Passé l‘état de sidération dans laquelle les dirigeants européens, habitués de longue date à servir les intérêts américains, ont été plongés, la résistance s’organise dans le monde entier. Trump a voulu imposer une vision autoritaire et impériale à ses propres alliés. Mais il semble qu’il soit en passe d’obtenir l’exacte inverse de ce qu’il a désiré. Pour ma part je l’ai toujours pris pour un bonimenteur, ou une sorte de marchand de voitures d’occasion, et j’ai dit récemment que rapidement sa cote de popularité allait chuter lourdement aux Etats-Unis. Mais j’ajoute aujourd’hui qu’il ne va pas faire peur très longtemps. J’ai remarqué que les Russes se méfient beaucoup de lui et ne prennent guère au sérieux ses idées sur la paix en Ukraine qu’il prétendait régler en 24 heures, puis maintenant en cent jours. Les Etats-Unis sont le pays le plus détesté du monde, et ce n’est pas sans raison, Robert Kennedy Jr appelait que les Etats-Unis avaient contribué à renverser le gouvernement de 87 États souverains depuis 1945, soit pratiquement un par an ! Mais cette détestation était jusqu’à présent contenue auprès de ses alliés où la classe politique avait été achetée, l’Europe, le Japon, la Corée du Sud et l’Australie. Les pays émergents, les pays pauvres, sont tous très hostiles aux Etats-Unis, les pays d’Amérique latine, n’en parlons pas. Récapitulons les pitreries de Trump. Dans un premier temps il s’attaque à ses voisins du continent américain. Il veut le Panama et le Groenland, même au prix d’une guerre. Évidemment l’armée étatsunienne peut tout à fait gagner une guerre contre le Panama ou le Groenland, nous n’en doutons pas, mais le prix à payer serait bien trop élevé, non pas sur le plan militaire – enfin une guerre qu’ils peuvent gagner – mais sur le plan politique.
Les délires trumpistes ont commencé avec le Panama et son canal. Le prétexte avancé est que les Chinois bénéficieraient de tarifs préférentiels, alors que ce sont les Etats-Unis qui ont construit ce canal qui permet de relier l’Atlantique au Pacifique. Trump, en bon « Américain » est fâché avec l’histoire et avec la géographie. Si l’idée de cette construction est très ancienne, c’est le Français Ferdinand de Lesseps qui a réalisé les premiers travaux, qu’il dut abandonner à cause des scandales financiers qui se cachaient derrière cette opération d‘envergure. Plus récemment, dans les années 2000, les travaux d’élargissement de cet outil ont été entrepris par des entreprises espagnoles, belges et panaméenne. Les mensonges n’étouffent pas cette vieille bourrique étatsunienne. Il a avancé qu’il pourrait même envisager d’envoyer des troupes pour régler un différend qui n’existe que dans sa tête. Bien sûr, il peut gagner la guerre contre le Panama, petit pays de 4 millions d’habitants, et qui dispose seulement de 12 000 hommes de forces armées. Mais nous ne sommes plus à l’époque de Reagan qui pouvait se permettre de bombarder La Grenade sans que personne ne bronche. Une telle issue serait plus que mal vue dans la communauté internationale, même du côté des alliés traditionnels des Etats-Unis. Est-ce une nouvelle fanfaronnade ? Je le pense, mais je n’en suis pas certain, les Etats-Unis sont trop habitués à ce qu’on exécute leurs ordres pour avoir conscience pleinement qu’ils sont un Empire directement sur la voie du déclin dans à peu près tous les domaines.
L’homme à la figure orange a présenté en même temps l’idée d’annexer le Groenland, un territoire autonome qui appartient au Danemark. Avançant de façon mensongère, c’est son havbitude, que les Groenlandais aimeraient bien être Américains (en vérité Étatsuniens). Un récent sondage donnait que 85% des Groenlandais bien au contraire refusaient de se trouver annexés. Seuls 6%, probablement ceux qui traficotent déjà avec les entreprises étatsuniennes, souhaitent ce rattachement[1]. Pire encore, les Danois, longtemps les meilleurs chiens de garde des intérêts étatsuniens en Europe avec les Anglais, considèrent que les Etats-Unis sont une menace réelle pour le Danemark plus importante que la Corée du Nord ou l’Iran[2]. Dans ce chaos généralisé instauré par les velléités impérialistes de Trump, les Européens commencent à paniquer, et on a vue l’improbable ministre français des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, un macronien à moitié idiot, qui après avoir avancé qu’il faudrait envoyer des troupes au sol en Ukraine, a proposé aux Danois de défendre le Groenland en envoyant l’armée française pour défendre les intérêts du Danemark[3] ! N’est-il pas drôle celui-là ? Certains commentateurs ont essayé de rationaliser les projets aventuristes de Trump en parlant du fait que si les Etats-Unis prenaient le contrôle du Groenland, ils pourraient mettre la main sur des ressources rares et s’ouvrir une route plus facile pour la conquête du pôle Nord et faire pièce aux Russes pour son exploitation. Mais c’est une erreur car en réalité les Etats-Unis sont déjà présents sur ce territoire peuplé de seulement 50 000 personnes, avec une base militaire importante[4] et des sociétés étatsuniennes qui exploitent déjà les sous-sols de ce petit territoire[5].
