lundi 26 septembre 2022

La troisième guerre mondiale est déjà commencée

  

L’OTAN dans son élargissement continue à l’Est 

Pour rappeler les buts de guerre de ce qui se déroule en Ukraine, il faut identifier clairement les belligérants. Les plus attentifs l’ont compris, la guerre qui se déroule en Ukraine n’est pas une guerre d’un pays contre un envahisseur. Ce narratif larmoyant a fait long feu. C’est une guerre des Etats-Unis, de son bras armé l’OTAN et de ses féaux, les pays européens contre la Russie et ses populations. Les Russes sont à peu près seuls à se battre contre une coalition internationale représentée par l’OTAN. Au fil des années, l’OTAN a vu la montée en puissance dans ses financements des pays autres que les Etats-Unis qui les pressaient de le faire. Autrement dit, les Etats-Unis ont réussi à faire payer par les Européens une grande partie de leur politique agressive contre la Russie, on va voir pourquoi un peu plus loin[1]. Du coup le slogan L’Europe c’est la paix devient totalement incongru et mensonger. Sans nous demander notre avis les bellicistes Ursula von der Leyen et Josep Borell nous ont entraîné dans une guerre dont l’issue sera forcément ruineuse, aussi bien sur le plan économique que politique. Récemment la porte-parole de l’OTAN, von der Leyen qui n’a été élue par personne, a rejeté les appels à un cesser le feu en Ukraine, persistant dans l’idée que l’OTAN n’a pas fini son travail[2]. L’Europe c’est la paix, manifestement c’est un slogan qui ne passe pas dans la tête de la présidente en carton de la Commission européenne. Curieusement personne ne relève ces propos guerriers. Rien que cela serait une bonne raison de réclamer la sortie de l’Union européenne pour ne pas être entraîné sur la pente fatale. Mais si cette canaille rejette les demandes de cessez-le-feu, c’est bien qu’elle se comporte en chef de guerre, partie prenante ce celle-ci en Ukraine, cela lève la fiction que l’Union européenne ne participe pas au conflit.

L’élargissement de l’OTAN est prévu à l’article 10 du Traité de l’Atlantique Nord. L’article 10 stipule que peut accéder au Traité tout « État européen susceptible de favoriser le développement des principes du présent Traité et de contribuer à la sécurité de la région de l’Atlantique Nord ». On suppose donc dans cette écriture et à voir comment l’OTAN s’est étendue géographiquement que la région de l’Atlantique nord va jusqu’à l’Oural et même un petit peu au-delà. Comme nous le voyons l’OTAN ne respecte pas même ses propres traités, la Turquie qui n’a aucun rapport géographique avec l’Atlantique Nord, en est un des membres les plus importants, pour le conserver comme membre à part, les Américains et les Européens tolèrent que cette nation agressive, emmenée par un panislamisme conquérant menace ouvertement la Grèce et bombarde les Arméniens du Haut Karabakh avec l’Azerbaïdjan[3]. Paris vaut bien une messe, et les stratèges américains se disent que si la peau des Ukrainiens ne vaut pas cher, celle des Arméniens et des Kurdes, ne vaut pas grand-chose non plus. Le silence assourdissant des grands médias sur les massacres des Kurdes et des Arméniens permet de conserver l’idée que Poutine est un dictateur assoiffé de sang ukrainien, et que les alliés des Etats-Unis sont de très bonnes personnes. L’important est que la Turquie et l’Azerbaïdjan entretiennent un foyer de tension qui occupera les Russes, qui sont les seuls à soutenir les Arméniens en maintenant une force d’interposition entre les Azéris et les Arméniens, et les Kurdes du nord de la Syrie loin de l’Ukraine. Même Le monde s’est aperçu qu’il s’agissait là d’une manœuvre de diversion qui ne pouvait avoir été possible qu’en accord avec Washington, tandis que l’hypocrite Anthony Bliken encourageait l’Arménie et l’Azerbaïdjan à trouver une paix durable, sans condamner les prétentions des dictateurs Erdogan et Aliyev qui sont aussi les partenaires privilégiés de l’Union européenne conduite par Ursula von der Leyen[4] qui est une proche collaboratrice de l’impérialisme américain et qui a renforcé, depuis son avènement à la tête de la Commission, la soumission de l’Union européenne dans tous les domaines, du militaire au traitement des données individuelles, à l’impérialisme américain[5]. Le renouveau de ce conflit ne doit pas être analysé en dehors de ce qui se passe en Ukraine, il en est le complément. L’unification du monde sous la conduite des Etats-Unis, impérialisme en fort déclin, peut très bien s’accommoder de la disparition de l’Arménie et du développement du panislamisme turc qui intégrerait ainsi l’Azerbaïdjan. Par ailleurs les Russes pensent que la Géorgie qui rêve d’intégrer l’OTAN va prochainement ouvrir un nouveau front la frontière sud, ce qui renforcerait le caractère mondial du conflit[6]. 

