu’elle ne représente rien et que si elle a l’idée de se présenter aux
élections présidentielles, elle se prendra un méchant râteau, son lifting ne suffira
pas à masquer l’inconséquence politicienne de cette malheureuse. On fera un
constat un peu similaire dans la Région PACA. 37,8% des électeurs se sont
dérangés pour départager les deux listes qui restaient course. Celle de Thierry
Mariani l’austère représentant du RN et celle de Renaud Muselier qui jadis
combattait les dockers sur le port de Marseille quand il était l’âme damnée de
la canaille Jean-Claude Gaudin. Le second arrive à réunir 57% des électeurs qui
se sont déplacés, soit 21,54% ! 21,4% c’est tout ce que pèse aujourd’hui l’ubuesque
coalition de toute la classe politique, Muselier, une fois que la gauche se fut
sabordée comme jadis la flotte dans la rade de Toulon, réunissait sur son nom les
macroniens de LREM, la droite affairiste et cosmopolite des LR, les faux
écologistes de EELV, la FI, le PCF, le PS et j’en passe. Le seul programme de
cette engeance est de tromper les électeurs en leur faisant croire que l’élection
de Mariani serait anti-démocratique et anti-républicaine. Je ne suis évidemment
pas ami avec le RN, mais pour moi il y a deux erreurs d’analyse qui se cumulent :
- d’abord c’est de considérer que le RN ne serait pas
républicain et serait une sorte de loup habillé en grand-mère qui tenterait d’arriver
au pouvoir démocratiquement pour ensuite supprimer icelle. Mais si c’est le cas
pourquoi ne pas demander son interdiction pure et simple ? Quand on mesure
comment Macron a exercé son pouvoir, matraquant tout le monde et le reste, les
soignants, la CGT, les Gilets jaunes, le plus fasciste des deux n’est pas
forcément celui qu’on pense ;
- mais sans doute le principal n’est pas dans cet
aveuglement volontaire, en soutenant la droite affairiste, cosmopolite et européiste,
la gauche décervelée et en voie de disparition masque le fait que les programmes
de LREM et du RN sur le plan économique et social sont exactement les mêmes, et
cela est encore plus vrai depuis que ce malheureux parti a fait son coming
out européiste.
Ce qui veut dire que clairement les débris de la gauche s’apprêtent non seulement à adouber le programme de la droite dure néolibérale et donc à voter Macron au second tour des élections présidentielles, mais aussi renonce à réfléchir à un programme d’alternance. Ces magouilles d’arrière-boutique vont certainement dégouter encore un peu plus les Français. Cette Sainte-Alliance qui mime un antifascisme de comédie, démontre que cette classe politicienne sans honneur est totalement unie dans l’adversité. Dès qu’un taux d’abstention est au-dessus des 50%, les résultats n’ont plus de signification, et il est illusoire de présenter la réélection des caciques de la droite ordinaire, Wauquiez, Bertrand, Pécresse ou Muselier, comme un résultat extraordinaire et enthousiasmant.
Bien d’autres enseignements peuvent être tirés de cette
grève des électeurs. D’abord c’est le rejet des institutions. Des partis comme
la FI qui font semblant de vouloir fonder une nouvelle république, avaient l’occasion
de dénoncer cette mascarade. Mais Mélenchon et ses séides ont au contraire
approuvé l’idée stupide de Front républicain. Les journaux titraient lundi
matin sur le double échec de Macron et de Le Pen. Le plus grave est sans doute
pour Macron. Cette défaite historique aux régionales et aux cantonales, succède
aux autres défaites aux municipales et aux européennes, elle montre que le
parti présidentiel n’existe pas, c’est une assemblée de zombies placée derrière
un président fantomatique, sans insertion dans la société française. Mais cela
prouve au moins deux choses :
- que la politique pourrie de Macron n’est pas approuvée et
que le soi-disant regain de popularité qu’on a pu lire dans les sondages est au
mieux un feu de paille lié au déconfinement ;
- que si par malheur Macron était réélu dans le contexte d’un
nouveau Front républicain adoubé par la gauche dégénérée, il n’aurait sans
doute pas de majorité pour gouverner.
L’autre enseignement est que le RN en tentant, suite à l’éviction de Florian Philippot et à son remplacement par Jordan Bardella, de devenir un parti de droite ordinaire, euiropéiste, s’est coupé du public qu’il avait su rallier à lui en 2017. Détesté par la bienpensance mondialiste, le RN est maintenant rejeté par les classes populaires qui ne se reconnaissent pas dans son cheminement tortueux. Le sentiment anti-européen est beaucoup plus fort que ce qu’on croit dans le pays. J’avais déjà écrit que la question européenne était une question centrale reprenant l’idée qu’au moins 40% de l’électorat français est pour retrouver une souveraineté complète, monétaire, stratégique et militaire[2]. Mélenchon et Marine Le Pen qui un temps avaient séduit les frexiters, payent aujourd’hui le prix de leur oubli et se retrouvent à la rue.