Trump qui ne sait pas trop ce qu’il dit, ni ce qu’il fait, a
procédé en deux temps avec ses voisins. D’abord il a avancé qu’il allait
annexer le Canada et le Mexique. Il faut bien le dire cette idée loufoque est
hors de portée de l’armée américaine qui est principalement composée
d’afro-américains et d’hispaniques qui n’iront pas se faire trouer la peau pour
ce genre de cause. Ces deux pays voisins, agressés comme jamais par les
Etats-Unis, ne sont pas le Panama et le Groenland, et les stocks de munitions de
l’armée américaine qui a beaucoup donné à l’Ukraine sont au plus bas. Puis, il
est passé à autre chose, il allait mettre en place des droits de douanes de 25%
sur les produits importés du Mexique et du Canada. Cette idée est débile parce
que les Etats-Unis y ont plus à perdre qu’à y gagner. Avec le Canada, ils ont
une balance certes déficitaire, mais assez légèrement déficitaire, et les USA
vendent pour 441 milliards de dollars de produits au Canada[6].
Les Canadiens ont tout de suite riposté en lançant une campagne de boycott des
produits étatsuniens, et en remettant en cause le fait des entreprises
étatsuniennes puissent répondre à des appels d’offres sur les marchés publics
et en répondant aussi avec des droits de douane élevés. Cela a suffi pour faire
revenir en arrière Trump et suspendre son propre décret qu’il avait pris
quelques jours auparavant. Dans le cas du Mexique, c’est différent, car si les
États-Unis ont une balance commerciale lourdement déficitaire, 131 milliards de
dollars en 2023, avec ce pays, c’est parce que les entreprises américaines ont
délocalisé au Mexique pour bénéficier de salaires plus bas. Autrement dit en
mettant des taxes de 25% sur les produits arrivant depuis le Mexique Trump
pénalise les entreprises étatsuniennes implantées dans ce pays[7] !
Cette rapide analyse explique pourquoi Trump a dû reculer sur ce dossier. Il
n’a d’ailleurs rien obtenu de la part du Mexique en échange de ce retrait, si
ce n’est la vague promesse que le Mexique lutterait contre l’immigration
clandestine avec plus d’ardeur et contre les cartels de la drogue. Cet épisode
a démontré que Trump était très fragile et qu’on pouvait s’opposer finalement
assez facilement à ses lubies pour le faire reculer. Il est probable que cela
donnera des idées à d’autres pays, sur d’autres dossiers, notamment sur celui
de Gaza. En avançant des idées contradictoires pour faire croire qu’il avance
et va quelque part, Trump donne l’image d’un immobilisme désuet. Évidemment, je
n’aimais pas Biden, et sa politique étrangère ne me plaisait pas. Mais on
savait tout de même où on allait, même si c’était dans le mur ! A
l’inverse l’improvisation permanente de Trump installe juste le chaos. Mais
peut-être est-ce le but pour qu’on empêche de penser ? Le plus étrange
dans cette comédie aigre, c’est que Trump qui signe des décrets à tour de bras,
sans s’occuper de savoir si le Congrès suivra ses loufoqueries, c’est qu’après
avoir désigné la Chine comme le premier ennemi des USA, il ne leur a mis que
des droits de douane de 10%, bien moins faibles que pour le Canada ou le
Mexique ! Les pays touchés par ces droits de douane intempestifs ont
décidé de porter le contentieux auprès de l’OMC[8].
Si les Etats-Unis persistaient, cela voudrait dire qu’ils vont sortir de l’OMC.
Ce ne serait pas un mal bien entendu.