La disparition programmée de l’Arménie 

Toute décision d'inviter un pays à adhérer à l'Alliance est prise par le Conseil de l'Atlantique Nord, principal organe de décision politique de l'OTAN, sur consensus de tous les Alliés. C’est donc bien l’OTAN qui a poussé les très inconséquentes ministresses de la Finlande et de la Suède à sortir de leur neutralité apparente pour rejoindre l’OTAN. En dehors des 30 pays de l’OTAN qui ont déclaré la guerre à la Russie, il faut ajouter l’Azerbaïdjan, le Japon, l’Australie, la Corée du Sud. Si ces nations n’ont pas officiellement déclaré la guerre à la Russie, elles sont, de fait, cobelligérantes, fournissant des armes de morts aux soldats qui se battent sous pavillon ukrainien, des renseignements et une aide financière. La France fournit des canons Caesar à longue portée, forme des soldats ukrainiens et envoie des experts militaires sur le terrain. Les Britanniques, les plus acharnés des pays va-t’en guerre font de même et menacent la Russie d’un bombardement nucléaire[7]. Au premier regard il apparaît que la guerre entre la Russie et les Etats-Unis avec ses féaux, est une guerre contre la mondialisation et l’uniformisation du monde de la marchandise. Mais en vérité si cela est vrai, il faut comprendre les buts de guerre des Etats-Unis, une fois qu’on est sorti de la fiction d’un combat moral pour la démocratie. 

Les canons Caesar français sont entrés en action en Ukraine 

Les buts de guerre sont multiples. Le premier et le plus évident est de rétablir le leadership des Etats-Unis sur le reste du monde. En effet, la montée en puissance des pays émergents, ceux qui sont impliqué dans le BRICS, marque le déclin inéluctable des Etats-Unis à tous les niveaux, notamment sur le plan économique et monétaire. Selon le FMI la part du dollar dans les échanges internationaux est passée de 71% au début de la décennie à un peu moins de 60% aujourd’hui. La guerre en Ukraine a eu un effet inattendu sur les monnaies, d’une part le dollar s’est clairement raffermi face à l’euro, mais malgré cela il n’est pas arrivé à imposer les paiements en dollars face à la Russie. La Chine, l’Arabie Saoudite, pays important en termes de réserve de pétrole, l’Inde, le Brésil, l’Indonésie ont refusé, et accepté les paiements en roubles. Cette défaite diplomatique importante est décisive car elle montre que si l’Atlantique-Nord était bien le centre du développement économique il y a encore quelques décennies, et donc que les échanges pouvaient s’organiser à partir du dollar, ce n’est plus le cas aujourd’hui. Depuis les années quatre-vingt, c’est la zone d’Asie du Sud Est qui est le pôle de la croissance mondiale. On pourrait dire d’ailleurs que le renouveau d’une activité guerrière de la part des Etats-Unis, c’est la conséquence logique de ce basculement. Cet effritement du dollar et de l’euro maintenant contre les autres monnaies du monde, démontre que l’Union européenne a eu tort de suivre Washington dans sa croisade contre la Russie. Nous développerons un peu plus loin les conséquences de cela. Si l’effondrement de l’euro face au dollar a été une des premières conséquences de la guerre en Ukraine, la montée du rouble face au dollar en a été une autre, particulièrement inattendue, face aux sanctions décidées et appliquées par l’Occident. 

