Le monde nous arrache quelques larmes, avec le reste de
la presse française sur l’arrestation et la condamnation de Laurent Vinatier en
Russie. Cet individu est présenté comme un « chercheur ». C’est un
terme neutre, mais qui peut recouvrir n’importe quoi, et après tout, les
espions sont aussi des chercheurs. Il serait donc un spécialiste de l’espace
post-soviétique. Pour comprendre qui est Vinatier, il faut remonter son
parcours, ce qui n’est pas facile. On s’aperçoit cependant que cet individu a
travaillé pour l’OTAN et il est difficile de faire passer cette boutique qui
veut la guerre jusqu’au dernier Ukrainien, pour une communauté d’intellectuels
cherchant la vérité. Il est également membre de l’Institut Thomas More qui est
en réalité un think-tank basé en Belgique qui est financé exclusivement par des
milliardaires de tendance plutôt de droite conservatrice et catholique. Il n’a
jamais été recruté ni par le CNRS, ni par l’Université. Il vient d’être
condamné à trois ans de prison ferme pour avoir « oublier » de s’inscrire
sur le territoire russe comme « agent de l’étranger ». Il est
difficile de savoir si en Russie il a été utile à l’OTAN et aux Ukrainiens,
mais il est certain que son point de vue est celui d’un ennemi de la Russie et
de Poutine qui sont en guerre contre l’OTAN. N’ayant été condamné qu’à trois
ans de prison, il est probable que la justice russe le considère comme un agent
de l’étranger de seconde catégorie. Lors de son arrestation en juin dernier, Le
monde parlait d’une nouvelle escalade, sous entendant par là qu’en arrêtant
Vinatier, Moscou agressait tout l’Occident[1] ! Mais Le monde ajoutait que « la partie russe faisait état
d’accusations graves : M. Vinatier aurait, durant plusieurs
années, « recueilli des informations dans le domaine des activités
militaires et militaro-techniques de la Fédération de Russie », informations « pouvant
être utilisées contre la sécurité de l’État ». En situation de
guerre, collecter des informations militaires est évidemment un acte hostile,
surtout si Vinatier émarge à l’OTAN qui est le grand stratège de la guerre en
Ukraine.
Arrêter des espions
est de bonne guerre, surtout en période de conflit ouvert. Mais Le monde ne
proteste pas quand les Américains ou les Français arrêtent des espions russes.
Autrement dit, pour ce journal, il est normal d’arrêter des agents de la
Russie, mais à l’inverse anormal d’arrêter des espions occidentaux sur le sol
de la Russie ! Vinatier a plaidé l’ignorance de la loi qui oblige les
étrangers à se déclarer comme agent de l’étranger quand ils sont financés par
des officines hostiles, et l’Institut Thomas More est bien une institution
hostile à la Russie. Cette défense est médiocre, puisque même moi qui ne vit
pas en Russie, je connaissais l’existence de cette loi. S’il ne l’a pas fait,
il est probable que c’est parce qu’il croyait ne pas être repéré, et qu’ne se
déclarant, il se serait au contraire signalé. Sa peine prononcée le 14 octobre
dernier est relativement légère comme Le monde le faisait remarquer. Et
il est probable qu’il sera échangé assez rapidement contre d’autres espions
russes avec d’autres prisonniers de son genre. Qu’il y ait des espions,
personne ne le contestera, c’est vieux comme le monde ! Mais ce qui est
inadmissible est de tenter de nous faire prendre des vessies pour des lanternes
en jouant de la corde sensible. Le monde s’obstine de donner à Vinatier
le simple titre de « chercheur », mais il ne faut pas être un
spécialiste de l’espionnage pour être convaincu qu’un chercheur peut-être aussi
un espion !
[1]
https://www.lemonde.fr/international/article/2024/06/06/l-arrestation-d-un-francais-a-moscou-nouvelle-escalade-de-la-part-de-la-russie_6237742_3210.html
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