L’Union européenne, en tant que telle, se trouve maintenant dans l’obligation de réagir. On murmure que la Commission prépare des mesures de rétorsion. À vrai dire, elle n’a pas le choix, déjà que sa crédibilité est proche de zéro, faire l’impasse sur cette agression la plongerait dans le néant. En effet Trump exerce un chantage très fort sur l’Europe en cherchant à l’obliger à acheter du gaz liquéfié aux USA pour rééquilibrer sa balance commerciale largement déficitaire. Histoire de prouver combien elle avait l’échine souple devant son maître, Ursula von der Leyen avait avancé, juste après l’élection de Trump, bien imprudemment que ce serait une bonne chose que l’UE achète ce gaz qui coute pourtant plus cher – 40% de plus – que le gaz russe[9]. Elle a été jusqu’ici un des agents américains principaux en Europe pour faire avancer les intérêts des Etats-Unis. Elle a promis que des mesures fortes étaient à l’étude. Mais une des conséquences de l’agressivité de Trump est que le camp européen se déchire. L’atlantiste Sylvie Kauffmann du Monde signait un éditorial intitulé Faut-il traiter les Etats-Unis non plus comme un concurrent, mais comme un ennemi ? Poser la question, c’est y répondre. Après avoir soutenu stupidement que sans Joe Biden Poutine aurait « avalé » l’Ukraine, elle relève ensuite toutes les couleuvres que l’administration Biden a pu faire « avaler », sans aller toutefois à parler du sabotage de Nord Stream I et II qui est bel et bien un autre acte de guerre contre l’Europe. Autrement dit après avoir célébré depuis des années la Sainte Alliance de l’Union européenne avec les Etats-Unis et l’OTAN, elle découvre que les Européens sont traités comme les domestiques de l’Empire[10] ! Il lui a fallu Trump pour le comprendre ! De Gaulle le disait et agissait pour limiter les dégâts, et Mitterrand l’affirmait : « La France ne le sait pas, mais nous sommes en guerre avec l’Amérique. Oui, une guerre permanente, une guerre vitale, une guerre économique, une guerre sans mort apparemment. Oui, ils sont très durs les Américains, ils sont voraces, ils veulent un pouvoir sans partage sur le monde. C’est une guerre inconnue, une guerre permanente, sans mort apparemment et pourtant une guerre à mort. »[11] Sylvie Kauffmann milite de longue date pour la mondialisation heureuse, l’expansion continue de l’Union européenne et la guerre à la Russie de longue date. C’est son fonds de commerce. Membre de la Commission Trilatérale, émanation du groupe Bilderberg, elle fait partie au niveau mondial des faucons qui prônent la guerre à outrance contre la Russie et le Chine. Son retournement vis-à-vis des Etats-Unis est intéressant en ce sens qu’il montre que le Grand capital, du moins une partie de celui-ci ne fait pas confiance à Trump pour reconstruire la mondialisation des échanges qui bat de l’aile. Ce que nous voyons pointer à travers cette fracturation du camp occidental, c’est le schéma suivant : d’un côté Trump qui veut imposer une vision brutale de l’Empire qui passe par-dessus les organisations internationales, l’ONU, l’OMS, l’OMC, ou encore la CPI et de l’autre les ineffable Européistes qui militent pour une gouvernance mondiale via ces mêmes organisations. On ne sait pas encore ce que Trump va faire avec l’OTAN, il me parait assez improbable que les Etats-Unis s’en retirent, ne serait-ce que parce que les Etats-Unis ne peuvent sur le long terme continuer à faire la guerre à la Russie tout seuls pour mettre la main sur les réserves naturelles de ce pays – projet obsessionnel qui ne sera jamais abandonné.