Part du dollar dans les échanges internationaux, source FMI 

Si en vérité le dollar est voué à une chute continue dans les années qui viennent, non pas du point de vue de sa valeur, mais pour son importance dans les tarifications des échanges de biens et de services, c’est justement la conséquence d’un déplacement de la dynamique économique mondiale vers l’Asie. Autrement dit les Etats-Unis peuvent bien faire les gros yeux aux pays qui ne soutiennent pas le dollar, ils ne sont plus dans le coup sur le plan économique. C’est une des conséquences de la mondialisation. Les Etats-Unis ont cru longtemps qu’ils profiteraient de la mondialisation sans en payer les conséquences. Pensant que la maitrise de la variable monétaire suffirait pour assurer leur hégémonie, ils ont désindustrialisé leur économie. Celle-ci se trouve maintenant dans une situation de forte dépendance d’avec le reste du monde, et elle est en outre profondément endettée. Plus l’hégémonie du dollar sera contestée, et plus l’endettement extérieur pèsera sur ce malheureux pays qui sera obligé tôt ou tard de mettre en place une politique austéritaire dure, avec les conséquences sociales et politiques qu’on peut imaginer dans un pays qui est aujourd’hui au bord de la guerre civile.

 

Part du commerce international, Review of the role of trade in the work of the fund, FMI, February 2015 

La seule possibilité qui reste aux Américains pour rétablir leur hégémonie, c’est leur puissance militaire qui reste sans égale à l’échelle planétaire. Ils vont donc allumer des feux un peu partout dans le monde pour menacer aussi bien la Chine que la Russie, mais aussi pour entretenir sournoisement la terreur chez les nations récalcitrantes. Cela, ils savent le faire, ils en ont une très longue habitude, même s’ils confondent le plus souvent leurs intérêts à court terme avec des buts à long terme. La plupart des conflits engagés par les Etats-Unis depuis 1945 se sont soldés par des reculs spectaculaires de leur influence dans le monde. Plus près de nous, la Guerre du Vietnam, la Guerre en Irak ou encore la Guerre d’Afghanistan  ont été des désastres ruineux qui n’ont pas freiné pour autant le déclin de l’Empire. Le monde, dans son édition datée du 22 septembre 2022, rapportait que Macron devant l’ONU dénonçait l’impérialisme russe, cela lui permettait de masquer qu’il travaille aujourd’hui pour l’impérialisme américain qui se manifeste aujourd’hui de partout aux quatre coins de la planète. Il est étrange que la gauche européenne en plein décomposition, qu’elle se dise radicale ou social-démocrate, ne nous parle plus jamais de l’impérialisme américain, ni même de la nuisance de l’OTAN, elle qui dans ses belles années faisait son beurre de la lutte contre l’impérialisme américain. Mais manifestement si la gauche concevait de défendre les nations dites faibles, le Vietnam, Cuba, le Chili, aujourd’hui elle est peu enthousiaste pour dénoncer l’impérialisme américain face aux populations du Donbass qui depuis huit ans subissent des bombardements criminels qui visent à terroriser les populations civiles qui sont massivement pour un rattachement à la Fédération de Russie. Préoccuppée principalement par la défense des minorités musulmanes en France ou des minorités sexuelles, elle n’a plus rien à dire sur le reste, ni sur le social, ni en matière géopolitique, et on suppose que si elle revenait par miracle au pouvoir, elle resterait dans cette position naïvement attentiste. Et donc elle se révèle incapable d’analyser les buts de guerre américains en Ukraine, se contentant de condamner l’« agresseur Poutine », alors que dans le temps elle s’excitait facilement pour réclamer la sortie de l’OTAN. Autrement dit il n'y a plus de discours de gauche capable de contrer le narratif guerrier de l’impérialisme américain qui s’appuie sur une maitrise de la communication inédite dans l’histoire. Il n’y a plus de place dans le paysage médiatique pour un discorus alternatif sur la guerre, ce qui est suffisant pour masquer les buts louches des  Américains dans cette guerre ruineuse. La censure qui sévit en Occident est suffisante, qu’elle porte sur les réseaux sociaux ou sur les médias qui défendraient le point de vue russe.

