Nicola Zingaretti, le
secrétaire du Parti démocrate, et Matteo Salvini, prêts à soutenir « sans veto
» l’exécutif de Draghi
Je précise tout de suite que je ne suis pas de ceux qui pensent
qu’il existe un danger fasciste éminent et c’est d’ailleurs parce que je pense
ainsi que je n’ai pas voté pour Macron en 2017 au deuxième tour des élections
présidentielles, m’évitant de choisir entre la droite extrême de Macron et l’extrême
droite de Marine Le Pen. Marine Le Pen a servi d’épouvantail pour rameuter des
électeurs de gauche très naïfs, mais en élisant le jeune banquier, dont l’incompétence
ne fait plus aucun doute, ils n’ont fait qu’amener le chaos. A l’heure actuelle
on tente de faire croire pour des raisons électorales à un renouveau d’un
danger fasciste, Macron y a intérêt. Ce n’est absolument pas ce que je crois, ma critique portera
sur tout autre chose. Ni la Liga, ni le RN ne sont équipés intellectuellement
et politiquement pour faire progresser l’idée d’une prise de pouvoir violente,
et pour tout dire, je crois que ces partis ne veulent pas vraiment le pouvoir
et se contentent de gérer un petit capital politique qui leur assure une rente.
Il y a quelques années, l’extrême-droite européenne semblait
pouvoir faire illusion auprès d’un électorat populaire. C’est terminé. En
France comme en Italie, elle tenait un discours populiste et anti-européen qui
justifiait aussi ses propositions anti-mmigrationnistes. Tout cela est bien
terminé. Matteo Salvini qui s’était montré dans un premier temps un excellent
tacticien enchaîne les bévues depuis qu’il a provoqué la rupture de la
coalition que la Liga formait avec M5S pour gouverner l’Italie. il n’a pas su
provoquer les élections générales qui auraient pu lui assurer le succès, et
s’est trouvé marginalisé par le médiocre Giuseppe Conte. Mais cela aurait pu
lui profiter s’il s’était posé en homme de rupture. Au contraire il est rentré
dans le rang. Alors qu’il était de ceux qui réclamaient une rupture nette avec
l’Union européenne et avec l’euro, il vient maintenant d’approuver la
nomination très anti-démocratique de Mario Draghi à la tête du gouvernement,
nomination proposée par le louvoyant président européiste Sergio Mattarella[1].
Bruxelles a de quoi se réjouir, cette capitulation compensant un petit peu la
défaite de la Commission européenne dans les négociations avec le Royaume Uni[2].
Or l’ancien président de la BCE est un banquier, un apparatchik de la finance
qui vient directement de Goldman & Sachs dont le seul fait notable est
d’avoir sauvé l’euro en déversant des milliards d’euros dans les banques
européennes. Le journal communiste L’humanité, toujours obsédé par une
lutte contre un hypothétique fascisme, titre bêtement que Mario Draghi est à la
botte de l’extrême-droite[3].
C’est une erreur grossière, il aurait fallu titrer à l’inverse Matteo
Salvini et l’extrême-droite italienne à la botte du capitalisme financier
européen. Cela eut été plus juste. Les partis d’extrême-droite en Italie
comme en France apparaissent seulement comme des partis opportunistes et sans
de vraies idées. Mais sans le combat contre l’Europe et l’euro que leur restera-t-il
pour rameuter des voix et progresser vers le pouvoir ? Lutter contre
l’immigration. C’est très insuffisant même si ce thème reste populaire par la
force des choses et des conséquences visibles en France comme en Italie de l’immigration
de masse et de l’islamisation. La ville de Trappes vient de nous en donner un
nouvel exemple[4].
Jordan Bardella et le coming out du RN sur l’Europe
En France Marine Le Pen et le Rassemblement national n’ont plus rien de national. Ils se sont eux aussi couchés devant Bruxelles. En avril 2019 elle avait déjà annoncé qu’elle n’entendait plus sortir de l’Union européenne[5]. Son idée était un peu celle des socialistes, construire une autre Europe, idée qui ressemble à un vieux serpent de mer et qu’on voit ressortir de temps à autre sous la forme du plan A et du plan B de Mélenchon, ou antérieurement sous le vocable d’une Europe sociale. Le vieux Jean-Marie Le Pen n’était pas du tout hostile à l’Europe, au contraire, en 2002 il faisait campagne pour un Europe blanche[6] ! On a vu par la suite le jeune Jordan Bardella expliquer que les temps avaient changé et donc qu’il n’était plus question d’abandonner la monnaie unique. Ces gens-là ne sont pas sérieux. Comment entre 2017 et 2021 une monnaie considérée à juste titre[7] comme mauvaise a-t-elle pu devenir bonne ? Quel est le succès récent qui le prouverait[8] ?