Mais la question qui se pose aux Européens est la suivante,
si les Etats-Unis sont l’ennemi, ce que je pense bien entendu, alors ils vont
devoir, dans un délai plus ou moins long, se tourner vers la Russie et vers la
Chine, aussi bien pour avoir de l’énergie pas trop chère, que pour trouver des
nouveaux débouchés. Regardez le tableau ci-dessus, entre 2022 et 2023, la
première année de la guerre, les exportations vers l’Union européenne en
provenance des Etats-Unis ont baissé de 13% tandis que celles en provenance de
la Russie augmentaient de près de 50% et que celles en provenance de la Chine
baissaient seulement de 5%. Il y avait donc une pente naturelle pour que
l’Europe trouve sa voie à l’Est de ses frontières, et on comprend bien mieux
pourquoi les Américains, Trump aussi bien que Biden ont tout fait pour couper
les ponts entre l’Europe et la Russie. Mais le gros problème que les Européens
ont avec les Etats-Unis c’est principalement que leur politique monétaire est
divergente : les Européens font de la dette et de l’inflation leur
obsession – sans résultats concrets pourtant – tandis que les Etats-Unis
laissent filer la dette et l’inflation dans une situation où pourtant la valeur
du dollar est potentiellement menacée, notamment par le développement des
BRICS, pays peu endettés et dont la dynamique économique est bien plus rapide
que celle des Etats-Unis. Il est de moins en moins vrai que les pays émergents,
les BRICS notamment, ne puissent pas se passer d’un accès direct aux marchés
occidentaux.
La dernière fantaisie de Trump qui ne doute de rien, est d’avoir avancé son projet pour Gaza, alors qu’il recevait à la Maison Blanche Netanyahu. Son plan était assez simple : d’abord déporter les Palestiniens de Gaza vers d’autres États arabes, l’Égypte et la Jordanie, puis les Etats-Unis prendrait le contrôle militaire de cette petite bande de terre et la transformerait en une sorte de Côte-d’Azur du Moyen-Orient, selon ses propres termes. Mais si les Palestiniens sont déportés ailleurs, on se demande bien avec qui cette bande de terre fonctionnera et pour le compte de qui. La stupidité de cette politique de la brute est qu’elle se heurte aux réalités qui dépasse ses pouvoirs. Le premier point est que des Palestiniens, les autre États arabes n’en veulent pas, pour des tas de raison, on a vu ce qu’au bout du compte les Palestiniens exilés ont pu faire au Liban. La seconde est que d’un point de vue du droit international, les Etats-Unis n’ont aucun droit de s’installer à Gaza. Il dresserait ainsi contre lui la quasi-totalité des pays musulmans. La Turquie a déjà réagi et fait savoir que cette fantaisie serait combattue. Trump en voudrait bien la propriété ! Il a avancé bêtement que : « Tous ceux à qui j’ai parlé adorent l’idée de voir les Etats-Unis posséder ce morceau de territoire, de développer et de créer des milliers d’emplois avec quelque chose qui sera magnifique. » Dialoguerait-il avec plus idiot que lui ? Loin de résoudre les problèmes existentiels d’Israël, cette fantaisie en créerait de nouveaux et éloignerait plus encore cette région malheureuse d’un règlement diplomatique négocié qui aboutirait à la création de deux États et donc à une paix durable. Comme on devait s’y attendre, tout le monde lui est tombé dessus, l’ONU, le président égyptien, et même le semi-retraité de la politique Macron ! Dans ces conditions, il va avoir du mal à s’approprier cette langue de terre, car non seulement il y a un problème de souveraineté qui ressort du droit international, mais aussi des questions de propriété des terrains qui sont du domaine du droit privé et qui appartiennent à des Palestiniens. Combien cette déportation coûterait-elle ? et qui payerait ? Depuis ces annonces intempestives, les forces en présence s’organisent. Évidemment sans s’accorder, les Européistes, l’ONU et bien entendu les pays arabes sont complètement contre cette idée, les Chinois et les Russes également. Les faucons israéliens, à commencer par le ministre de la défense Israel Katz, ont avancé que les Palestiniens de Gaza devaient se préparer à l’expulsion, il employait le mot de « départ volontaire », mais cela ne trompait personne puisqu’il ajoutait que c’est l’armée qui se chargerait de la besogne, et que d’autre part les pays européens devaient les accueillir, il ciblait notamment l’Espagne et la Norvège qui ont vivement répondu qu’il n’en était pas question. Les Européens refusent bien évidemment cette solution. Cette nouvelle bouffonnerie qui vient appuyer celle de Trump va mettre le feu aux poudres, et isoler un peu plus le couple USA-Israël, les deux pays vont souffrir d’une stigmatisation croissante, alors qu’ils sont déjà marginalisés au sein de la communauté internationale. Que veut faire Trump ? De Gaza un nouvel État américain ? Ce serait le 51ème, le Groenland le 52ème, et le Canada le 53ème ? Ces fantaisies mégalomaniaques vont accélérer l’isolement des USA sur la scène internationale, peut-être même avec des sanctions économiques à la clé.