 

Parmi les buts de guerre, nous avons vu que l’affaiblissement durable de l’Union européenne a été atteint. Le second but, et peut-être le principal, est d’affaiblir la Russie qui a bien relevé la tête depuis son effondrement de 1991. La Russie est en effet une puissance militaire importante, et en l’affaiblissant, on affaiblie une possible alliance entre la Chine et la Russie. Si la Russie est muselée, alors il sera plus facile de faire plier la Chine pour rétablir un ordre mondial favorable à la restauration de l’hégémonie américaine. Comme le montre le graphique ci-dessus, nous voyons que le budget militaire russe est relativement faible, il est à peine supérieur à celui du Royaume-Uni. Et bien sûr si on le compare à celui de l’ensemble des pays de l’OTAN, il est relativement ridicule, ne représentant qu’environ 5% de celui des pays de l’OTAN. Le budget de la Chine c’est une autre dimension. Mais il y a un autre but à la guerre pour les Américains. Ceux-ci savent comme tout un chacun que les ressources naturelles – terres fertiles, gaz, pétroles, voires terres rares – sont en quantité très limitée. En 2021, le gouvernement ukrainien totalement corrompu a mis en vigueur une loi lui permettant de brader son propre pays aux intérêts américains. D’après le média Australian national review, des firmes américaines ont profité de cette législation pour investir massivement dans le pays. 40% des terres cultivables en Ukraine est désormais contrôlé par des capitaux américains, trois multinationales à capitaux américains ont ramassé la mise, il s’agit de Cargill, Monsanto et Dupont. On peut parler d’un mouvement véritable de colonisation par l’argent – ce que l’inconséquent Macron est incapable de relever. Cette loi a été dictée directement à Zelensky par les experts américains qui pullulent dans le gouvernement ukrainien, sous le couvert d’une recommandation du FMI[8]. Sa seule existence suffit pour prouver que ce petit pays n’est plus qu’une pointe avancée de l’Empire. Notez que ces entreprises américaines lorsqu’elles seront intégrées plus ou moins officiellement à l’Union européenne – par la voie d’un traité spécial – pourront toucher des subventions payées par les impôts des Européens ! Et donc nos impôts financeront clairement le colonialisme américain en Europe ! Le simple fait déjà que la Commission européenne ait enlevé les barrières douanières avec l’Ukraine, est en train de tuer la filière avicole en France[9]. Et bien sûr les entreprises qui exportent depuis l’Ukraine du poulet pourri, élevé dans la tradition américaine de l’industrie agricole extensive, vers la France n’est pas le fait de petits paysans pauvres ukrainiens, mais de firmes oligarchiques qui profitent depuis déjà 2019 au moins des faibles droits de douanes européens[10]. Ce sont également ces entreprises géantes américaines qui profitent de la libération des cargos de céréales qui n’alimentent pas le tiers-monde comme le voyou Zelensky le prétend, mais plutôt les marchés des pays développés, via la Turquie qui au passage prend une marge comme sur le gaz et le pétrole. 

Elevage industriel de poulet en Ukraine 

Mais au-delà des terres agricoles, les Américains visent à mettre la main sur les riches mines du Donbass, ce Donbass qui s’est rebeller en 2014 au point de se proclamer séparé et donner une raclée à l’armée de Kiev. Le minerai de fer, le charbon, le manganèse, des métaux rares et du lithium, ressources essentielles sont principalement situées dans le Donbass[11]. En 2014 la canaille journalistique avançait que la guerre était menée dans le Donbass par la Russie parce que Poutine voulait s’approprier ses ressources minières[12]. Mais il semble aujourd’hui que l’appropriation de ces ressources soit un des buts de la colonisation américaine en Ukraine avec l’aide supplétive des pays européens. Le troisième segment des buts de guerre des Etats-Unis sont peut-être les plus importants. Il s’agit de mettre sur les immenses ressources gazières et pétrolières de la Russie. Certains stratèges américains ont avancé qu’en envisageant une pénurie des ressources énergétiques, il n’était pas question que les Russes seuls restent assis sur cette manne. Ils sous-entendaient par là que seuls les Américains pourraient mettre la main sur cette réserve, et la distribuer comme ils l’entendaient à leurs affidés. Ce n’est toutefois pas simple. Par exemple, s’il est exclu que les Américains puissent un jour occuper la Russie, on peut imaginer qu’une défaite de l’armée russe en Ukraine emmènerait le départ de Poutine et un changement de régime à Moscou et que ce régime nouveau qu’on corromprait à la manière de ce qui se fait aujourd’hui en Ukraine. On s’appuierait sur un rapport du FMI avançant que pour améliorer l’efficacité de l’économie russe, il faut permettre des investissements étrangers massifs dans l’extraction du gaz et du pétrole. Remarquez que mettre la main sur les ressources pétrolières des autres pays a été toujours une constante de la politique étrangère étatsunienne. Par exemple ce fut une des raisons qui poussa Truman à retarder le moment de reconnaitre l’existence d’Israël pour ne pas se fâcher avec les monarchies pétrolières arabes. « Si vous contrôlez le pétrole, vous contrôlez le pays, mais si vous contrôlez les semences, vous contrôlez l'alimentation. Et celui qui contrôle l'alimentation tient la population en son pouvoir », affirmait Henry Kissinger[13]. Mais pour contrôler ces deux paramètres, l’argent ne suffit plus, il faut y ajouter la puissance militaire. Il y a chez les Américains une obsession du pétrole[14] qui n’a son équivalent que chez Adolf Hitler, ce qui avait conduit celui-ci à lancer l’opération suicidaire Barbarossa qui fut finalement le tombeau de l’armée allemande. Il y a cependant loin de la coupe aux lèvres, car remplacer en bloc le régime poutinien ne pourra se faire que dans le chaos. C’est sans doute pour cette raison que dès le début les stratèges américains ont envisagé une guerre qui durerait plusieurs années. Ce qui par parenthèse laisse forcément le champ libre aux Chinois face à Taïwan. Les Américains ne pourront pas mener deux guerre importantes et coûteuses en même temps. 