Ces deux réalités ne doivent pas masquer l’effondrement de la gauche et particulièrement de la FI qui disparaîtra sans doute en 2022. Cette gauche qui n’est plus qu’une officine de propagande pour la droite, est coupée des réalités. La campagne pour les élections présidentielles lui sera fatale. En ce moment la gauche joue les idiots utiles de la droite. Par exemple elle soutenait Muselier (LR) au nom du barrage contre l’extrême-droite, tandis que dans les Pays de la Loire, Christelle Morançais faisait campagne sur la nécessité selon elle d’empêcher l’extrême-gauche – représentée par l’ineffable Matthieu Orphelin passé de EELV à LREM de Macron pour redevenir le leader de la gauche dans cette région – d’accéder au pouvoir. Il est vrai que par les temps qui courent la gauche en adoptant les lunettes de la culture WOKE est devenue un repoussoir, sans parler de ses compromissions avec la religion mahométane. Mais en s’alliant ici et là à la pire droite qu’on ait connu depuis Pétain, elle ajoute à la défaite, le déshonneur.
Ce qui nous amène à discuter des portes de sortie. Notre époque met à jour l’escroquerie intellectuelle des uns et des autres, le RN n’est pas un parti fait pour défendre les travailleurs, il joue uniquement de son slogan contre l’immigration. La droite européiste et affairiste de Macron et autres Muselier, Bertrand et Pécresse, n’a pas la capacité de faire autre chose que de gérer des places bien rémunérées, mais par défaut. La gauche est perdue entre ses délires antifascistes et WOKE. La solution peut venir de deux côtés : d’une part de l’émergence d’un mouvement sociale autonome comme on l’a entrevu avec les soignants et les Gilets jaunes. Je dis autonome parce que de fait la bureaucratie syndicale à part collaborer est incapable de faire avancer quoi que ce soit. C’est évident pour la CFDT qui est devenu le premier syndicat jaune, la courroie de transmission du MEDEF, mais ça l’est aussi pour la CGT qui s’est décrédibilisée, d’abord en 2017 en appelant à voter Macron, ensuite en s’efforçant de contenir le mouvement des Gilets jaunes au lieu de le soutenir. Je parle ici de la bureaucratie syndicale et non des syndicalistes eux-mêmes. Martinez a été plus que lamentable lorsqu’il est venu pleurnicher sur BFMTV pour montrer son incompréhension quand macron lui a envoyé ses miliciens pour fracasser le cortège du 1er mai 2019. Je sais bien que le secrétaire de la CGT est sur la sellette et contesté, et il est probable qu’il finisse par se faire virer pour son incompétence. Mais cela ne suffira pas, il faut une lame de fond pour emporter ce ramassis d’incompétents qui ont détruit toute possibilité d’alternance de peut de se retrouver « diaboliser ». Notre époque est paradoxale en ce sens que si elle semble consolider les pouvoirs de la bourgeoisie cupide, sans cœur et sans cervelle, elle met en même temps à nu la vérité de ce pouvoir bâti sur du sable. Mais il va falloir travailler encore, sortir d’une paresseuse gestion des vieux poncifs qu’on recycle sans précaution, pour aller vers une prise de conscience plus acérée et plus combattive. Les faux écolos de EELV sont démasqués, ce sont eux qui ont été à la manœuvre pour faire en sorte que la gauche se désiste pour Muselier en PACA.
L’abstention est maintenant le premier parti de France. Il touche d’abord les jeunes et les électeurs de MLP et de Mélenchon, c’est-à-dire les figures qui étaient sensées incarner le changement. Puis les classes les plus faibles économiquement et les femmes ! Ce n’est pas en injectant un peu de proportionnelle ou un peu de référendum local qu’on atténuera les choses. La grève massive des électeurs risque au contraire de les encourager dans cette voie. Macron parait-il considère qu’il lui faut continuer dans le sens des « réformes », c’est-à-dire dans le sens de la destruction des droits des travailleurs, de la baisse des salaires et des allocations-chômage. Il parie sur la médiocrité de ses soi-disant opposants d’opérette. Ce sera un pari difficile à tenir, car outre qu’il risque s’il est réélu de ne pas avoir de majorité, et donc de passer sous les fourches caudines des LR, il risque de déclencher un mouvement social puissant qui l’empêcherait d’arriver jusqu’à 2022. Il est suffisamment stupide pour cela. Si les partis et les syndicats n’ont plus de légitimité, c’est forcément la rue qui parlera. Par exemple en ce moment on discute beaucoup de la hausse scandaleuse du prix des carburants. Alors que le prix du baril est clairement inférieur à ce qu’il était au moment du démarrage du mouvement des Gilets jaunes, le prix ce l’essence à la pompe est aujourd’hui plus élevé qu’à cette époque. Le diesel est particulièrement touché. Si cette hausse est soi-disant décidée au nom de l’écologie, ce seront les pauvres qui seront le plus touchés, ce sont eux qui en effet roulent plus souvent avec ce carburant, à la fois parce qu’auparavant le prix du diesel était inférieur à celui du super, et parce que les moteurs diesel sont moins onéreux à l’entretien que les moteurs ordinaires. C’est juste un exemple parmi d’autres, mais comme les travailleurs prennent souvent leur automobile pour bosser dans des zones d’emplois excentrées, ils y sont plus sensibles. Si le COVID a été une chance pour Macron parce que la crise a masqué son incompétence dans les autres domaines que celui de la santé, cela ne pourra pas durer toujours, la France ressemble à une cocotte-minute et les politiciens cette classe d’incompétents sont maintenant en première ligne.
L'abstention est due, en partie, à la dépolitisation massive des citoyens occidentaux, plus consuméristes que citoyens. La colère des gilets jaunes n'a eu aucune traduction politique, car c'était un mouvement désorganisé aux revendications multiformes et souvent contradictoires, style "payer moins d'impôts" mais avoir plus de service public !!
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