Les conséquences de cet abandon du combat anti-européen par l’extrême-droite
sont de deux sortes :
- d’abord il prouve que l’extrême-droite européenne n’est
absolument pas souverainiste, ni même nationaliste, mais elle n’est qu’un
instrument destiné à ramasser la colère populaire que ne peut plus endiguer la
gauche traditionnelle ;
- ensuite que si le gros de ses succès provenait de la
colère populaire contre l’austérité européiste, il est facile de parier que le
RN comme la Liga vont rapidement se vider de leurs troupes. C’est déjà le cas
en Italie où la Liga fait beaucoup moins recette qu’en septembre 2019. Marine
Le Pen stagne dans les intentions de vote, même si elle fait pratiquement jeu
égal avec Macron qui est vraiment détesté. Si les partis d’extrême-droite
pensent qu’ils vont s’acheter une respectabilité en se rangeant du côté du
capitalisme européiste, ils se trompent car une politique anti-immigration dans
un cadre européen a d’autant moins de sens que de nombreuses voix tentent de
ranimer l’idée moribonde d’une intégration de la Turquie[9].
Mais en outre ils avaient attiré des votes populaires justement parce qu’ils
montraient une hostilité très grande face à l’Europe et à l’euro.
Ce qui veut dire qu’une fois débarrassé de l’extrême-droite,
la sortie de l’Europe et de la monnaie unique peut enfin être sérieusement
envisagée pour peu qu’on trouve quelqu’un de crédible pour la porter. Au moins
on ne pourra plus nous traiter de suppôts de l’extrême droite lorsque nous
défendrons le Frexit ! François Asselineau qui est le grand ancien de la
lutte contre l’Europe et pour la souveraineté nationale, est maintenant empêtré
dans des affaires judiciaires compliquées pour lui[10].
Pour l’instant il n’y a pas de candidat ni à droite, ni à
gauche, pour relever ce défi. Mélenchon a abandonné l’idée et Montebourg laisse
lui aussi entendre qu’il sera un souverainiste à l’intérieur de l’Union européenne
et avec la monnaie unique ! Il y a là cependant une fenêtre de tir
intéressante pour un homme politique déterminé et courageux. Car même si
l’extrême-droite abandonne la lutte contre Bruxelles, les problèmes demeurent,
et la question se reposera inévitablement. Les hommes politiques feraient bien
de comprendre qu’il y a des millions d’électeurs qui vont être déçus par les
retournements de veste de Mélenchon et de Marine Le Pen. Ces électeurs sont
souvent représentatifs de la classe laborieuse, parfois ils viennent même du
PCF, et ne demandent qu’à soutenir un programme très social mais s’appuyant
aussi sur la souveraineté de la France.
[1] https://www.lemonde.fr/international/article/2021/02/08/en-italie-matteo-salvini-soutient-mario-draghi_6069196_3210.html?fbclid=IwAR2QfjI7QICqBWFBPkeex9hc7w1_RFRGHbSAQyZg6qjB_FqFknu2lB_GpR4
[2] https://ingirumimusnocte2.blogspot.com/2020/12/brexit-fin-de-partie-une-double-defaite.html
[3] https://www.humanite.fr/italie-mario-draghi-la-botte-de-lextreme-droite-699832
[4] https://www.lepoint.fr/societe/trappes-le-cri-desespere-du-professeur-lemaire-10-02-2021-2413370_23.php
[5] https://www.franceinter.fr/politique/marine-le-pen-renonce-officiellement-au-frexit-dans-son-projet
[6] https://www.liberation.fr/france/2016/06/25/quand-le-front-national-etait-pro-europeen_1461803/
[7] https://ingirumimusnocte2.blogspot.com/2021/01/leurope-et-leuro-dans-les.html
[8] https://www.liberation.fr/france/2016/06/25/quand-le-front-national-etait-pro-europeen_1461803/
[9] https://www.touteleurope.eu/actualite/adhesion-de-la-turquie-a-l-union-europeenne-ou-en-est-on.html
[10] https://www.lemonde.fr/politique/article/2021/02/08/face-aux-enqueteurs-francois-asselineau-et-ses-accusateurs-maintiennent-leurs-versions_6069162_823448.html
Bonjour. Pour l'Italie, il me semble que vous occultez trop vite fratelli d'Italia et la meloni qui est aujourd'hui selon les sondages le troisième parti du pays. Comme aujourd'hui elle représente à elle seule l'opposition avec paragone et éventuellement Battista et risque forcément de récolter les voix des futurs déçus de la politique de draghi.
RépondreSupprimerOui vous avez tout à fait raison, mais j'ai parlé de Salvini, parce qu'il était il y a peu à deux doigts du pouvoir, maintenant il en est très loin. C'est d'ailleurs le malheur de Salvini parce qu'au fur et à mesure qu'elle monte, la Lega descend. Salvini payera son reniement très cher, c'est un mauvais tacticien. Etrangement ce sont les électeurs de M5S qui sont le plus anti-européens aujourd'hui?
RépondreSupprimerAh ah, toujours cette obsession anti-UE. Il faut que tu rejoignes Asselineau et Philippot, René, pour un remake de la cage aux folles !
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