 

Extraction du gaz russe 

Cette troisième guerre mondiale qui implique maintenant une quarantaine de pays, ne veut pas dire son nom pour laisser croire que l’OTAN n’a qu’un rôle mineur, se contentant d’une posture défensive pour soutenir un petit pays agressé. L’enjeu est le suivant : soit l’avènement d’un monde multipolaire avec la défaite de l’OTAN, soit le rétablissement d’une mondialisation sous contrôle des Etats-Unis, avec une vassalisation accélérée de l’Europe. Dans le premier cas on soutien la sécession du Donbass, et dans le second on donne encore des armes à Zelensky et on envoie des troupes en renfort, cette fois d’une manière franche et ouverte, ce qui selon mois ne saurait tarder. La réunion de Samarcande de l’Organisation de Coopération de Shangaï (OCS) qui s’est tenue les 15 et 16 septembre 2022  a démontré que la Russie n’était pas isolée, contrairement à ce qu’a voulu voir la propagande otanienne qui a tenté de faire croire que la Chine et l’Inde allaient lâcher la Russie dans son combat contre la mondialisation. C’est un ensemble qui pour l’instant pèse un peu plus de 40 % de la population mondiale et à laquelle plusieurs pays, et non des moindres – le Mexique l’Argentine, l’Iran, l’Algérie, la Turquie à laquelle la Russie va livrer du gaz qu’elle pourra revendra avec une marge aux Européens fanatisés par les sanctions, l’Égypte, et l’Arabie Saoudite, et la Corée du Sud – ont manifesté le désir d’adhérer. Si cela devait être suivi d’effet, l’ensemble pèserait plus de 50% de la population, contribuant à renforcer l’isolement de l’Occident sous la férule des Etats-Unis. Ces pays sont très complémentaires et peuvent se passer complètement de l’Occident, non seulement ils sont capables de produire même des biens de haute technologie, mais en outre leurs principaux marchés ne sont plus l’Occident, mais l’Asie du Sud-Est. Parmi les pays qui ne soutiennent pas la guerre de l’OTAN en Ukraine, il y a Israël qui se méfie comme de la peste de Zelensky. Celui dans une interview récente disait le regretter, ne comprenant pas vraiment qu’Israël ne suive pas ses ordres[15]. Peu de journalistes ont relevé ce fait important. Mais ce petit pays veut se tenir au minimum à l’écart de cette Troisième Guerre mondiale. Il faut dire qu’au-delà de Zelensky Israël se méfie de l’Ukraine, le premier pays à avoir mis en place un génocide juif au début du XXème siècle, un pays qui se donne comme héros des personnages louches comme le nazi Stepan Bandera ou Simon Petlioura, le premier président de la république ukrainienne.  