En Israël beaucoup soutiennent les idées de Trump
Beaucoup d’Israéliens pensent que cette déportation réglerait leur problème de sécurité avec le Hamas qui n’est pas tout à fait mort. Mais outre que cette expulsion ferait probablement redémarrer le conflit entre Tsahal et le Hamas, il risquerait de pousser les Arabes israéliens à soutenir les Gazaouis, et renforcerait les mouvements anti-israéliens en Cisjordanie. Les Israéliens n’ont rien à gagner dans cette perspective. Il est tout à fait possible d’ailleurs que ces sinistres fantaisies fragilisent le difficile accord d’apaisement entre Israël et le Hamas et obligent celui-ci à relancer ses actions terroristes. Il est assez peu probable que cette idée, comme beaucoup d’autres élucubrations de Trump, se réalise, mais dans ce cas, la parole des Etats-Unis qui ne vaut déjà pas très cher, serait considérablement dévalorisée. Du reste Trump n’a pas précisé ce qu’il entendait en avançant que les Etats-Unis prendraient le contrôle de Gaza : annexion, occupation, remise de cet espace à Israël ? On sait bien qu’aujourd’hui de nombreux pays se sont affranchis aussi bien du droit international que d’un travail diplomatique sérieux. Mais encore faut-il avoir les moyens de ce genre de politique aussi bien sur le plan financier que sur le plan politique. Pourtant on aurait tort de s’affoler, au lendemain de cet énoncé des délires trumpistes, la Maison Blanche faisait déjà machine arrière. Marc Rubio annonçait que les propos de Trump ne visaient pas à la déportation des Palestiniens, mais seulement à les déplacer le temps que Gaza soit reconstruit, et qu’ensuite ils pourraient revenir[12] ! En même temps pour ajouter à la confusion, Karoline Leavitt la jeune porte-parole de la Maison Blanche, affirmait dans la matinée du 6 février 2025, qu’il n’était pas question que les Etats-Unis financent la reconstruction de Gaza ! Daniel Pipes, pourtant qu’on peut ranger dans le camp des faucons, avançait que l’expulsion des Gazaouis n’avait aucune chance de se réaliser un jour[13]. Donald Trump ne serait-il qu’un velléitaire ? Je n’ai rien d’un soutien de la cause palestinienne, et je sais bien que ce désastre à Gaza a été provoqué par le pogrom du 7 octobre 2023 déclenché par le Hamas. Néanmoins cela ne justifie pas de les traiter pire que des animaux qu’on mène à l’abattoir.
Les Palestiniens de Gaza ne savent pas où aller
Parmi les autres déclarations de Trump, il y a cette idée
qu’il veut bien donner encore des armes à l’Ukraine, mais qu’en échange il veut
les terres ukrainiennes qui seraient susceptibles d’être exploitées. Cette
déclaration est passée un petit peu inaperçue, elle est pourtant révélatrice de
deux choses, d’abord que les Etats-Unis n’ont jamais envisagé de construire la
paix avec la Russie, ensuite que les Etats-Unis considèrent que l’Ukraine est
maintenant à eux, étant donné l’argent qu’ils y ont investi. Zelensky qui n’est
plus à une bassesse près s’est dit favorable pour brader ce qui reste de son
pays à des intérêts étrangers, les terres agricoles étant déjà la propriété des
multinationales étatsuniennes[14].
On sait aussi que ces fameuses terres rares sont essentiellement dans les
régions conquises par la Russie et rattachées à elle. Cela ne risque pas de
lever la méfiance des Russes à son endroit et de progresser vers la paix dans
ce secteur. On a beau présenter les choses autrement, Trump n’est pas un homme
de paix, et au bout du compte sa politique ne sera guère différente dans ses
finalités que celle de Biden qualifié pourtant de faucon.