A l’ONU Macron s’exprime devant une assemblée vide 

Le clownesque Macron dans son allocution à la tribune de l’ONU face à une salle vide – ce qui en dis long sur le déclin de la France dans le monde – a fustigé ces non-alignés qui osent avoir une position différente de celle réclamée par l’Oncle Sam et imposée à l’ensemble des pays européens[16]. Il en a profité pour dénoncer l’impérialisme russe, oubliant au passage celui de l’OTAN et des Etats-Unis. Cette admonestation qui s’adressait à une assemblée étrangement vide ressemblait un peu à l’ultimatum que naguère il adressait aux Libanais en les sommant de se soumettre à des réformes néolibérales pourtant complètement inadaptées. Ce n’est évidemment pas de cette façon que l’Occident ralliera à lui de nouveaux soutiens dans son combat contre la Russie. On était très loin du discours de la France qui avait fait sensation quand son premier ministre avait dénoncé une guerre ruineuse en Irak, guerre dans laquelle notre pays ne voulait pas se laisser entraîner[17]. C’était en 2003 et la France avait encore quelque scrupule à s’aligner parfaitement sur son suzerain d’outre-Atlantique. Un clown chasse l’autre, le sinistre Zelensky qui poursuit sa fuite en avant a demandé que l’ONU exclut la Russie de son droit de veto et « exige contre elle un juste châtiment »[18], autrement dit que l’ONU se transforme en assemblée qui décide de la guerre ou de la paix. Ce genre de rodomontade n’a aucune base juridique, mais elle est en décalage complet avec les missions de l’ONU qui sont plutôt de rechercher la paix et des solutions diplomatiques, inaudible dans l’enceinte de l’ONU, elle n’a un intérêt que dans le processus de communication qui cherche à faire croire que l’OTAN sait où elle va. Pendant ce temps le louche Erdogan continue un travail plus sérieux, jouant les go between, il prétend proposer des solutions diplomatiques, c’est-à-dire une vraie négociation entre Poutine et Zelensky. Là encore, même si c’est du bon sens, il s’agit probablement d’un effet de communication et de rien d’autre. Les Américains ont en tête de faire durer le conflit au minimum jusqu’aux élections de mid term qui seront difficiles pour le parti démocrate au pouvoir, même si un changement de majorité ne change rien pour la guerre en Ukraine, cela peut entraîner un réexamen partiel des livraisons d’armes, les Etats-Unis ayant déjà puisé énormément dans leurs stocks réservés à leur armée. Avec l’hiver va aussi une récession économique féroce, conséquence du resserrement des taux[19]. Une économie en guerre avec une récession et du chômage, cela fera beaucoup pour la stabilité des Etats-Unis. Les Américains ont-ils autant chevillée au corps leur russophobie qu’on le dit ? Nous le vérifierons bientôt. Une chose est de se sacrifier pour défendre sa patrie, une autre est de le faire pour un pays aussi lointain que corrompu qui a déjà englouti des milliards de dollars d’aide financière et militaire. De la même manière, si les choses devaient s’aggraver et que les Russes coupent le gaz à l’Allemagne pour protester contre les nouvelles sanctions de l’Europe, l’économie allemande s’effondrerait complétement. C’est sans doute pour cette raison que la Hongrie de Victor Orban a demandé que les sanctions européennes contre la Russie cessent d’ici à la fin de l’année[20]. 

 

La réunion de l’OSC à Samarcande a été un succès diplomatique important 

Par ailleurs, il est assez étonnant qu’en Occident personne ne se mobilise, ne serait-ce qu’un peu, pour réclamer que cesse la guerre, il semble que nous ayons tous intégré notre impuissance à faire reculer la guerre, aujourd’hui, même les trotskistes ne manifestent plus pour la paix. La gauche généralement pacifiste dans le temps a complètement disparu du paysage, trop occupée qu’elle avec les débats sur le féminisme ou sur le barbecue et la virilité. Dans le bon vieux temps, les marins français intervenaient pour que cessasse les attaques militaires de la France contre la Russie en pleine guerre civile, plus tard les dockers intervinrent pour freiner l’alimentation de la guerre en Indochine et même en Algérie. C’est sans doute là un des signes les plus visibles de l’effondrement tragique de l’Occident, cet absence de conscience minimale des partis et des syndicats dits de gauche qui n’arrivent plus à faire passer un seul message de bon sens alors que la guerre mondiale se développe sous nos yeux. Les bonnes consciences croient savoir que les Russes se mobilisent ou quittent le pays en masse pour échapper à la conscription. Tout cela est faux, un simple raisonnement le montre. D’abord ceux qui quittent la Russie ne sont pas majoritairement des Russes, parce que pour quitter le pays par avion il faut avoir non seulement l’argent pour payer les billets, mais aussi les visas. Avant la mobilisation partielle décrétée, il fallait 45 jours en Russie pour obtenir un visa. Ensuite dans toutes les guerres les personnes potentiellement mobilisables tentent d’échapper à cette servitude, et les mères ne veulent pas que leurs enfants aillent sur le front. C’est également ce qui s’est passé en Ukraine ou des mobilisables ont fui en masse l’appel sous les drapeaux dès l’annonce de l’entrée en guerre de la Russie en Ukraine au mois de février dernier. On est là encore dans le déni et la mise en scène, mais c’est lié à la propagande de guerre en Occident et destiné aux Occidentaux, cela ne reflète en rien la réalité de l’opinion russe qui reste très largement derrière son gouvernement, et même si l’idée d’être mobilisé n'est pas plaisante pour les Russes qui sont convoqués, le recrutement se passe tout à fait normalement. La mobilisation partielle qui concerne d’abord des réservistes va sur le terrain  changer les rapports de force. Ces 300 000 nouveaux soldats permettront de libérer les soldats qui se battent sur le front en les déchargeant des tâches de la logistique et de gestion de l’information, notamment l’observation des mouvements de troupe otaniens. Devant le recrutement accéléré en Russie, Josep Borrell, le pousse à la guerre de l’Union européenne a encore promis de nouvelles sanctions. Persister dans l’erreur est manifestement une constante de l’Union européenne. 

Le 21 septembre la mobilisation partielle est entrée en vigueur sans de vrais problèmes 

Au lendemain de la décision de la Douma de recourir à une mobilisation partielle et d’organiser des référendums dans le Dombass, à Kherson et Zaporojie, la presse française, de droite comme de gauche reprenait le discours de l’OTAN. Que ce soit L’Humanité journal soi-disant communiste qui jadis était en lutte contre l’OTAN, et même originellement pacifiste, Le monde, journal officiel de l’OTAN ou Les Echos le journal du patronat ou le journal des curés La croix, ils reprenaient en boucle les termes de « folle escalade », de « fuite en avant ». Ils n’ont pourtant jamais parlé d’escalade et de fuite en avant quand les USA ont inondé l’Ukraine d’armes de destruction massive, et peu considèrent que si la Russie tente d’accroître ses moyens en Ukraine, c’est bien parce qu’il fallait répondre à l’escalade militaire atlantiste ou abandonner la partie. Tous passent sous silence le fait que l’organisation de référendums est la base même de l’article premier de la Charte des Nations Unies, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, c’est même la forme la plus démocratique qui puisse exister. Zelensky et ses commanditaires ont avancé qu’ils ne reconnaitraient pas les résultats des référendums. Or il est très probable que ceux-ci consacreront une victoire écrasante pour un rattachement à la Russie, dans des proportions comprises entre 80 et 90%. Prouvant ainsi que si on avait commencé par faire des référendums dans le Donbass, il est probable qu’il n’y aurait pas eu de guerre et que la rectification des frontières se serait réalisée d’une manière pacifique, comme cela s’est fait quand la Tchécoslovaquie s’est divisée en deux républiques indépendantes en 1992. On rappelle que juste avant les accords de Minsk, des référendums avaient eu lieu dans les régions séparatistes pour réclamer leur adhésion à la Fédération de Russie. Mais les médias dominants, y compris ceux qui se prétendent de gauche, ne parlent pas de cela car ce serait reconnaitre que la guerre menée par la Russie est légitime et que l’adhésion du Donbass, de Kherson, de Zaporojie est profondément souhaitée par leurs populations. Ce qui prouve que le système médiatique dans son entier, tout subventionné qu’il soit par l’Etat, s’est rangé du côté de la guerre contre la Russie. Qu’ils se disent de gauche ou de droite ou même de l’extrême centre, tous ces médias sont ouvertement pour la défaitre de la Russie et pour la victoire des Etats-Unis en Ukraine, sans même imaginer ce que voudrait dire une défaite de la Russie. Face à ce rouleau compresseur de la propagande, s’il est de plus en plus difficile de faire entendre une voix dissidente, c’est aussi de plus en plus nécessaire. 


[1] https://www.radiofrance.fr/franceinter/non-les-etats-unis-ne-financent-pas-l-otan-a-90-mais-ils-en-sont-bien-le-plus-gros-contributeur-3754571

[2] https://www.lesoir.be/467134/article/2022-09-22/guerre-en-ukraine-ursula-von-der-leyen-soppose-aux-appels-un-cessez-le-feu

[3] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/09/19/face-a-l-azerbaidjan-l-armenie-annonce-plus-de-200-morts-parmi-ses-soldats-apres-la-reprise-des-affrontements_6142294_3210.html

[4] https://france.representation.ec.europa.eu/informations/lue-et-lazerbaidjan-renforcent-leurs-relations-bilaterales-y-compris-leur-cooperation-dans-le-2022-07-18_fr

[5] https://lecourrierdesstrateges.fr/2022/06/17/ursula-von-der-leyen-la-dirigeante-europeenne-controlee-par-les-americains/

[6] https://travel.rambler.ru/abroad/49388853-rossiyane-opisali-situatsiyu-na-granitse-s-gruziey/?utm_source=RCM-122C&from=RCM-122C&utm_campaign=rcm0433d969#rcmrclid=17eb4e4d380a0895

[7] https://www.wsws.org/fr/articles/2022/08/27/pers-a27.html

[8] https://lecourrierdesstrateges.fr/2022/08/16/des-entreprises-americaines-se-sont-largement-appropriees-les-terres-agricoles-ukrainiennes/

[9] https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/agroalimentaire-biens-de-consommation-luxe/le-poulet-ukrainien-inonde-le-marche-francais-les-volaillers-tricolores-tirent-la-sonnette-d-alarme-932897.html

[10] https://www.liberation.fr/debats/2019/05/21/pourquoi-la-france-doit-dire-non-au-poulet-ukrainien_1728530/

[11] https://www.wort.lu/fr/international/l-ukraine-un-pays-riche-en-ressources-naturelles-624472efde135b9236b3bba5

[12] https://www.huffingtonpost.fr/actualites/article/quelles-sont-les-richesses-de-l-ukraine-qui-interessent-tant-les-russes_34034.html

[13] https://www.agri-convivial.com/t25961-l-incroyable-testament-de-kissinger#711925

[14] Sophie MERITET, « L’énergie est-elle un driver important de la politique étrangère américaine ? », Revue internationale et stratégique, 2016/4 (N° 104.

[16] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/09/21/entre-la-russie-et-l-occident-macron-s-en-prend-aux-non-alignes_6142517_3210.html

[17] https://www.vie-publique.fr/discours/139148-discours-de-m-dominique-galouzeau-de-villepin-ministre-des-affaires-et

[18] https://www.lemonde.fr/international/article/2022/09/22/assemblee-generale-de-l-onu-zelensky-demande-un-juste-chatiment-contre-la-russie_6142643_3210.html

[19] https://www.latribune.fr/economie/international/hausse-des-taux-la-fed-s-apprete-a-frapper-un-grand-coup-pour-juguler-l-inflation-933501.html

[20] https://www.latribune.fr/economie/international/guerre-en-ukraine-viktor-orban-plaide-pour-la-fin-des-sanctions-contre-la-russie-avant-la-fin-de-l-annee-933842.html

1 commentaire:

  1. Article très intéressant, merci pour ces analyses et ces explications.
    Quelle tristesse de voir des populations entières manipulées à ce point, elles ne sauront jamais la vérité.
    Petite remarque sur le comparatif des dépenses militaires par pays, je me disais que les milliards d'euros dépensés en Russie n'ont pas la même valeur que ceux dépensés aux Etats-Unis (exemples : un ouvrier de l'industrie militaire russe coûte 4 fois moins que son homologue américain, les énergies nécessaires à l'armée aussi...). Espérons donc que les écarts soient moins importants qu'il n'y paraissent.

    RépondreSupprimer

La droite extrême de retour à Matignon navigue entre incompétence et haine des pauvres

  La Macronie a un principe affirmé, elle déteste les pauvres, les travailleurs et les retraités, ceux qui ne sont rien et qu’on pourrait ...