Contrairement à ce que disent les journaux, ce n’est pas un retour de l’Impérialisme américain, celui-ci a toujours existé et Joe Biden en a abusé largement en instrumentalisant une guerre avec les Russes en Ukraine pour piller l’Europe. C’est un changement de braquet. Au lieu de ménager un peu ses alliés – les dirigeants européens que les Etats-Unis ont formés à la chaîne – Trump les brutalise, leur demandant de se soumettre sans broncher. Ça ne semble guère passer, et pas seulement pour des raisons d’amour-propre. Les Etats-Unis n’ont pas les moyens financiers, militaires et politiques d’imposer leurs vues. J’avais signalé que la cote de popularité de Trump avait commencé de chuter avec la signature de ses premiers décrets. Il est assez impensable que les Américains le suivent dans ses élucubrations visant à conquérir de nouveaux territoires et à martyriser ses propres alliés. Avant Trump l’impérialisme américain ne reposait pas sur une extension territoriale, sur des colonies, il se contentait de contrôler son arrière-cour par des marionnettes corrompues. Trump a choisi de faire l’inverse. Il va de soi que s’il y parvenait, ce serait une nouvelle ère qui s’ouvrirait, une marche vers le fascisme parce que pour cela il lui faudrait violer le droit international, ce qui ne le dérangerait pas plus que ça, mais ce qui donnerait des résultats très aléatoires à moyen et long terme. Au-delà de cet aspect bouffon, on remarque que ce qui est mis en pièce par Trump c’est l’idée d’une gouvernance mondiale. Son affidé argentin, Javier Milei, qui le copie dans sa vulgarité comme dans sa bêtise, vient de décider de sortir de l’OMS. Les organismes internationaux comme l’OMC, l’Union européenne ou les Nations Unies ou encore la CPI qui mettaient un semblant d’ordre dans la mondialisation, risquent de payer les pots cassés des dégâts engendrés par le désordre trumpien.
En dehors de ces annonces intempestives, que fera Trump
réellement ? On n’en sait rien, et sans doute lui-même ne le sait pas.
Sylvain Ferreira rappelait à juste titre que durant son premier mandat, il
avait avancé des positions très dures sur la Corée du Nord, y compris la
possibilité d’un affrontement militaire, puis, tout cela s’était terminé par
une poignée de main sur le 38ème parallèle avec Kim-Jong-un[15].
De là à dire que Trump est juste un bouffon qui amuse le tapis je n’irais pas
jusque-là, mais cette personnalité mentalement instable a bien du mal à prendre une
direction claire sur le plan politique et c’est certainement ça qui le rend
dangereux
[1]
https://www.euractiv.fr/section/politique/news/seuls-6-des-groenlandais-souhaitent-rejoindre-les-etats-unis-et-se-separer-du-danemark-selon-un-sondage/
[2]
https://www.lejdd.fr/International/groenland-les-danois-considerent-les-etats-unis-comme-une-plus-grande-menace-que-la-coree-du-nord-et-liran-154487
[3]
https://www.euractiv.fr/section/defense/news/la-france-prete-a-reflechir-a-lenvoi-de-troupes-europeennes-au-groenland/
[4] https://www.grands-espaces.com/decouvertes/thule-air-base-la-sentinelle-strategique/#:~:text=%C3%80%201524%20km%20seulement%20du,de%20plus%20de%20300km%2Fh.
« Lors de
la Seconde Guerre mondiale et suite à l’invasion du Danemark en 1940,
l’Ambassadeur du Danemark a signé aux Etats-Unis en 1941 les termes d’une
alliance permettant aux USA la mise en place d’installations militaires au
Groenland, alors sous autorité danoise ».
[5]
https://carboncredits.com/from-trumps-pursual-to-mining-boom-top-3-greenland-stocks-to-watch-in-2025/
[6]
Chiffre de 2023.
[7] https://www.lemonde.fr/economie/article/2025/02/04/droits-de-douane-le-bluff-a-la-pyrrhus-de-donald-trump-face-au-canada-et-au-mexique_6530215_3234.html
[8]
https://www.wto.org/french/news_f/news25_f/ds633rfc_05feb25_f.htm
[9]
https://www.euractiv.fr/section/energie-climat/news/leurope-na-pas-besoin-du-gaz-americain-mais-risque-de-lacheter-quand-meme/
[10]
https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/02/05/faut-il-traiter-les-etats-unis-non-plus-comme-un-concurrent-mais-comme-un-adversaire-la-question-est-vertigineuse-pour-l-europe_6532116_3232.html
[11]
Ces phrases célèbres sont citées par Georges-Marc Benhamou dans son livre, Le
dernier Mitterrand, Plon, 1997.
[12]
https://www.youtube.com/watch?v=WUXgUV0kgaE
[13]
https://fr.danielpipes.org/22483/echec-militaire-disrael-et-avenir-sombre-de-gaza
[14]
https://fr.euronews.com/2025/02/04/terres-rares-en-echange-daide-a-lukraine-berlin-et-moscou-critiquent-la-proposition-de-tru
[15]
https://www.youtube.com/watch?v=B93Vuz6lTb8&t=1s
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire